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LA RÉVOLUTION ET NOUS

~ le blogue historien de Claude Guillon

LA  RÉVOLUTION  ET  NOUS

Archives Mensuelles: juin 2013

Mathiez, Robespierre & Dolivier

30 dimanche Juin 2013

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1793, Albert Mathiez, Communisme, Pierre Dolivier, Robespierre

En complément au texte de Dolivier Essai sur la justice primitive (voir texte suivant), je reproduis ci-après un article de Mathiez sur le curé de Mauchamp, et quelques lignes du même, tirées de son ouvrage La Vie chère et le mouvement social sous la Terreur. J’ajoute la présentation que fait Robespierre dans son journal de la pétition rédigé par Dolivier.

 Deuxième d’une série de trois articles initialement publiés dans Le Réveil du Nord, puis repris dans les Annales révolutionnaires (1913), et dans le recueil Études sur Robespierre, publié aux Éditions sociales par la Société des études robespierristes (avec une préface de Georges Lefebvre) en 1958 (pp. 112-116).

ROBESPIERRE ET PIERRE DOLIVIER, CURÉ DE MAUCHAMP

 

À la Constituante, Robespierre n’avait abordé la question sociale que de biais à propos du droit de vote, du droit de porter les armes, du droit de chasse, de la loi martiale. C’est qu’alors le peuple ouvrier et paysan marchait encore d’accord avec la bourgeoisie contre le commun ennemi, le noble et le prêtre. Sous la Législative et sous la Convention, les choses changent. La scission se fait entre les alliés de la veille et la question sociale passe au premier plan.

Il fallut la misère menaçante, le travail et le pain prêts a manquer pour forcer les sans-culottes à sortir de leur indifférence politique, à revendiquer leur part dans le gouvernement, à inaugurer une tactique de classe. La chute du roi, l’établissement de la République, la prolongation de la guerre étrangère, qui s’aggrave bientôt de la guerre civile, apeurent une partie de la bourgeoisie, qui devient conservatrice et se retire de la Révolution. L’argent se cache. Les assignats sont émis en quantités croissantes pour subvenir aux dépenses démesurément accrues. Le papier tombe chaque jour. Il ne vaut bientôt plus que la moitié, que le tiers de son prix nomi­nal. Les denrées renchérissent d’autant, mais les salaires ne suivent pas la même progression. Les ouvriers murmurent. Malgré la loi Chapelier, qui leur défend de se concerter et de faire grève, ils s’attroupent, ils assiègent les municipalités, ils réclament du pain ! Les subsistances devenaient hors de prix juste au moment où les riches bourgeois affolés fermaient leurs manufactures, juste au moment où l’Angleterre, maîtresse des mers, arrêtait tous les convois, juste au moment où la récolte était insuffisante et où les paysans cachaient leurs grains et refusaient de les conduire au marché, juste au moment où il fallait nourrir les nombreuses armées poussées à toutes les frontières.

En octobre 1792, le prix du blé atteignait 45 francs l’hectolitre en moyenne. Dans le Midi, la hausse était encore plus forte. On mangeait des herbes cuites comme dans les plus mauvais jours du despotisme. De 3 sous la livre, le pain était monté à 5, 6, 7 et même 8 sous. Or beaucoup de journaliers agricoles et de manœuvres des villes ne gagnaient pas plus de 20 à 25 sous par jour ! L’agitation fut générale et violente. Dans tous les départements éclatèrent des troubles qui durèrent plusieurs mois. On arrêtait les envois de blé. Des foules armées s’emparaient des marchés, obligeaient les autorités à taxer toutes les denrées de première nécessité : le pain, le savon, la chandelle, le charbon, etc. Le mouvement était bien un mouvement de classe. Le peuple s’opposait comme classe, non plus à la noblesse qui avait émigré, au clergé qui était exproprié, mais à la bourgeoisie elle-même, aux propriétaires et aux employeurs. Les émeutiers d’Eure-et-Loir, rapporte le représentant Birotteau, disaient que «les bourgeois avaient assez joui, que c’était le tour maintenant des pauvres  travailleurs».

Girondins et Feuillants, profondément attachés au dogme de la liberté économique que Turgot et son école venaient de proclamer, ne surent opposer aux souffrances des travailleurs que la répression à outrance, la loi martiale. La taxation des denrées de première nécessité leur parut une mesure «anarchiste», une atteinte à la propriété, le prélude de la loi agraire. Ils firent défense aux autorités locales de céder aux réclamations des foules, ils leur ordonnèrent de défendre à tout prix la liberté absolue des transactions. Et partout, entre la garde nationale bourgeoise et le peuple des sans-culottes, ce furent des rencontres, des rixes, des batailles parfois sanglantes, dont la responsabilité fut mise par la Gironde sur le compte des manœuvres de l’aristocratie.

Le maire d’Etampes, Simoneau, ayant été tué dans une émeute pour avoir refusé de taxer les grains, le 3 mars 1792, la Législative décréta qu’un monument serait élevé en l’honneur de cette victime de la loi à l’endroit même où il avait succombé sur la place du Marché d’Etampes, et, dans toute la France, des fêtes de la Loi furent célébrées pour glorifier Le dévouement à la liberté économique.

Robespierre, qui ne passe pour un esprit abstrait, pour un idéologue, qu’aux yeux de ceux qui ne le connaissent pas, ne vit dans la glorification de Simoneau que le triomphe de la bourgeoisie possédante et une défaite de la sans-culotterie. Alors que les Jacobins eux-mêmes se laissaient entraîner, il réagit avec une grande vigueur dans Le Défenseur de la Constitution, qu’il venait de fonder, contre la légende qui représentait les troubles économiques comme des troubles factices excités par les ennemis de la Révolution. Les souffrances du peuple n’étaient que trop certaines et ses réclamations légitimes. Avec un beau courage, il protestait contre la fête de Simoneau et représentait le maire d’Etampes comme un négociant avide et brutal, un accapareur, qui avait péri victime de sa rapacité et des justes colères qu’il avait soulevées. À l’appui de ses dires, Robespierre publiait une pétition très précise, circonstanciée, que des citoyens de quarante communes voisines d’Étampes avaient signée, pour solliciter la grâce des malheureux arrêtés pour le meurtre du maire. Chose remarquable, la pétition avait été rédigée par le curé de Mauchamp, Pierre Dolivier, un curé démocrate dans le genre du curé Meslier, qui rédigera bientôt des écrits à caractère communiste.

Au milieu de L’année 1793, Pierre Dolivier publia son remarquable Essai sur la justice primitive où on pouvait lire des déclarations comme celle-ci : «La terre, prise en général, doit être considérée comme le grand communal de la nature où tous les êtres animés ont primitivement un droit indéfini sur les productions qu’il renferme. Chaque espèce d’animaux a son instinct qui le dirige ; l’homme a de plus la raison avec laquelle il se crée un nouvel ordre des choses, qui est l’ordre social : dans cet ordre social le droit indéfini doit cesser sans quoi la société ne pourrait subsister : mais, en échange, chaque individu doit y trouver son droit de partage au grand communal, sur lequel il a les mêmes prétentions à former que tous ceux qui l’ont précédé, ou que tous ceux avec qui il marche sur le même rang dans la vie ».

Dolivier établissait sa «justice sociale» sur deux principes immuables «le premier que la terre est à tous en général et n’est à personne en particulier ; le second que chacun a un droit exclusif au produit du travail», d’où cette conclusion qu’«en dernière analyse ou ne peut acquérir sur le fonds de terre qu’un droit de possession viagère, donc qu’il ne peut exister qu’une seule espèce de propriété transmissible qui est la propriété mobilière». Et Dolivier poursuivait une admirable critique de la révolution politique qui venait de s’accomplir. Il montrait avec une force irrésistible que l’égalité devant la loi n’est rien quand subsiste l’inégalité de fait. «Quoi ! de deux enfants qui viennent au monde, dont l’un est fils d’un riche propriétaire, et l’autre d’un infortuné manouvrier qui ne possède que ses bras pour subvenir à sa subsistance, le premier naît avec des droits immenses et le second n’a pas même celui de reposer nulle part sa chétive existence !

»… Où peut être la liberté quand le besoin causé par un dénuement général rend dépendant de tout ? et où peut être l’égalité quand les uns trouvent tout fait pour eux et les autres tout à faire ?… Ils peuvent acquérir, dit-on, ils ne sont exclus de rien. La loi nouvelle a banni toute acception de personnes et a ouvert à tous indistinctement les portes de l’avancement. Voilà donc ce qu’on entend par le mot d’égalité ? Comme on a besoin d’illusion, comme on s’en laisse imposer par des mots ! Ceux qui n’ont rien peuvent acquérir, mais d’abord pourquoi n’ont-ils rien ?

