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LA RÉVOLUTION ET NOUS

~ le blogue historien de Claude Guillon

LA  RÉVOLUTION  ET  NOUS

Archives de Tag: Florence Gauthier

«Comment les révolutions débutent», & autres textes, par Albert Mathiez ~ Supplément: «Comment on fabrique leur légende dorée»

28 dimanche Mai 2017

Posted by Claude Guillon in «D'une révolution l'autre», «Documents»

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Albert Mathiez, Augustin Cochin, Clubs de femmes, Démocratie directe, Florence Gauthier, Mandat impératif, Révocabilité, Robespierre, Yannick Bosc

Yannick Bosc et Florence Gauthier ont eu l’excellente idée, en cette année du centenaire de la Révolution russe, de rééditer en un petit volume les textes de l’historien Albert Mathiez consacrés à la comparaison entre les révolutions russe et française.

Éditions Critiques, 139 pages, 14 €.

Je reproduis ci-dessous l’un des textes du recueil qui vaut pour toutes les révolutions: «Comment les révolutions débutent», initialement publié dans L’Humanité du 6 août 1921.

Par ailleurs, on trouvera après le texte de Mathiez un passage du recueil à propos duquel je me perds en conjectures et espère les lumières des auteurs…

Comment les révolutions débutent

Mon ami le sceptique, qui se proclame réaliste, me dit en souriant : Les affaires de la révolution vont mal ! L’émiettement des forces ouvrières fait des progrès. Voici que Moscou jette un ferment de division parmi les syndicalistes révolutionnaires. Allons, ce n’est pas encore pour demain !

Et moi je lui réponds : les révolutions ne sont pas l’œuvre des chefs. On ne fait pas une révolution comme on fait une émeute par un coup de main préparé. Les révolutions se déclenchent toutes seules. Elles déconcertent par leur soudaineté toutes les prévisions. Les chefs n’apparaissent et n’exercent sur elles leur action qu’une fois qu’elles ont éclaté. Exemple : la Révolution française et la révolution russe.

En 1789 il n’y a pas en France de partis ni de journaux. Aucune trace de complot ni d’organisation. En vain, quelques historiens réactionnaires ont soutenu après coup le contraire. Augustin Cochin, qui a repris à son compte la vieille thèse de complot formulée par le jésuite Barruel, a été obligé d’avouer, dans son étude sur la campagne électorale de 89 en Bourgogne, que les preuves manquaient.

Joseph de Maistre lui-même a lavé les francs-maçons illuminés de l’accusation d’avoir combiné l’explosion dans le secret des loges.

On comprendrait mal, en effet, que quelques milliers de francs-maçons qui appartenaient d’ailleurs la plupart aux classes privilégiées, aient pu mettre en branle les innombrables jacqueries qui éclatent à l’improviste sur tous les points du territoire dès le lendemain de la convocation des États Généraux. Il suffit de lire la correspondance des agents de l’autorité royale, subdélégués, intendants, gouverneurs[1], pour se rendre compte de la soudaineté prodigieuse d’un mouvement irrésistible qui les frappa de stupeur et d’impuissance. Les meneurs qui conduisent les bandes paysannes à l’assaut des châteaux ou les foules d’artisans à l’assaut des barrières de l’octroi ou des hôtels de ville, sont des gens obscurs dont on ne sait même pas les noms. On est bien en présence, comme Taine l’a reconnu, d’une anarchie spontanée.

La révolution russe n’a pas débuté autrement en mars 1917. Les chefs bolcheviks, qui la dirigeront quelques mois plus tard, étaient en prison à l’étranger. Lénine attendait en Suisse les événements. Ce ne sont pas les cadets de la douma qui ont donné le signal des émeutes. Elles les ont surpris et effrayés. La Douma débordée n’a fait qu’enregistrer les faits accomplis. Les chefs des premiers soviets, où fraternisèrent ouvriers et soldats, sont tout aussi inconnus que les paysans qui soulevèrent la Provence, la Bretagne, l’Alsace, le Dauphiné, dix autres provinces, de janvier à juillet 1789. Les révolutionnaires, qui paraîtront ensuite, s’étonneront de la facilité avec laquelle l’œuvre de destruction s’accomplit.

Déroulement logique des choses. Les chefs, précisément parce qu’ils sont des chefs, ont le sentiment de leurs responsabilités. Avant d’agir ils réfléchissent. Ils ne veulent rien laisser au hasard. Ils craignent les échecs. La part d’inconnu que renferme l’avenir pèse sur leur hardiesse. En avril 1792, quatre mois seulement avant le 10 août qui précipita le Trône, Marat, découragé, ne croyait plus au succès.

Ce qui caractérise une révolution, ce qui la distingue d’une émeute, c’est l’élan anarchique qui l’emporte. L’émeute ne groupe pour l’action que les hommes d’un parti. La révolution met en branle les masses profondes inorganisées. On fixe d’avance le jour d’une émeute. On est impuissant à prévoir la date d’une explosion révolutionnaire.

Cela ne veut pas dire qu’on ne puisse reconnaître, à des symptômes sûrs, que les temps sont proches. Quand les classes privilégiées doutent elles-mêmes de leur droit, quand elles multiplient à la fois les concessions et les coups de force, quand elles se révèlent incapables de remédier aux maux de l’État, et, d’autre part, quand les foules, qu’elles ne tiennent déjà plus en mains, manifestent collectivement leur mécontentement, quand l’agitation devient endémique, quand la troupe cesse d’être obéissante, alors l’observateur peut formuler son diagnostic.

Pour que la révolution succède à l’émeute, il faut nécessairement que l’ordre établi n’inspire plus que le dégoût et la haine à la majorité du pays. Ce facteur psychologique est décisif. Peu importe que le mécontentement, qui sera l’âme de la révolte, s’inspire de causes diverses et parfois opposées, comme ce fut le cas dans la France de 1789, l’essentiel est que ce mécontentement grandisse au point de faire désirer aux masses un changement quel qu’il soit.

Il entre, en effet, dans la passion collective d’où sortent les révolutions, autant de besoins de vengeance, de fureur destructive que d’idées positives. Les paysans français qui déchaînèrent la Grande Peur savaient fort bien ce dont ils ne voulaient plus. Ils ne voulaient plus des dîmes, des corvées, de la milice, de la gabelle, etc. Ils savaient moins bien par quoi le régime odieux qu’ils démolissaient serait remplacé. Jaurès devinait l’obscur travail de leurs cerveaux quand il proclamait un jour la fécondité de la haine.

Mon ami le sceptique, qui tire argument des divisions des révolutionnaires pour ajourner sine die la date de ses espoirs, raisonne avec son esprit, en dehors de l’histoire.

Les foules anonymes tiennent en leurs mains leurs destins. On ne peut rien sans elles et à plus forte raison contre elles. Gouvernement ou partis, qui essaieront de leur faire violence, se briseront.

_______

[1] On les trouvera pour une bonne part dans le carton H. 1453 des Archives nationales. [Note de Mathiez] Il est dommage que Y. Bosc et F. Gauthier n’aient pas pris la peine d’actualiser les cotes indiquées par Mathiez. Celle-ci se lit aujourd’hui H//1453 (conservée à Paris, et non à Pierrefitte-sur-Seine).

La révocabilité des mandataires constitutionnalisée par la Révolution…?!

J’en viens au passage annoncé en introduction, ci-dessous reproduit :

Je dois commencer par dire que je ne sais pas trancher, à la lecture, s’il s’agit là de l’opinion de Yannick Bosc & et Florence Gauthier ou bien s’ils entendent résumer dans cet alinéa la pensée de Mathiez.

Ne retrouvant pas une idée voisine exprimée dans les textes de Mathiez réunis, je penche cependant pour la première hypothèse (sous réserve d’une contradiction des intéressés).

En l’état – de cette longue phrase et de mes courtes connaissances – ce passage n’a aucun sens.

Rien ne lui correspond dans la Constitution de 1793. Dès les premières assemblées primaires réunies pour l’élection de députés aux états généraux de 1789, puis lors des réunions des États eux-mêmes, sans parler des rapports conflictuels entre l’administration provisoire de la municipalité de Paris et ses districts, le contrôle des mandants sur les mandataires (mandat impératif et révocabilité) a été combattu par les nouvelles institutions révolutionnaires.

Combattu, et non institutionnalisé, dans les différents textes de constitution adoptés (ou autrement).