» C’est une grande vérité qu’a dite J.-J. Rousseau que la première pistole est plus difficile à gagner que le second million. Les riches se croient fort nécessaires au malheureux ; et lorsqu’ils en occupent un grand nombre à leurs terres ou à leurs ateliers, ils disent avec une sorte de jactance qu’ils font vivre beaucoup de monde. Ils devraient dire qu’il faut beaucoup de monde pour les faire vivre dans leur opulent loisir.» Et encore cette remarque si juste sur les bénéficiaires de l’expropriation du clergé : « On vient de vendre et l’on vend encore tous les jours beaucoup de biens nationaux, qui est-ce qui en a profité, et qui est-ce qui en profite ? Ne sont-ce pas les seuls riches, ou les seuls qui se sont emparés des moyens de le devenir ?»

N’est-il pas très significatif que ce théoricien du communisme ait été en relations cordiales avec Robespierre dès le mois d’avril 1792, qu’il se soit adressé au journal de Robespierre pour faire insérer sa pétition contre l’arrestation des malheureux inculpés pour le meurtre du maire d’Etampes, que Robespierre ait appuyé sa campagne sans réserve ? Dolivier et Babeuf se connaissaient [*]. On retrouvera dans les papiers de Babeuf au moment de son arrestation sous le Directoire l’Essai sur la justice primitive. Nous comprenons pourquoi Babeuf écrivait à son ami Coupé (de l’Oise) qu’il considérait Robespierre comme un allié, comme un combattant du combat pour la justice, mais comme un combattant prudent et habile qui, pour mieux faire triompher la bonne cause, la présente sans brusquerie, sans tapage, de manière à ne pas effaroucher l’opinion. Nous le comprendrons mieux encore quand nous étu­dierons la politique sociale de Robespierre sous la Convention.

 * À ma connaissance, ce point n’est pas établi. Maurice Dommanget est lui-même très prudent et laisse ouverte l’hypothèse sans trancher, faute de preuves. C. G.

 ___________________

Dans La Vie chère et le mouvement social sous la Terreur (1927), Mathiez adresse à Dolivier (p. 74) une critique que j’ai du mal à comprendre, raison de plus pour attirer l’attention dessus. Transmettre à la nation, c’est-à-dire à l’ensemble du peuple, ce qui appartenait au monarque — la propriété de la terre comme la souveraineté — n’est-ce pas la nature même de la révolution, telle au moins que la souhaitent enragé(e)s et « curés rouges » ?

On trouvera singulièrement hardi ce langage du curé jacobin. On dira qu’il est socialiste et je n’y contredis point. Mais ce socialisme-là ne puise pas seulement sa source dans l’extrême philosophie et le droit naturel, il est en un certain sens très archaïque. Dolivier faisait-il autre chose que reprendre au profit de la nation le droit éminent que les anciens rois exerçaient sur toutes les terres de leur royaume ? Louis XIV disait lui aussi qu’il était maître de tous les biens de ses sujets. La nation succédait à Louis XIV. Le socialisme de Dolivier n’a d’ailleurs pour but que de justifier, en cas de disette seulement, le retour à la taxation et à la réglementation anciennes. Il est moderne, si on veut, par son accent, il est très ancien dans sa forme juridique, dans son esprit évangélique, dans son objet comme dans ses moyens.

 _______________

Présentation par Robespierre du texte de la pétition rédigée par Dolivier au nom de quarante habitants des communes de Mauchamp et avoisinantes, publiée dans son Défenseur de la Constitution, n° 4, pp. 188-190

Je suis loin de justifier aucune infraction à la loi ; mais le plus grand ennemi des loix, c’est le vil calomniateur qui ose s’en faire un prétexte pour accabler la foiblesse et écraser la liberté ; je connois un crime beaucoup plus grand que celui dont on accuse le peuple d’Étampes, c’est la lâcheté avec laquelle on a dénaturé toutes les circonstances de cette affaire, pour rendre le peuple odieux et répandre la consternation dans une contrée entière. Eh bien, je le déclare ; Simonneau n’étoit point un héros, c’étoit un citoyen regardé généralement dans son pays, comme un avide spéculateur sur les subsistances publiques, ardent à déployer contre ses concitoyens une puissance terrible, que l’humanité, que la justice, et même la loi défendent d’exercer légèrement ; il fut coupable avant d’être victime ; et les maux de sa patrie et la violence que l’on reproche à ses compatriotes furent en grande partie son ouvrage ; et ces faits sont aujourd’hui le prétexe de la plus atroce comme de la plus arbitraire proscription… Hommes justes, écoutez seulement la voix des patriotes de cette contrée ? Lisez, entr’autres, une pétition présentée le 2 mai à l’assemblée nationale par des citoyens estimables de quarante communes voisines d’Étampes (1), qui n’ont d’autre intérêt dans cette affaire que celui de la vérité et de la justice, au nombre desquels est un curé vénérable dont vous serez forcés de respecter le courage et la vertu ; lisez, reconnoissez le langage de la raison, de la probité, et prononcez.

(1) J’ai cru devoir imprimer cette pétition singulièrement intéressante, presqu’en entier*, à la fin de cet ouvrage.

* La formule serait-elle de simple précaution, ou bien Robespierre ne fait-il allusion qu’aux signatures, lesquelles ne sont pas reproduites. En tout cas, un examen rapide ne m’a pas permis de distinguer des coupes par rapport à la version de la pétition publiée dans Buchez et Roux, t. XIV, pp. 270 et suiv.

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ESSAI SUR LA JUSTICE PRIMITIVE, par Pierre Dolivier (1793)

30 dimanche Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Documents»

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1793, Communisme, Jacques Roux, Jean-Jacques Rousseau, Maurice Dommanget, Pierre Dolivier, Robespierre

Pour cette présentation sommaire, je suivrai, pour l’essentiel, le texte que Maurice Dommanget a consacré à Pierre Dolivier et que l’on trouve dans le petit recueil publié aux éditions Spartacus : Enragés et curés rouges en 1793. Jacques Roux — Pierre Dolivier (présentation de Michel Vovelle, 1993, 13 €).

 Pierre Dolivier est né le 21 octobre 1746 à Neschers, près de Clermont-Ferrand. On ne sait rien de la formation qui le mène à la prêtrise et peu de choses de lui dans sa jeunesse. À cinquante-quatre ans, en 1798, il est décrit dans un document de l’administration municipale de Versailles, comme ayant « le visage ovale, le nez ordinaire, la bouche moyenne, le menton rond, les yeux bleus et les cheveux châtains ».

 C’est, semble-t-il, Jean Jaurès qui attire le premier, en 1902, dans le tome II de son Histoire socialiste de la Révolution française (La Législative), puis dans le tome VI (Le Gouvernement révolutionnaire) l’attention sur Dolivier, citant de longs passages de ses textes.

À propos de la Pétition de quarante citoyens des communes de Mauchamp, Saint-Sulpice-de-Favières (etc.), dont Dolivier est le rédacteur, Jaurès écrit :

 Quand Dolivier, parlant au nom des paysans et ouvriers de l’Ile-de-France, démontre que les plus pauvres sont les vrais interprètes, les vrais gardiens des Droits de l’Homme, parce qu’ils ne sont en effet que des hommes, et qu’en eux aucun privilège d’aucune sorte ne fait obstacle à l’humanité, il oriente la Déclaration des Droits de l’Homme vers la grande lumière socialiste qui n’a pas encore percé, qui se lèvera avec le babouvisme […].

Histoire socialiste de la Révolution française, t. II, p. 410 de l’édition revue et annotée par Albert Soboul aux Éditions sociales, 1970.

 Mentionnons également, pour ne jamais manquer de rappeler l’apport des historiens soviétiques délibérément non traduits en français par les historiens philosoviétiques français, deux textes plus tardifs de J. M. Zacher, le premier biographe des Enragés Roux et Varlet : P’er Doliv’e, Leningrad, 1925 et P’er Doliv’e nakanune i v nacale burzuaznoj revoljucii XVIII veka vo Francii, Moscou, 1938, pp. 149-175 [on excusera la transcription approximative de ce second titre russe].

 Dolivier n’est pas athée, comme son confrère Meslier, bien qu’il ne se réfère pas à une divinité dans le texte que l’on va lire, mais il fait connaître ses positions de son vivant, et de vive manière ! Invité par un curé voisin à prêcher pour l’installation d’un nouveau — et présumé rémunérateur — culte à « saint Clair », censé, par association d’idées, guérir les maladies des yeux, Dolivier prêche bien, mais contre le charlatanisme et le mercantilisme de l’Église. Son discours ne passe pas inaperçu : un synode diocésain rassemblant pas moins de 1 200 prêtres est réuni pour le juger, et le condamner.