Dans l’attente d’une réponse des auteurs, que je me ferai un plaisir et un devoir de publier, je suis contraint de soupçonner un de ces raisonnements fallacieux à trois bandes (au moins!) par lesquels Florence Gauthier bâtit patiemment une légende dorée de la Révolution, et particulièrement de son héros Robespierre, censé être un ami sincère de la citoyenneté des femmes, quand – dans la triste réalité – il a été le fossoyeur de leurs clubs et sociétés.

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République[s], modernité[s], etc. Colloque international les 24 & 25 novembre

22 mardi Nov 2016

Posted by Claude Guillon in «Annonces»

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Anne Verjus, Babeuf, Edward Castelton, Florence Gauthier, Ludovic Frobert, Pierre Serna, République, Robespierre, Samuel Hayat, Stéphanie Roza, Yannick Bosc

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La session qui concerne la Révolution:

capture-decran-2016-11-22-a-11-32-34Le programme complet au format pdf.

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“L’Esprit des Lumières & de la Révolution” ~ Séminaire en Sorbonne

13 jeudi Oct 2016

Posted by Claude Guillon in «Articles»

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Alexandre Guermazi, Christine Fauré, Colonies, Condorcet, Emmanuel Faye, Florence Gauthier, Jean-Claude Gaudebout, Le Journal des dames, Marc Belissa, Marc Deleplace, Sections parisiennes, Suzanne Levin, Vincent Grégoire, Yannick Bosc

Programme 2016-2017 du séminaire de recherche animé par Marc Belissa, Yannick Bosc, Marc Deleplace et Florence Gauthier.

Les séances se tiendront le jeudi de 18h à 20h à l’Université Paris Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, salle G 361, escalier G au 2e étage.

Cul de lampe Bonnet A17 novembre : Marc Belissa, République monarchique ou démocratique ? La querelle des titres et la construction d’un cérémonial républicain aux États-Unis en 1789-1791.

8 décembre : Christine Fauré, Le journal des dames.

19 janvier : Alexandre Guermazi, Les assemblées générales des sections parisiennes, démocratie et représentation en l’an I de la République.

23 février : Vincent Grégoire, Impérialisme et cosmopolitisme. Théories de l’État et problèmes coloniaux (XVIe-XVIIIe siècle).

16 mars : Suzanne Levin, La conception de la souveraineté populaire chez Prieur de la Marne.

27 avril : Jean-Claude Gaudebout, La déclaration des droits de Condorcet en 1789.

11 mai : Yannick Bosc, Les prud’homies de pêcheurs comme modèle républicain.

8 juin : Emmanuel Faye, Arendt, Heidegger et la modernité.

Cul de lampe Bonnet B

Le séminaire L’Esprit des Lumières et de la Révolution est soutenu par le CH19 – Panthéon Sorbonne/Paris Sorbonne, le CHISCO EA1587 et l’ED395, « Milieux, cultures et sociétés du passé et du présent », Paris Ouest Nanterre.

Groupe de travail créé par Marc Belissa, Yannick Bosc, Françoise Brunel, Marc Deleplace, Florence Gauthier, Jacques Guilhaumou, Fabien Marius-Hatchi, Sophie Wahnich.

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Joël Pommerat, le théâtre & la Révolution

04 lundi Jan 2016

Posted by Claude Guillon in «Articles»

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Éditions Libertalia, Éric Hazan, CQFD (revue), Florence Gauthier, Guillaume Mazeau, Joël Pommerat, Louis XVI, Lutte des classes, Marie-Antoinette, Ruth Olaizola, Théâtre

Je suis un auteur chanceux quoique (ou parce que) vieillissant : mes éditeurs me chouchoutent. C’est ainsi que Nicolas Norrito, l’un des triumvirs de Libertalia, me sachant casanier, m’a invité à Nanterre assister à une représentation de la pièce de Joël Pommerat : Ça ira (1) Fin de Louis. C’était la veille des tueries du Bataclan et autre lieux, avant l’état d’urgence, avant que le gouvernement « socialiste » prenne mon livre La Terrorisation démocratique au pied de la lettre, comme programme électoral…

Je savais peu de choses de la pièce en m’asseyant dans la grande salle des Amandiers, sinon qu’elle durerait plus de quatre heures et qu’elle traite de la Révolution. Je savais aussi, par Ruth Olaizola, l’une des comédiennes, à qui j’avais envoyé Notre Patience est à bout, qu’une des lectures de base proposées par Pommerat à sa troupe était le livre d’Éric Hazan. Je savais encore que l’historien Guillaume Mazeau avait travaillé avec les comédiennes et les comédiens pour leur fournir des éléments documentaires fiables et précis[1]. Beaucoup et peu à la fois.