 En 1790, Dolivier fait paraître le Vœu national ou Système politique propre à organiser la Nation dans toutes ses parties…, dans lequel, rapporte Dommanget, il « se prononce […] pour la forme républicaine », position peu commune à cette date.

 C’est en 1792, à l’occasion de « l’affaire Simoneau », qu’il rédige la pétition dont nous avons vu l’intérêt que Jaurès y porte. Simoneau, riche propriétaire d’une tannerie, et maire d’Étampes, fait proclamer la loi martiale pour réprimer une manifestation sur le marché aux grains. Il est assassiné. L’affaire divise jusqu’aux Jacobins, qui envoient une lettre « au fils de l’infortuné maire d’Étampes ». Robespierre, de son côté, publie la pétition et les notes de Dolivier dans le n° 4 de son Défenseur de la Constitution [voir par ailleurs le texte de Mathiez sur la position de Robespierre].

 Dolivier se marie le 21 octobre 1792, un an après l’abbé de Cournand (dont on peut lire sur ce blog De la propriété ou la cause du pauvre). Dommanget estime d’ailleurs que le premier prêtre marié n’est pas Cournand mais, Rémi Vinchoy, curé d’Herbise, district de Bar-sur-Aube, marié le 11 mai 1790.

Comme beaucoup de ses confrères, Dolivier fait de son mariage avec Marie Chosson, sa bonne, une cérémonie de propagande. Outre un cultivateur et un imprimeur, trois autres curés lui servent de témoins (Henri Salmon, curé de Champigny ; Pierre-François Lavau, curé de Chauffour ; Charles Ruffier, curé de Notre-Dame d’Auvers). Le discours qu’il prononce est envoyé aux Jacobins, à Paris, où il est lu en séance le 21 novembre 1792. Dolivier en profite pour reconnaître comme son fils Pierre Camille, né à Paris neuf mois plus tôt.

 Dommanget écrit, à propos de l’Essai sur la justice primitive, de juillet 1793 :

 La brochure de Dolivier se rattache à la série impressionnante des productions idéologiques suscitées par le grand débat sur la Constitution, que la nation française devait adopter. Ce débat fit entrer en lice sur le plan politique nombre de patriotes capables de tenir une plume et plus ou moins travaillés par des aspirations sociales. […] Il en fit hommage au conseil général du département de Seine-et-Oise, lequel le mentionna à son procès-verbal. La brochure fut aussi proposée à quelques sections de Paris et à des sociétés populaires, et son auteur eut la joie d’apprendre que des citoyens d’Auvers, district d’Etampes, réunis librement et spécialement se prononcèrent unanimement en faveur de son plan.

Le texte n’aura pas, néanmoins, le succès qu’escompte Dolivier, qui a prévu de publier une suite, comprenant un feuillet intercalaire qui rendrait compte des réflexions et suggestions des lecteurs. Ce supplément ne verra pas le jour.

 Bien qu’il paraisse s’être inspiré d’un titre de William Godwin de février 1793 (An Enquiry Concerning Political Justice ; Une enquête sur la justice politique), Dolivier ne se veut ni prédécesseurs ni inspirateurs. Il ne trouve d’ailleurs à citer que Jean-Jacques Rousseau et saint Jérôme.

 La doctrine  de Dolivier, qui affirme « Je ne suis point homme à merveilles », est en effet bien simple :

 1) les riches sont inutiles. Son propos a conservé une parfaite actualité :

 Cependant ces riches se croyent fort nécessaires aux malheureux ; et lorsqu’ils en occupent un grand nombre à leurs terres ou à leurs ateliers, ils disent, avec une sorte de jactance, qu’ils font vivre beaucoup de monde. Ils devroient dire plutôt qu’il leur faut beaucoup de monde pour les faire vivre dans leur opulent loisir.

2) la terre est à tout le monde. Elle ne peut être ni appropriée ni transmise en héritage. Cependant, une loi du 18 mars 1793 punit de la mort quiconque prône la « loi agraire ». Cet inconvénient contraint le curé de Mauchamp à quelques acrobaties pour distinguer, tant mal que bien, le « partage agraire » que les pauvres convoitent (ils ont tort !) et la propriété commune de la terre à laquelle les riches s’opposent (ils ont tort !).

 Le fond de la pensée de Dolivier n’échappera pas à Babeuf, qui l’a lu. Le comité babouviste compte même le prêtre parmi les députés de l’assemblée provisoire dont la réunion suivra la prise du pouvoir (Dolivier est pressenti pour représenter la Seine-Inférieure). Cet honneur, dont on ne sache pas qu’il en ait été informé, lui en vaudra un autre, heureusement non suivi d’effet : un mandat d’arrêt signé du Directoire en date du 24 floréal an IV (13 mai 1796).

Le 16 juin de la même année, Dolivier est nommé professeur d’histoire à l’École centrale de Versailles, poste qu’il occupera jusqu’en 1805, signe qu’il n’est poursuivi d’aucune vindicte officielle.

 Dommanget estime que Dolivier « n’a pas joué un rôle à sa taille », considération toujours problématique me semble-t-il.

Souhaitant « à des tems de perversité et d’horreur, [faire] succéder les beaux jours de l’âge d’or », Dolivier annonce peut-être autant, si l’on tient à lui attribuer une postérité, un christianisme social et les prêtres ouvriers qu’une doctrine « communiste ». Il n’en demeure pas moins que, comme un Jacques Roux, il s’est mêlé activement au courant de la révolution, et que ses textes ont été lus, appréciés, et certainement compris par des publics divers, depuis ses ouailles de Mauchamp jusqu’aux lecteurs du Défenseur de la Constitution de Robespierre. Lire la suite →

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Des femmes & de la Révolution française

22 samedi Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles»

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1793, Amazones, Claire Lacombe, Clubs de femmes, Enragé·e·s, Féminisme, Jean-Jacques Rousseau, Loges maçonniques, Olympe de Gouges, Prostitution, Républicaines révolutionnaires, Robespierre

Je donne une version de l’entretien avec Article 11 sur laquelle je m’étais arrêté avec J.-B. Bernard (l’« originale » de notre conversation est beaucoup trop longue et bien trop bavarde pour être publiée, sur papier ou ici).

Il semble qu’en faisant son travail de «rédac’ chef» (réagencement des paragraphes et insertion des questions), l’ami J.-B. a confondu plusieurs versions échangées ou perdu des corrections…

Si la version imprimée dans le n° 12 d’Article 11 ne trahit nullement ma pensée, elle diffère donc sur plusieurs points de celle donné ci-après (précision à l’intention des lecteurs et lectrices tenté(e)s par un « Jeu des 7 erreurs »).  Les «questions» sont ici remplacées par des intertitres. Lire la suite →

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«Ne dites plus “BNF”, dites “Crève salope” !» (Guy Debord)

21 vendredi Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Conditions matérielles de la recherche»

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«Conditions matérielles de la recherche», Vocabulaire

Les conditions matérielles de la recherche (3)

Je n’ai pas été à la BN depuis quelques jours (je ne parle pas ici de la « BnF » ; « BnF » est une marque commerciale). Ce vendredi 21 juin, je retiens par Internet, en fin de matinée, une place dans la salle K de Tolbiac et une demi-douzaine d’ouvrages. Je fais mes trois quarts d’heure de transports en commun, augmenté d’un long détour causé par les travaux décidés pour construire une nouvelle entrée dont il faut espérer qu’elle sera plus praticable que les actuels tapis roulants/montants imaginés par l’architecte (qui n’en voudrait pas chez lui). Une fois arrivé au vestiaire, une affichette manuscrite signale « Salles K et L fermées ». Je passe le détail du temps perdu à comprendre des informations contradictoires selon les sources. Résultat de ma course pour arriver à l’heure (les places et les documents sont retenus jusqu’à une heure fixe ; après il faut tout recommencer) : je n’ai pas de place et mes documents ne sont ni retenus ni possibles à (re)commander. De plus, l’accès aux usuels est impossible. Bien entendu, ça aurait écorché la gueule des sagouins de la direction d’avertir le lecteur qu’il est en train de perdre une demi-journée de travail(*). Il est préférable qu’il arrive furieux et retourne sa colère contre les grévistes. Car il s’agit d’une grève.

 Et lesdits grévistes sont trop timorés ou pas assez compétents en informatique pour interrompre ou/et pirater le site de la BN, ce qui avertirait au moins les lecteurs et lectrices de la situation. Je me renseigne donc auprès d’un charmant jeune homme et d’une sympathique syndiquée à SUD Culture. Un tract de l’Intersyndicale (outre SUD : CGT et FSU) est distribué. J’en donne le texte ci-après. Il en ressort, ce qui n’étonnera personne, que les conditions de travail des personnels et des lecteurs et lectrices sont appelées à se dégrader encore dans les temps qui viennent.