Les choses ont plutôt mal débuté (pour moi) ; j’ai eu pendant un petit quart d’heure l’impression désagréable de me trouver devant une espèce de répétition grisâtre de la série Borgen. Et puis…

Et puis, je ne savais plus depuis combien de temps j’étais assis là lorsque la première coupure a eu lieu… Magie du théâtre sourirez-vous ! Peut-être, en effet — quoique j’y sois souvent réfractaire (au sens de la brique). Magie de cette mise en scène particulière en tout cas.

Elle ne manque pourtant pas d’éléments déroutants. Peu de points de repères, que — par réflexe — j’ai longtemps cherchés : À quel moment précis de la chronologie révolutionnaire sommes-nous ? Quel personnage joue cet acteur ?… Robespierre ? Billaud ? Or les seuls personnages identifiables sont Louis XVI et Marie-Antoinette. Les autres portent des noms inventés.

Lors d’un débat, le 15 décembre dernier, à l’Institut d’histoire du temps présent, Guillaume Mazeau confirmait la volonté assumée d’ « égarer » le spectateur et de le plonger dans un hors-temps, pas vraiment pendant la Révolution, pas vraiment aujourd’hui (même si le spectateur lambda que je suis ne peut s’empêcher de capter des clins d’œil à l’actualité politique, que le metteur en scène assure n’avoir pas voulu faire).

Donc, pas vraiment une pièce « sur la Révolution » (et je me trompais en croyant savoir ça). Sur quoi alors ?

Voilà ce qu’en disait Joël Pommerat en août 2015

 

J’ai commencé à réfléchir à Ça ira (1) Fin de Louis en décembre 2013. Je souhaitais travailler sur une matière épique, avec de l’amplitude, pour continuer à aborder ce thème qui m’intéresse : le point de rencontre entre la pensée, l’imagination et l’action. Qu’est ce que l’idéologie ? Comment opère-t-elle dans le réel ?

Mes lectures m’ont conduit assez vite à la Révolution française, qui est comme le point zéro de la démocratie, un moment d’émergence pour les idéologies et représentations politiques contemporaines. Cette période, ce sont nos racines, nos mythes, nos grands héros. Je voulais donner à voir ce travail politique, ce bousculement de la réalité, avec toutes les émotions qu’il contient, non seulement le travail de la pensée mais aussi la peur, l’épuisement, l’effort incroyable et le tragique.

Pour faire cette sorte d’archéologie de l’imaginaire politique, entre la réalité historique et la fiction, je cherche à déployer une dramaturgie de la parole et des lieux qui nous mette au cœur des choses, qui fasse ressortir le vivant sous les images figées. Je cherche à rendre présent le passé non pour le juger avec notre regard d’aujourd’hui, mais pour essayer peut-être de mieux le comprendre.

Qu’en retient le spectateur ?

Une pièce enthousiasmante sur la complexité des événements historiques. Et la Révolution française est un excellent exemple et une excellente « origine », même en tenant compte de l’arbitraire du choix de n’importe quelle origine.

Un exercice collectif époustouflant, au sens propre, sur la parole. Un exercice de parole. Qui a demandé, dès la conception, le meilleur d’elle-même à la troupe. Le spectacle a été écrit au fur et à mesure des six mois de répétition, comédiennes et comédiens recevant chaque jour des documents à lire, improvisant le lendemain et le metteur en scène écrivant à partir de ces impros.

Notons au passage que le fait que des comédiens et comédiennes arrivent par les côtés et le haut de la salle, et s’adressent de là à ceux demeurés sur scène, accentue l’impression d’immersion[2] du spectateur dans la parole contradictoire. Du coup, la parole est aussi dans la salle, entre les spectateurs, qui se désignent les entrées inattendues, échangent des commentaires, des questions, applaudissent, voire joignent leurs cris à ceux des comédiens. Et sourient, et se sourient…

Détail encore à propos de paroles : plusieurs comédiens d’origine étrangère donnent, par leur prononciation particulière du français, une idée — probablement faible — de la diversité des accents régionaux qui devaient résonner lors d’une séance de l’Assemblée !

Qui dit exercice sur la et de parole dit représentation de et réflexion sur le pouvoir, donc sur la démocratie, la souveraineté et son exercice.

Si le peuple n’est pas absent des débats — on n’assiste pas seulement à des séances de l’Assemblée nationale mais à des réunions de district[3] — la foule, elle, n’apparaît pas. Lors de la discussion ci-dessus évoquée (IHTP), comme une personne posait une question sur cette absence, il lui a été répondu qu’on s’était heurté à l’impossibilité d’incarner une foule avec « seulement » quatorze comédien(ne)s. Oserais-je dire que cette réponse ne me paraît pas à la hauteur du spectacle lui-même. Qu’il s’agisse d’un défi pour un metteur en scène, je l’imagine facilement. Qu’il dépasse les capacités du metteur en scène de Ça ira (1) Fin de Louis, j’ai davantage de mal à le croire. La suite, annoncée dans le titre même par le n°1, sera peut-être l’occasion de nous surprendre de ce point de vue.

Par ailleurs, si des gens du peuple s’expriment sur scène, on aura autant de mal à discerner une analyse de classes qu’à reconnaître Robespierre… Peut-être faut-il voir là une fâcheuse influence de la première lecture du metteur en scène — l’histoire rédigée et publiée par Éric Hazan[4] — dont j’ai entendu dire à mon grand étonnement le 15 décembre qu’elle avait été retenue parce que « sans préjugés ».

Or, si décider que la Révolution française ne mérite pas le qualificatif de « révolution bourgeoise » n’est pas nécessairement un « préjugé », c’est à tout le moins un parti pris, lequel entraîne fâcheusement l’abandon de toute analyse de classes. Or, ce parti pris est défendu notamment par l’historienne Florence Gauthier, elle-même conseillère d’Hazan pour l’écriture de son livre, dans l’unique but d’exonérer son héros Robespierre de tout reproche, ce que Hazan semble n’avoir pas bien saisi. Il est curieux de suivre le chemin de cet angélisme social, repeint aux couleurs d’un antistalinisme moderne, depuis Gauthier jusqu’à Pommerat, en passant par Hazan…

Autre parti pris, très défendable du point de vue de la mise en scène : dans les réunions de l’Assemblée nationale, les rôles nécessairement masculins sont joués indifféremment par des comédiens et des comédiennes (magnifiques !). Je sais que ce dispositif a semé le trouble dans l’esprit de certains spectateurs et certaines spectatrices. Y aurait-il eu des femmes députées ? Je n’ai pas souvenir que ce point soit soulevé et précisé dans le spectacle, ce qui est doublement dommageable. On manque un élément important du « point zéro de la démocratie », qu’il ne s’agit pas de « juger » mais de décrire tel qu’il conditionne au moins tout le siècle suivant. On risque aussi d’induire en erreur des spectateurs/trices de bonne foi.

Ces réserves émises, je ne saurais trop conseiller à celles et ceux qui le pourront et ne l’ont pas encore fait d’aller voir ce spectacle. Et sa suite, que je ne manquerai pour rien au monde.

_____________________

[1] On lira avec intérêt l’entretien avec Guillaume Mazeau réalisé pour CQFD par Nicolas Norrito.

[2] Immersion sans démagogie ni manipulation. S’il peut arriver que tel spectateur voit un député s’assoir à ses côtés, personne ne l’incite ni encore moins ne le contraint à « participer ». Les manifestations d’enthousiasme spontané, et les « méprises » de spectateurs se levant pour applaudir un discours avec des comédiens qu’ils prenaient pour d’autres spectateurs sont d’autant plus précieuses.

[3] J’ai songé alors, non plus à Borgen, mais aux meilleurs moments du film Land and Freedom.

[4] Voir la critique publiée sur ce blogue, par le lien sur le nom de l’auteur.