(*) Erreur ! me dit-on. L’information figurait sur le site Internet de la BN à la rubrique « actualités »… En voilà un joli foutage de gueule ! Je n’ai évidemment nul besoin de consulter ladite rubrique pour retenir place et documents, la preuve ! Quant à considérer que sa consultation systématique est désormais une précaution à prendre par les lecteurs avant toute réservation — outre qu’il faudrait qu’il en fussent informés ailleurs que dans ladite rubrique — c’est assez dire l’idée que se fait la direction de la BN du climat social qu’elle a elle-même créé !

AUX LECTEURS

Mobilisons-nous ensemble pour défendre la BnF !

Aujourd’hui, vendredi 21 juin 2013, les agents de la BnF sont en grève afin de dénoncer la réduction des budgets et des effectifs, ainsi que les graves conséquences que cela a sur le fonctionnement de la bibliothèque et ses missions.

Les budgets : la diminution historique du budget de la culture se traduit pour notre établissement par une baisse de subvention de 5,4 Md€ pour l’année 2013, plus un surgel de crédits. Sur les trois prochaines années, 11 millions d’économies sont à rechercher amenant les subventions dédiées à notre établissement à un niveau à la baisse jamais atteint.

Les effectifs : malheureusement, la politique conduite par le précédent gouvernement se poursuit avec une suppression pour l’année 2013 de 59 emplois portant à plus de 260 le nombre de postes supprimés en quelques années. Dans le même temps, les contrats précaires de courtes durées se multiplient.

Tout cela a des conséquences graves sur l’accomplissement de nos missions et sur les services offerts aux usagers :

— Une baisse des budgets d’acquisition de – 25 % en 3 ans qui provoque un abaissement de l’offre documentaire

— Des budgets de conservation en forte diminution qui ne permettent plus d’assurer une politique de conservation digne d’une bibliothèque nationale

— Des mesures drastiques touchant les conditions d’accès faute de personnels suffisants : ouverture réduite du Haut de jardin en été de 13h à 19h du mardi au samedi, fermeture le dimanche et communication directe réduite en Rez-de-Jardin de l0h à 16h et le samedi jusqu’à 13h

— Fermeture du vestiaire du hall Ouest, remplacé par des consignes automatiques

— Réduction du personnel présent en pied-de-tour pour l’accès au Rez-de-Jardin.

Des projets contestés qui portent préjudice aux missions de service public de l’établissement :

— L’occupation d’espaces de la BnF au bénéfice de la société MK2 censée rapporter une redevance ridiculement faible eu égard au sacrifice consenti

— La signature de deux accords de numérisation des collections de la BnF conclus avec des partenaires privés concernant 70 000 livres anciens et 200 000 disques : des collections tombées dans le domaine public mais dont l’accès distant sera payant et permettra à ces sociétés privées de dégager des bénéfices avec la commercialisation de collections publiques.

— La cession de l’immeuble Louvois, site du Département de la musique faute de budgets suffisants pour sa réhabilitation

C’est inacceptable. Ensemble, exigeons des moyens financiers et en personnel à la hauteur des besoins pour accomplir pleinement les missions de la BnF. Venez nous soutenir. Signez la pétition.

______________________

Debordiana

 Une amie qui lit par-dessus mon épaule me dit « Ah tu fais un papier sur l’expo Debord ! »

Une exposition Debord à la Bibliothèque nationale ! Sans charre !? Moi, la BN, quand j’y viens, c’est pour travailler ; quand j’ai fini, j’ai hâte de rentrer chez moi…

— Ben oui, ils exposent ses fiches de lecture, les bouts de papier où il notait une citation pour plus tard…

La honte ! C’est vrai qu’ils l’avaient déjà momifié « Trésor national », un truc à couvrir de ridicule une vie entière consacrée à la subversion. Notez que ça vous a un air des îles, « Fête Nat’ », tout ça… En fait, je l’avoue : c’est la jalousie qui me fait parler, moi qui  n’ai jamais pu obtenir de ma copine qu’elle m’appelle « mon trésor ».

Tout de même, maintenant, je mets de côté les listes des commissions dans une boîte à chaussures. On ne sait jamais…

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« Sexes en révolution », livraison de la revue Orages

19 mercredi Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Bibliothèque»

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Féminisme, Prostitution

Orages (Littérature et culture 1760-1830), n° 12, mars 2013, « Sexes en révolution », sous la direction de Florence Lotterie et Pierre Frantz (24 €).

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 Je signale ici la parution du n° de la revue Orages autour du thème « Sexes en révolution », pour les articles qui ont particulièrement retenu mon attention. On se reportera, pour consulter le sommaire complet et des articles des numéros précédents mis en ligne, au site de la revue.

 

Clyde Plumauzille, « L’appel à la justice des femmes enfermées pour prostitution sous la “Terreur” : entre “vie fragile” et puissance d’agir », pp. 111-129.

 L’auteure étudie des lettres adressées aux autorités par de jeunes femmes, détenues en tant que « prostituées », en 1794 et 1795.

La plupart d’entre elles sont incarcérées sans jugement, et sans savoir quand leur affaire sera examinée et par qui, ce qui évidemment est l’un des motifs de leurs protestations. Les arrestations relèvent de l’arbitraire policier, lui-même étayé sur un ensemble de considérations morales et d’habitudes «géopolicières» (zone des Halles suspecte, par ex.) sur ce qui est supposé caractériser une femmes aux mauvaises mœurs.

La Révolution a crée une situation paradoxale, que nous pouvons reconnaître nôtre aujourd’hui : la prostitution n’est pas interdite, seul, en principe, le racolage est un délit susceptible de déclencher l’intervention policière. La pratique répressive contre une sexualité jugée illégitime à défaut d’être illégale, semble beaucoup plus large puisqu’une femme se plaint d’être détenue « sur un simple souper » en masculine compagnie.

 Ainsi que le souligne Clyde Plumauzille :

 Les mots de ces femmes permettent de saisir le caractère problématique de la définition même de la prostitution. Elle amalgame un ensemble de comportements de classe et de sexe dénoncés comme déviants et dépassant le simple échange économico-sexuel négocié entre deux individus. Ce qui définit la relation prostitutionnelle est ainsi moins la prestation que la forme qu’elle prend dans le contexte culturel dont il est question, à savoir un usage incorrect de la sexualité, “hors et à l’encontre des structures de l’échange des femmes” [expression de Paola Tabet]. Ici c’est l’autonomie de ces femmes du peuple dans l’espace public qu’elles arpentent, leur “sexualité vagabonde” [expression d’Alain Corbin] monnayée ou non, qui constituent une transgression à la sphère domestique vertueuse idéalisée par les révolutionnaires. […]

Treize de ces femmes interpellent par ailleurs les pouvoirs publics en tant que leur “concitoyenne” : la performativité de cette formule a pour effet de les maintenir dans la société des citoyens à laquelle elles appartiennent et d’abolir virtuellement leur exclusion.

On voit que ces jeunes femmes, dont une douzaine déclarent un état, c’est-à-dire un métier — trois blanchisseuses, deux couturières, une ouvrière en linge, une culottière, deux marchandes de comestibles et une terrassière —, usent des mêmes procédés rhétoriques que les militantes, auteures de pétitions ou sociétaires du club des Républicaines révolutionnaires.

 

Je signale plus rapidement un article de Françoise Le Borgne, intitulé « Le travestissement féminin dans le théâtre de la Révolution et de l’Empire (1793-1807) », pp. 69-86.

 Extrait de la conclusion :

 Les dramaturges, dans un contexte où l’exaltation révolutionnaire de l’énergie féminine retombe et fait place à une assignation réitérée des femmes à la seule sphère domestique, ont soin de faire  de leurs pièces le relais du “conjugalisme” ambiant. Néanmoins, ils ne renoncent pas pour autant au potentiel dramatique et érotique du travestissement, bien au contraire.

Statut : J’ai acheté cette revue en librairie.

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“Citoyennes. Women and the Ideal of Citizenship” ~ un livre d’Annie K. Smart

17 lundi Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Bibliothèque»

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Annie K. Smart, Claire Lacombe, Clubs de femmes, Féminisme, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires

Annie K. Smart, Citoyennes. Women and the Ideal of Citizenship in Eighteenth-Century France [Citoyennes. Les Femmes et l’idéal de citoyenneté dans la France du dix-huitième siècle], University of Delaware Press, 259 p., 2011.