 

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La tournée du spectacle

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Olympe, Éden & Panthéon

05 samedi Avr 2014

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Textes de femmes»

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1793, Charlotte Corday, Claire Lacombe, Clubs de femmes, Evelyne Sullerot, Féminisme, Florence Gauthier, Jacques Godechot, Marat, Michel Onfray, Olivier Blanc, Olympe de Gouges, Pauline Léon, René Viénet, Robespierre, Sylvia Duverger

Le débat autour de l’éventuelle panthéonisation d’Olympe de Gouges, puis de sa non-panthéonisation, a donné lieu à des polémiques, sur lesquelles je reviens. Olivier Blanc, biographe d’Olympe y a logiquement joué un rôle central, mais on y retrouve également Florence Gauthier, comme à son habitude en défenseuse officieuse de Robespierre, et — dans le rôle du raton laveur de l’énumération — un ancien situationniste rallié à l’historiographie contre-révolutionnaire. Je ne prétends pas faire ici un relevé critique exhaustif de leurs positions, mais il me semble instructif de noter, outre une erreur factuelle, sur quels points portent une polémique qui prétend déterminer qui a droit à figurer au paradis de la Révolution, de la démocratie (et des bons sentiments).

 

Erreur d’Olivier Blanc sur les clubs de femmes

En entretien avec Sylvia Duverger, pour un blog hébergé par Le Nouvel Observateur[1], Olivier Blanc répond à la question « Quels étaient les clubs de femmes au moment de la Révolution ; quel rôle Olympe de Gouges y a-t-elle joué ? »

Les premiers clubs majoritairement féminins apparurent en octobre 1790, et eurent une existence éphémère, à l’exception de la Société des Amies de la Vérité, où furent prononcés les plus beaux discours sur l’émancipation politique des femmes.

Puisque Blanc parle d’une « majorité féminine », il s’agit de sociétés mixtes ; il est donc probable qu’il veut faire allusion aux « sociétés fraternelles ». Pour ce qui concerne les clubs exclusivement féminins, son calendrier retarde d’un an sur la réalité puisque les premiers clubs de femmes apparaissent dès septembre 1789, comme je l’ai déjà rappelé sur ce blog.

 

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Cliquer pour AGRANDIR.

Un ex-situationniste glorifie Olympe… et Charlotte

René Viénet, jadis auteur de Enragés et situationnistes dans le mouvement des occupations (Gallimard, octobre 1968), préfère aujourd’hui la fraternité intellectuelle avec Michel Onfray à la fréquentation de Guy Debord (décédé, il est vrai). Il s’est inscrit au club des admirateurs de Charlotte Corday, meurtrière de Marat, à laquelle Onfray a consacré un livre d’hommage et dont Viénet recommande, parmi d’autres débaptisations, de donner le nom à l’avenue Mac-Mahon… Inoffensive activité pour ex-fan sénile des sixties que ce Monopoly idéologique ? Point tout à fait puisqu’il est une occasion supplémentaire de répandre une confusion théorique, dont Michel « la-manip-pour-tous » Onfray est devenu le recordman toutes catégories. Certes Viénet n’atteint pas ces hauteurs, mais ses efforts méritent d’être encouragés, comme en témoigne ces extraits d’une tribune[2] publiée par Rue 89 :

« Il était en effet évident que ce triomphe de Marie-Olympe – 215 ans après qu’on lui ait coupé la tête, enceinte, au terme d’un procès de quelques minutes sans avocat – conduirait à célébrer – logiquement et en même temps – Charlotte Corday (exécutée pour avoir poignardé Marat) et Roch Marcandier, guillotiné avec son épouse pour avoir expliqué et dénoncé les massacres de septembre dans sa brochure “Histoire des hommes de proye, ou Les Crimes du Comité de surveillance et des buveurs de sang, dénoncés à tous les peuples”. […]

 Il est temps d’expliquer aux enfants des écoles que les Massacres de septembre suivent la Saint-Barthélemy et préfigurent Oradour-sur-Glane, sans Alsaciens, mais avec des Marseillais et Avignonnais – ceux qui n’étaient pas aux frontières pour défendre la patrie en danger, mais aux ordres de Maillard (et de ses patrons au sein de l’Hôtel de Ville) pour effrayer durablement les Parisiens.