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Recueil de textes, dont certains ont fait l’objet de communications lors de journées d’études, l’ouvrage d’Annie K. Smart est composé de six chapitres :

Chap. 1 « En relisant l’Émile de Rousseau »

Chap. 2 « Concevoir un nouveau corps politique : la maternité civique dans L’An 2440 de Louis-Sébastien Mercier »

Chap. 3 « L’éducation des femmes : la vertu civique dans Adèle et Théodore de Félicité de Genlis »

Chap. 4 « Parler en tant que Citoyenne : la voix féminine civique d’Olympe de Gouge »

Chap. 5 « Représenter la Républicaine : art et politique de genre jacobine dans la Révolution française »

Chap. 6 « La mise en scène de la Citoyenne dans le théâtre révolutionnaire français, l’an II de la République »

Maîtresse de conférences en études françaises à l’Université de Saint Louis (Missouri), Annie K. Smart annonce d’emblée qu’elle n’offre pas « un livre d’histoire sociale qui étudie les actions des femmes réelles », mais qui ressortit (c’est moi qui l’ajoute) à ce qu’il est convenu de nommer cultural studies.

Je retiendrai ici les principaux thèmes qui recoupent mes propres recherches, en signalant que le soin mis par l’auteure à se situer par rapport aux autres auteur(e)s, de langue anglaise essentiellement, fait de nombreux passages d’utiles mémentos.

C’est ainsi que, contre Carole Pateman et Joan Landes, A. K. Smart considère que si on élargit la définition de la citoyenneté au fait « d’agir pour le bien public », alors les femmes étaient présentées durant la Révolution comme étant des citoyennes (p. 9).

S’appuyant sur l’étude des œuvres de David comme des gouaches des frères Lesueur, Smart affirme : « Si les recherches archivistiques récentes ont montré que les femmes ont agi en tant que citoyennes, mon objectif dans ce chapitre [chap. 5] est de montrer que les femmes ont été également représentées comme des individualités civiques. »

L’étude (chap. 6) de trois vaudevilles (L’Intérieur d’un ménage républicain, d’Armand-M.-J. de Chastenet ; La Discipline républicaine, d’Aristide Plancher de Valcour ; Les Épreuves du Républicain, ou l’amour de la patrie, de Marie Lugier) lui permet d’affirmer que les citoyennes n’y sont pas passives. Au contraire, « elles ont beaucoup à dire, et pas seulement à propos de la famille, des affaires domestiques ou des subsistances ». De plus, elles sont représentées comme des « défenseures de la République ».

L’une des positions réitérées au long de l’ouvrage — position que je partage — concerne l’importance du foyer domestique comme « siège à la fois de vertus domestiques et civiques ». Le foyer est certes le lieu de la vie de famille, mais aussi lieu de production des idées publiques (chap. 6), conception qui trouve origine partielle et confirmation chez Rousseau lui-même.

En effet, avec ou sans intentions cachées de renvoyer les femmes chez elles, les révolutionnaires mâles insistent sans cesse non seulement sur le rôle d’éducatrice de la femme/mère mais aussi sur sa bienfaisante influence sur son mari.

J’ajoute pour ma part que ce programmatisme domestique s’énonce — c’est au moins l’impression ressentie à la lecture d’innombrables déclarations — comme une volonté de contrôle. Le foyer domestique est certes un lieu de production politique, mais en tant que tel c’est une maison de verre, où les gestes et dits féminins sont prévus, prescrits et contrôlables. C’est d’ailleurs un argument supplémentaire pour renoncer à une opposition tranchée entre « espace public » et « espace privé » inspirée d’Habermas.

Pour ce qui concerne la décision d’interdire les clubs de femmes à la fin 1793, Smart considère « que la décision […] procède davantage de la tentative du principal parti de consolider son pouvoir que de sa misogynie constitutive. » (p. 166) L’intérêt de cette position est de s’articuler de manière cohérente avec les conclusions évoquées plus haut : militantisme des femmes, leur représentation comme citoyennes, et de s’opposer à la vision (peut-être envisagée de manière trop littérale) d’une Carole Pateman selon laquelle la Révolution s’est faite et la République constituée « contre les femmes ». Cependant, l’articulation entre l’opportunité politique et l’incontestable et agressive misogynie de certains Jacobins mérite d’être analysée plus finement, ce à quoi je m’essayerai dans mon travail en préparation.

Dans le même ordre d’idées, Smart cite Suzanne Desan pour insister, après d’autres, sur le paradoxe d’un pouvoir révolutionnaire interdisant la Société des citoyennes républicaines révolutionnaires amenée par Claire Lacombe et Pauline Léon dans la mouvance Enragée, et très vite tous les clubs de femmes, dans le même moment où il donne de nouveaux droits aux femmes, une nouvelle existence civile même, en matière d’héritage notamment. Sur ce point, il convient de se reporter aux textes classiques d’Élisabeth Guibert-Sledziewski : « Naissance de la femme civile. La Révolution, la femme, le droit (La Pensée, n° 238, mars-avril 1984, pp. 34-48), et « Une idée neuve de la femme », postface à l’ouvrage d’Annette Rosa, Citoyennes. Les femmes et la Révolution française, 1988, pp. 236-251.

Rédigé dans un langage clair, tout sauf « universitaire » au sens péjoratif, le texte d’Annie K. Smart est d’une lecture aisée y compris pour un lectorat non anglophone, d’autant que les nombreuses citations des textes français apparaissent d’abord dans leur langue originale avant d’être traduites en anglais.

Statut : Cadeau d’anniversaire à moi offert par une personne chère à mon cœur.

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«Discours sur le jugement de Louis-le-dernier…», par Jacques Roux (1792)

16 dimanche Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Documents»

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Albert Soboul, Démocratie directe, Jacques Roux, Raymonde Monnier, Robespierre, Walter Markov

Je reproduis ce texte de Jacques Roux d’après la version en ligne sur Gallica (en mode image). Il est évidemment donné par Walter Markov dans son recueil complet Jacques Roux. Scripta et Acta (1969 ; n° 6, pp. 79-86). La version de Markov diffère sur d’infimes détails (indiqués entre crochets ci-dessous). C’est, chronologiquement, le quatrième discours parisien prononcé par Roux, électeur de la section des Gravilliers et membre du Conseil général provisoire de la Commune. Il est prononcé lors de l’assemblée générale de la section de l’Observatoire, section populaire du sud de Paris, le 1er décembre 1792, avec un grand succès puisque l’impression, sous la forme d’une brochure de 16 p. (dont il existe deux versions) et la lecture deux fois par semaine pendant un mois sont décidées, afin que nul n’en ignore.

 Roux y dénonce déjà les accapareurs, comme le (long) titre du discours l’annonce, soit ceux « qui s’approprient les produits de la terre et de l’industrie, qui entassent dans les greniers de l’avarice les denrées de première nécessité, et qui soumettent à des calculs usuraires les larmes et l’appauvrissement du peuple ».

Il estime inévitable et salutaire l’ « effusion légale » du sang du dernier des rois, dont il ne suffit apparemment pas qu’il soit dégringolé d’un statut de droit divin jusqu’à celui de « premier fonctionnaire publique ». Encore trop monarque, ce fonctionnaire là ne peut être révoqué que par la guillotine.

Mais le roi n’est pas le seul ennemi et Jacques Roux souligne que, « sous le gouvernement de plusieurs », le despotisme n’est que plus sournois et partant dangereux : « Le despotisme sénatorial est aussi terrible que le sceptre des rois, puisqu’il tend à enchaîner le peuple, sans qu’il s’en doute, puisqu’il se trouve avili et subjugué par les loix qu’il est censé dicter lui-même. »

Quant aux « ennemis les plus dangéreux » ce sont les prêtres, ces « tigres cachés sous le masque et le manteau de la religion ». Ici Roux tient à se démarquer d’un groupe professionnel auquel il appartient, état qu’un Robespierre ne manquera pas d’utiliser contre lui.

DISCOURS sur le jugement de Louis-le-dernier, sur la poursuite des agioteurs, des accapareurs et des traîtres

 

Prononcé dans l’Assemblée Générale de la Section de l’Observatoire, le jour de sa translation dans la ci-devant Église des Ursulines, par JACQUES ROUX, Électeur de la Section des Gravilliers, membre du Conseil Général provisoire de la Commune, et de la Société des Droits de l’Homme et du Citoyen, imprimé et envoyé d’après l’arrêté de l’Assemblée Générale, aux 47 Sections, à la Commune de Paris, à l’Assemblée Électorale, aux Sociétés des Amis de la Liberté et de l’Egalite, des Droits de l’Homme et du Citoyen, et à toutes les Sociétés Populaires.

 

CITOYENS RÉPUBLICAINS.

Si le despotisme et l’hipocrisie décernoient autrefois des couronnes civiques aux tigres royaux qui dévoroient les peuples ; si le crime et orgueil élevoient des pyramides en l’honneur des tyrans qui fondoient des bastilles, qui propageoient l’empire du fanatisme et de la stupidité ; à quelle gloire n’ont pas lieu de prétendre les citoyens qui s’assemblent pour défendre les droits du peuple, éclairer et rendre heureuse l’humanité ?

Mais, je ne m’arrêterai pas à prodiguer de vains et de stériles éloges. Les belles actions sont les véritables richesses. Le patriotisme vous applaudira, et déjà la liberté qui fixe ses regards sur le nouveau local où vous tenez vos séances, pour le prix du zèle qui vous dévore, vous a mis au rang de ses enfans. Ce titre flatteur est l’hommage le plus pur, le plus solennel, le plus fait pour parler au cœur des hommes qui se consacrent, sans réserve, au bonheur de leur pays, qui n’ont d’autre ambition que de se rendre utiles par l’éclat des talents, et par l’ascendant des vertus.

Quelle est donc grande, citoyens, quelle est donc noble la carrière que vous allez parcourir ! Discuter les loix, répandre la lumière sur celles qui sont déjà faites, surveiller les fonctionnaires publics, dénoncer les traîtres et les conspirateurs, poursuivre le crime jusque dans son dernier retranchement, étendre le feu sacré de la patrie, de la liberté et de l’indépendance, défendre la cause de l’innocent opprimé, assister l’indigent, visiter les peuples assis dans l’ombre de la nuit et de l’esclavage, perfectionner, en un mot, la raison humaine, faire de dignes choix des magistrats, étendre l’empire des mœurs, inspirer l’amour des vertus publiques : telles sont les fonctions importantes auxquelles vous allez vous livrer. Voilà les devoirs honorables et pénibles que vous allez épouser.

Mais des Républicains ne seront pas effrayés des obstacles inséparables d’une si auguste mission : que la calomnie s’attache à leurs pas, qu’ils soient placés sous les poignards, qu’ils soient avilis, si l’homme de bien pouvoit l’être, par d’insolens démagogues dont tout le talent est de faire des placards, de dominer par l’intrigue, la terreur et la corruption, qu’ils soient exposés à la haine, à la jalousie, à toutes les passions des petits factieux pour qui les vertus des hommes à grand caractère sont des crimes ; rien, j’ose le présumer de votre courage, ne sera capable d’amollir votre âme, et d’arrêter le cours de votre sainte doctrine. Vous opposerez au fer des assassins, aux armes familières, aux brigands et aux lâches, les vertus d’un Républicain, et les principes de la justice éternelle. Si les traîtres ne pâlissoient pas à l’aspect de la déclaration des droits sacrés de l’homme, qui a jetté des laves enflammées sur le trône des rois, qu’ils soient frappés par le glaive de la loi, de cette loi suprême qui est le salut du peuple.

Ce n’est, citoyens, que par des mesures promptes et sévères, ce n’est qu’en vous tenant continuellement debout, que vous vous élèverez à la hauteur de vos destinées… Eh ! quoi ! balanceriez-vous de faire éclatter la foudre de la liberté, lorsqu’au sein du sénat Français la vertu est à peine en sûreté, lorsqu’une faction perfide prépare des coups mortels à la liberté publique, lorsque les défenseurs incorruptibles du peuple sont obligés de garder le silence, lorsque des législateurs impies s’entourent d’une force armée, pour tenir, sans doute, impunément des lits de justice, et pour absoudre Louis XVI, le bourreau des Français.

Cependant, les Romains, nos modèles en fait de révolution, n’hésitèrent pas de faire un exemple terrible sur les sénateurs qui avaient usurpé les deux pouvoirs. Manlius qui brava au milieu d’une force armée la puissance publique, fut massacré… Les chefs du peuple, après l’abolition de la royauté, étant devenus plus impérieux, plus insolents, furent frappés de mort. Les Athéniens ne firent pas de grâce aux trente administrateurs qui leur forgeoient des fers. Le despotisme, en effet, qui se propage sous le gouvernement de plusieurs, le despotisme sénatorial est aussi terrible que le sceptre des rois, puisqu’il tend à enchaîner le peuple, sans qu’il s’en doute, puisqu’il se trouve avili et subjugué par les loix qu’il est censé dicter lui-même.

Mais, Citoyens, vous n’aurez pas secoué le joug de la race des Bourbons, vous ne vous serez pas soustraits à l’humiliante domination des rois, pour plier sous le joug des agens prévaricateurs. Après avoir franchi irrévocablement l’intervalle immense de l’esclave à l’homme, vous ne souffrirez pas que vos mandataires portent la moindre atteinte à la légitimité de vos droits ; qu’ils s’écartent de l’opinion publique, qui seule dicte des loix, et qui est toujours droite et toute-puissante ; que pour leur confection ils emploient d’autre force que celle des génies bienfaisans. L’exercice de la souveraineté n’étant délégué que pour l’avantage de celui qui s’en dépouille, vous ne souffrirez pas que des mandataires profondément corrompus, puisent ailleurs que dans les principes de la philosophie éternelle, les bases de la prospérité publique ; qu’ils oublient, un seul instant, que leur devoir est de consulter les vœux du peuple, de lui rester fidelle et de le sauver. La loi ne doit fixer nos hommages que lorsqu’elle ne contient pas de moyens d’oppression ; le précepte d’amour et de reconnoissance envers ceux qui nous la donnent, n’est plus obligatoire, lorsqu’ils creusent le tombeau de l’esclavage, et plongent la Nation dans un abyme de vice et de malheur.

Ah ! Citoyens, si dans l’Assemblée constituante, dont la grande majorité corrompue par l’or de la liste civile, avoit rétabli le despotisme sous le nom de Monarque ; si dans le corps législatif qui s’étoit agenouillé en esclave devant la cour, & qui avoit absous un dictateur insolent, coupable du crime de lèze-nation, vous eussiez constamment déployé un courage égal à la vertu, si vous eussiez répudié ce code barbare fait par des scélérats, proclamé sous le drapeau de la loi martiale, vous ne seriez pas réduits à lutter contre d’orgueilleux tyrans, et de farouches satellites. La bannière de la Déclaration des droits de l’homme n’auroit pas été insultée. Vous ne seriez pas affamé[s], ruiné[s], désespéré[s], empoisonné[s] par des reptiles venimeux, des spéculateurs parasites, par des vampires, qui, par une combinaison meurtrière du monopole, s’emparent du commerce des comestibles, dévorent les propriétés, les manufactures, la liberté, et nous font arriver, par des trafics usuraires, au port de la contre-révolution.

Le salut de la patrie, le sentiment de vos devoirs, la solennité de vos serments vous imposent donc l’obligation sacrée de vous raidir, sans relâche, contre les fourbes, les hypocrites, les méchants qui abusent de l’autorité dont ils sont investis pour vous forger de nouveaux fers ; contre les méchants qui, la liberté sur les lèvres, mais l’esclavage dans le cœur, boivent goutte à goutte le sang des citoyens ; contre les mandataires lâches et pervers, qui sollicitent l’indulgence et la générosité de la nation envers un tyran constitutionnel digne de tous les supplices, puisqu’il donna le signal de massacrer le peuple.

C’est à l’approche de ce jugement qui va fixer la destinée suprême de tous les peuples, que vous devez vous montrer grands, fiers, inexorables et terribles, en déclarant une guerre implacable, non seulement aux accapareurs et aux agioteurs, à tous ceux qui, par le commerce de l’argent, discréditent nos assignats, et portent les denrées de première nécessité à un prix excessif ; mais en demandant que la tête de l’assassin des Français tombe, au plutôt, sous le glaive de la loi … il est temps d’apprendre aux peuples de la terre que les Nations ne sont plus la propriété des rois, que la vertu seule rend l’homme inviolable, et que le crime conduit les tyrans à l’échafaud. La liberté ne sera jamais qu’un vain fantôme, lorsque vous ne ferez pas éclater la foudre de l’égalité sur un monstre détrôné, qui est le point de ralliement des contre-révolutionnaires, qui, dans la prison conspire encore contre la liberté publique. Les rois sont dignes de mort, du moment qu’ils voient le jour. Quelle peine ne subira pas celui qui a surpassé en scélératesse les Médicis et les Nérons, à en juger par les massacres de Nancy, de Montauban, de Nismes, des Colonies, de la Chapelle, du Champ-de-Mars ; à en juger par le sang qui a coulé par le fer des satellites de François II, par les cris des victimes qui, du fond de leur tombe, demandent la tête de leur bourreau commun ?

Il ne fallut chez les Romains, pour frapper un traître, que la liberté de la République : chez le Français régénéré, chez le Français le plus libre de tous les peuples, le tyran ne doit pas survivre à la tyrannie. Il faut écraser, sans pitié, l’hydre qui nous dévore ; et les rois ne doivent désormais exister que dans l’histoire qui retrace leurs forfaits.

Recueillons donc tout ce qui est de force et de faculté en nous, pour dire à nos mandataires, que s’ils ne sont pas des esclaves, des stupides adorateurs des crimes d’un monstre roi, s’ils n’ont pas reçu à l’avance un or corrupteur pour l’absoudre, qu’ils se hâtent de prononcer la mort du traître et du parjure Louis. Disons-leur, que si les constituants, leurs prédécesseurs, dans la bassesse de leur admiration, osèrent proclamer un monarque inviolable, le peuple incorruptible ne reconnut de sacré que la vertu ; et que le sceptre et la couronne ne donnèrent jamais le droit de faire massacrer les peuples. Disons-leur, que s’ils invoquent une constitution où le mensonge composa avec la vérité, où les droits sacrés de la Nation furent sacrifiés à l’ambition d’un seul homme, pour arracher à l’échafaud celui à qui le ciel refuse la lumière, et que la terre ne supporte plus qu’à regret : disons-leur que le peuple est debout ; que s’ils ne frappent pas un tyran au milieu de ses forfaits, la nation souveraine les citera devant son tribunal suprême. Le peuple, en effet, ne délègue pas l’exercice de sa puissance pour éponger les crimes des Rois. La tête de Louis tombera, où nous nous ensevelirons sur les débris de la République. Les Rois cimentèrent le despotisme par l’effusion injuste du sang des peuples ; il est temps que la liberté des peuples soit consolidée par l’effusion du sang impur des rois. L’Angleterre ne balança pas de conduire Charles Stouart à l’échafaud. Rome frappa de la hache des consuls les fils même de Brutus. Des prêtres et des évêques citèrent devant leurs tribunaux, et déposèrent le descendant de Charlemagne, comme ils avoient déposé le descendant de Clovis ; et, la Nation française, promenant ses regards sur les rives ravagées de la Meuse et de la Mozelle, sur des monceaux de cadavres, sur des villes réduites en cendres, la Nation française entendant de toute part les cris des pères, des mères, des enfans noyés de larmes, ne prendroit pas, dans la trempe du malheur, une fermeté qui étonne, en jugeant un roi qui a été pris les armes à la main, et que chaque citoyen avait droit de massacrer dans la journée du 10 août.

Le seul moyen, cependant, d’étouffer les conspirations, d’en imposer aux traîtres, aux tyrans subalternes, c’est d’ôter la clef de la voûte de la contre-révolution, en frappant du glaive de la loi le premier fonctionnaire publique. La sévérité et la justice sont les vertus principales d’un Républicain. Pour ne pas gémir sous le sceptre sénatorial, pour ne pas se laisser museler par des mandataires prévaricateurs, poursuivez les scélérats sous la pourpre royale ; faites procès à Antoinette ; que les législateurs, les juges, les commandans, les officiers publiques [sic] qui ont serré la main du peuple, et reçu les assignats de la Cour, soient conduis, avec pompe, au supplice. Le salut du peuple est la suprême loi : la résistance à l’oppression est le plus saint des devoirs. Citoyens, vous n’êtes pas dignes de la liberté, lorsque vous ne foulerez pas sous vos pieds les monstres qui ont formé le projet d’égorger la moitié de la Nation, et d’enchaîner l’autre.

Après ces réflexions que me suggère mon dévouement à la chose publique, purgeons la terre des monstres qui la souillent ! Le modérantisme perd la chose publique, il creuse pas à pas le tombeau de l’esclavage* [sic] ; et, c’est en temporisant, que la Hollande perdit la liberté. Au reste, lorsque des mandataires profondément corrompus ne s’empressent pas de sauver la République, la Nation doit se sauver elle-même… Qui ne repousseroit pas la tyrannie, lorsque les enfants de la patrie sont massacrés au-dehors, lorsqu’au-dedans ils sont assiégés par la famine et la misère ; lorsque les loix ne répriment pas le brigandage des accapareurs et des monopoleurs ? Certes, il y a de la lâcheté à tolérer ceux qui s’approprient les produits de la terre et de l’industrie, qui entassent dans les greniers de l’avarice les denrées de première nécessité, et qui soumettent à des calculs usuraires les larmes et l’appauvrissement du peuple.

Il est encore de mauvais citoyens, sur lesquels il n’est pas moins essentiel d’appeler la sévérité de votre justice ; j’entends parler des serpents qui sont dans votre sein. Car les ennemis les plus redoutables ne sont pas ceux du dehors ; la bannière de la déclaration des droits de l’homme n’a eu qu’à paraître, le houlan farouche, et l’authomate Prussien ont fuit comme l’ombre devant les couleurs nationales. La liberté fera la conquête du monde, et déjà nous ne trouvons d’esclaves que dans les palais des rois. Mais les ennemis les plus dangéreux sont les tigres cachés sous le masque et le manteau de la religion, qui s’attendrissent sur le sort des traîtres et des parjures, et qui ne versent jamais une larme sur l’humanité expirante sous le couteau de la tyrannie ; ces hommes mielleux, qui en parlant de liberté qui expire toujours sur leurs lèvres, aiguisent les poignards, et préparent, en secret, la honte du nom Français ; ces lâches adulateurs qui caressent le crime, et tuent la vertu, qui endorment la nation afin qu’elle se réveille enchaînée ; ces modérés, enfin, qui joignant la férocité des tyrans à la bassesse des esclaves, détournent habilement le glaive de la loi de la tête des grands coupables pour le laisser tomber sur la foiblesse et l’innocence ; intimident, calomnient et dégradent le peuple, afin de le corrompre et le mieux dépouiller.

Voilà, citoyens, ce que mon amour pour la liberté m’inspire de vous dire. Je suis prêt à répandre jusques à la dernière goutte de mon sang pour défendre les principes que j’ai développés dans cette Assemblée. Puisse cette enceinte ne retentir désormais que des vérités de cette importance ! Puissiez-vous ne vous occuper, dans le sein du calme et de la paix, que des moyens de rendre le sort du peuple doux !… l’obéissance à la loi, le respect pour les autorités constituées, est le premier de nos devoirs. Mais en protégeant les propriétés et les personnes, je ne serai pas assez fanatique pour défendre celle des tigres, des brigands et des accapareurs. Cette opinion paroîtra [« doit paraître », dans la version W. M.] dure aux Citoyens dont le cœur ne bat pas pour la liberté ; mais il n’est pas en mon pouvoir de composer avec les principes de la justice. Celui qui n’a pas le courage de dire la vérité aux hommes qui sont indignes de l’entendre, n’est pas digne de défendre la cause du peuple. Comme je ne prétends à d’autre gloire qu’à celle de sauver la patrie, je braverai la mort pour dénoncer les abus en tout genre. Le courage et la vertu vangent l’homme libre des poursuites des méchants. L’estime de l’homme de bien, la calomnie des traîtres seront, en tout temps, ma liste civile.

EXTRAIT Du registre des délibérations de l’Assemblée Générale de la Section de l’Observatoire, du Samedi, premier Décembre 1792, premier de la République Française.

APPERT, après avoir entendu le Discours du Citoyen JACQUES ROUX, l’impression a été arrêtée à la pluralité des voix, ainsi que l’envoi au Corps Électoral, aux 47 autres Sections, aux  Sociétés Patriotiques et aux Municipalités du Département.

Plus, il a été arrêté que lecture en seroit faite deux fois par semaine pendant un mois.

Pour copie conforme, DUPOUX**, Président. DROUET***, Secrétaire.

_________________________

* Maladresse de Roux ou erreur de transcription, la formule est incohérente avec le sens politique général de la phrase.

** Dupoux ne figure pas dans le Répertoire du personnel sectionnaire parisien en l’an II, d’Albert Soboul et Raymonde Monnier (1985).

***Drouet ou Petit-Drouet, en revanche s’y trouve (p. 508). Drouet, Toussaint, Théodore, est graveur en taille douce, domicilié place de l’Estrapade. Surveillé fort longtemps par la police, il sera banni de Paris début décembre 1800 par celle du Consulat.

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Hommage à Clément Méric

06 jeudi Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles», «La parole à…»

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Daniel Guérin, Lutte des classes, Robespierre

Méric Blog

Je donne ici, en hommage à Clément Méric, jeune militant libertaire et antifasciste, assassiné à Paris le 5 juin 2013 par des néo-nazis, des extraits d’un article paru sur le blog « Pensée radicale en construction ». L’auteur de l’article avait rencontré Clément dans le cadre d’une recherche sociologique sur les étudiants de Sciences Po.

La vision de l’histoire de Clément Méric se focalisait essentiellement sur des dynamiques profondes, en termes de rapports de classes et de capitalisme. La Révolution française, par exemple, est pour lui une révolution bourgeoise (y compris dans sa phase robespierriste), freinée par un important mouvement prolétarien en gestation, finalement écrasé. La répression du mouvement prolétarien aurait débouché ensuite sur l’hégémonie de classe de la bourgeoisie et sur la mise en place de la société industrielle-capitaliste en France.

La vision de l’histoire de Clément Méric s’inspire de celle de son maître à penser dans ce domaine, Daniel Guérin, figure de proue de l’anarcho-communisme marxien. Il venait d’ailleurs de finir La Révolution et nous du même auteur au moment de notre entretien. Un courant auquel se rattache sans aucun doute Clément Méric, ancien militant anarcho-syndicaliste à Brest (CNT), qui manie des concepts anarchistes comme des concepts marxiens (« bourgeoisie », « rapports de classe ») tout en restant profondément anarchiste. Les lectures de Clément Méric, d’un abrégé du Capital de Marx à Daniel Guérin en passant par Orwell, témoignent de son rattachement au courant anarchiste marxien. […]

Clément Méric explique qu’en dépit d’une certaine tolérance libérale, Sciences Po formate quand même ses étudiants. Il prend l’exemple de l’histoire de l’épisode révolutionnaire de 1789-1795 en 1 ere année, et explique qu’elle n’est “pas du tout impartiale”, puisqu’il n’y a “rien sur les sans-culottes et les mouvements populaires, à peine deux mots sur l’an II et l’an III, et pas un mot critique sur Napoléon”. Pour Jean-François Chanet*, Robespierre, “c’est ce qu’il y a de plus à gauche. Il ne dit rien sur les mouvements de gauche pré-prolétariens”.

 * Professeur d’histoire contemporaine à Science Po.

Couv Guérin Révo & nous

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Un portrait de Claire Lacombe ?

02 dimanche Juin 2013

Posted by Claude Guillon in «Articles»

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1793, Claire Lacombe, Enragé·e·s, Olympe de Gouges, Républicaines révolutionnaires

Depuis plusieurs années (au moins depuis 2008), un portrait de femme, daté du XVIIIe siècle, circule sur Internet, avec la mention « Portrait de Claire Lacombe », parfois accompagné des mentions suivantes « Ducare, 1792 ». On trouve également la mention « Portrait de Rose Lacombe », voire « de Rose-Claire Lacombe » (sur la question du prénom, voir ci-après). À ma connaissance, le seul ouvrage à ce jour où se trouve reproduit ledit portrait est un livre de vulgarisation intitulé La longue Marche des femmes. Des citoyennes aux suffragistes 1789-1920 (Annelise Carbonnier, Michel Toulet, Jean-Michel Lecat, Éditions Phébus, 2008, p. 44). La légende indique, outre le nom « Claire Lacombe », la mention « Huile sur toile ». Le cliché est crédité à « Bridgeman Giraudon ».

Le portrait « d’origine » (?) se trouve dans un musée anglais, le Bowes Museum (cote : Founders/Min.15), situé dans le Nord-Est de l’Angleterre, qui en a mis en ligne la reproduction. Je note qu’il est présenté comme une « aquarelle sur ivoire » et non comme une huile sur toile. Il est de petite dimension puisque le diamètre indiqué est de 5,7 cm. La reproduction ci-dessous est à la taille réelle.

founders-min-15

Il est possible que ce portrait ait été agrandi sur toile, opération que proposent divers entreprises spécialisées en ligne, pour cette œuvre comme pour beaucoup d’autres. Il est également possible que les différences de couleurs observées d’une reproduction à l’autre tiennent à la qualité relative des clichés.

Jusqu’à plus informé, nous ne disposons d’aucun portrait peint ou gravé de Claire Lacombe, comédienne et animatrice en 1793 de la Société des Citoyennes républicaines révolutionnaires. En revanche, nous connaissons deux signalements. L’un est daté du 20 ventôse an II (10 mars 1794). Il figure dans un passeport établi par la Commune : 29 ans, 5 pieds 2 pouces, cheveux châtains, yeux bruns, nez aquilin, bouche ordinaire, front ordinaire, menton et visage rond (AN : T 10012). L’autre a été inscrit sur le registre de la prison de St-Pélagie le 14 germinal an III (3 avril 1795) : 5 pieds 2 pouces, cheveux, sourcils et yeux bruns, nez moyen, bouche grande, visage et menton rond, front ordinaire. (APP : AB 320). Il ne semble pas y avoir de contradiction flagrante entre ces données et le portrait sous nos yeux, si ce n’est la « bouche grande » du second signalement.

Le portrait lui-même porte — visible sur les agrandissements — le nom « Ducare » (ou Ducazé, Ducase, Du Caze). J’indique à dessein les différentes hypothèses que la lecture de l’agrandissement suggère ; il est possible que la vision directe permette de trancher. Un balayage rapide sur Internet m’a permis de rencontrer une mention d’un peintre nommé Du Case à Paris au XVIIIe siècle, mais sans la moindre précision supplémentaire. Il porte également, bien visible, la date « 1792 ».

Quant à l’origine du portrait, il aurait pu être apporté de France par Ms Bowes, elle-même française, dont le site du musée nous apprend que le grand-père était un citoyen Sergent, dont le musée possède deux portraits. Il aurait « commandé un bataillon pendant la guerre de Vendée », aurait été condamné à mort en 1792, mais aurait échappé à la guillotine. Au minimum, ces épisodes doivent être considérés dans l’ordre inverse, puisque l’on ne saurait parler de guerre de Vendée en 1792. Par ailleurs, je n’ai trouvé nulle trace de ce dénommé Sergent.

Ce qui me gêne le plus dans la présentation qui est faite de ce portrait sur le site du musée, c’est la mention « Portrait of Rose Lacombe ». Car enfin, si quelque document annexe ou indication portée au verso du portrait mentionne bien « Claire Lacombe », pourquoi rectifier le prénom ?

Il faut ici préciser que, en l’état actuel de nos connaissances, Claire Lacombe n’a jamais été affublée du prénom ou surnom « Rose » dans une pièce d’archive ou un journal d’époque. Ça n’est qu’à partir de 1839 dans l’Histoire monarchique et constitutionnelle de la révolution française d’Eugène Labaume (ou 1838, si je prends en compte une formulation ambiguë dans les Mémoires apocryphes de Talleyrand, laquelle est peut-être l’origine de tout), que le prénom Rose est attribué à Lacombe. L’erreur est rectifiée — dans le texte mais non dans le titre de son livre ! — par Léopold Lacour en 1900 dans Les Origines du féminisme contemporain. Trois femmes de la Révolution : Olympe de Gouges, Théroigne de Méricourt, Rose Lacombe. Wikipédia indique encore aujourd’hui : « Son nom de théâtre était Rose Lacombe », affirmation fondée sur rien. Le World Catalogue lui conserve, on ne sait pourquoi, ce prénom de fantaisie.

S’il existe une mention sur l’objet lui-même indiquant « Rose Lacombe », il date du dix-neuvième siècle au plus tôt et ne peut représenter Claire Lacombe, sinon dans la vision imaginaire qu’en a eue un miniaturiste. Si cette indication figure sur un document annexe, c’est la preuve que la désignation du sujet du portrait est postérieure de plus d’un siècle à la Révolution. Cela n’exclut pas que le sujet soit effectivement Claire Lacombe, mais il faudrait d’autres éléments matériels pour en décider.

Ici, je suppose que la plupart de celles et ceux qui me lisent se demandent pourquoi je n’ai pas posé directement à quelque responsable du Bowes Museum les questions que j’énumère ici. L’idée m’en est venue également. Un premier courriel, malencontreusement envoyé à la mi-juillet 2010, est demeuré sans réponse. Une récidive récente m’a valu un accusé de réception en date du 4 mars 2013 et la promesse que ma demande — concernant les bases matérielles de la désignation du sujet du portrait — était transmise à la conservatrice du musée, le Dr Jane Whittaker, laquelle n’a pas trouvé jusqu’ici le temps de me répondre.

Dans l’attente de cette réponse, dont rien ne dit ni qu’elle viendra ni qu’elle sera décisive, je serai extrêmement reconnaissant à quiconque pourra contribuer à élucider ce petit mystère.

_______________

Abréviations. AN : Archives nationales ; APP : Archives de la Préfecture de police.

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