 Marie-Olympe est une pierre de touche qui permet de comprendre comment les Lumières ont sombré dans la Terreur, comment l’élan révolutionnaire de 1789 fut très tôt perverti par des personnages corrompus, criminels, d’authentiques précurseurs de Staline ou de Pol Pot. […]

Marie-Olympe de Gouges est l’objet d’un malentendu profond : sa vie et son œuvre intimement mêlées — ce qui en fait le grand intérêt — sont encore mal connus des féministes qui ont récemment attribué son nom à différentes crèches ou médiathèques sans comprendre qu’elle critiqua Robespierre, avec verve et perspicacité, et que c’est pour cela qu’elle fut exécutée. »

Le parti pris de polémique outrée de Viénet se retrouve dans un texte antérieur (19 mars 2013) hébergé par le site du Huffington Post :

 Je signale à notre Président que nos professeurs d’histoire ne sont peut-être pas encore prêts à accepter que “Mad-Maximilien”, l’Ayatollah de l’Être suprême (avec sa ridicule cérémonie au Champ de mars, mise en scène par Jacques Louis David, le 8 juin 1794), l’ancêtre de Staline, de Mao et de Pol Pot, soit remis en cause par l’irruption rue Soufflot des ombres de Marie-Olympe de Gouges et — fatalement — de sa sœur [sic] Charlotte Corday.

 

D’abord un mot sur la question de savoir si Olympe était enceinte, « détail » sur lequel Viénet insiste pour susciter l’indignation du lecteur (et de la lectrice). Était-elle enceinte ? Elle le prétendra, tandis que les deux médecins et la sage-femme chargé(e)s de l’examiner déclareront ne pouvoir fournir un « jugement positif », étant donné l’époque récente de la conception supposée. Il y avait donc un doute — qui subsistera toujours — et le tribunal révolutionnaire considéra qu’il n’y avait pas de raison d’en faire bénéficier l’accusée. Être reconnue enceinte, c’était échapper à la guillotine jusqu’à l’accouchement. Dans des temps troublés, neuf mois de sursis peuvent vous sauver la vie. La démarche d’Olympe de Gouges, enceinte ou non, était donc très rationnelle. Hélas pour elle, ses adversaires politiques voulaient l’éliminer et non seulement la mettre à l’écart.

Par ailleurs, qualifier Robespierre d’ « ancêtre de Pol Pot » est dérisoire. Je considère qu’aucune comparaison n’est à priori frappée de tabou, mais Viénet recoure précisément ici à l’effet facile de « violation du tabou ». Il serait peut-être intéressant de comparer la vision de l’action politique chez Robespierre (et beaucoup de révolutionnaires, ses ennemis y compris) et chez Pol Pot (et quelques autres), du point de vue de la conviction que la solution des problèmes sociaux et politiques passe par l’élimination physique des opposants et la terreur. Mais quel que soit le résultat de l’opération de comparaison — ignorant presque tout de l’un des termes, je n’ai pas de préjugé sur ce résultat —, il ne saurait se réduire à la formule d’une « paternité morale » sautant de siècle en siècle… Et comment ? mutation génétique ? montgolfière ? plagiat par anticipation ?

Signature Olympe B

Signature d’Olympe de Gouges

Un infime détail historiographique maintenant : Viénet affirme que les affiches éditées par Olympe de Gouges « sont des chefs-d’œuvre méconnus (conservés aux Archives de l’Assemblée nationale) qui attendent d’être réédités ». Ça n’est pas faux : une réédition serait en effet bien venue, si l’on parle bien d’une réédition sous forme d’images ou bien au format original, les textes eux-mêmes ayant déjà été édités par Olivier Blanc aux éditions Côté-femmes, en deux volumes (1993).

De surcroît une édition moderne de trois affiches a eu lieu, aux Éditions d’histoire sociale (EDHIS), après leur découverte à l’Assemblée par Claude Mazauric. Viénet l’ignore, et — plus curieusement — Olivier Blanc également, qui n’en fait pas mention dans sa bibliographie[3]. Les documents insérés dans le présent article sont des photographies de la réédition EDHIS. Les couleurs vives sont d’origine et l’on imagine le bel effet qu’elles pouvaient produire sur les murs de Paris, le collage étant assuré par l’imprimeur lui-même.

Olympe de gouges fut exécutée « parce qu’elle avait critiqué Robespierre » martèle Viénet. Voilà une affirmation bien nette, que je rapprocherai d’une autre, d’une plume autrement compétente et éclairée que la sienne, je veux parler de celle de Jacques Godechot. Qu’écrit-il dans sa préface au livre[4] d’Evelyne Sullerot Histoire de la presse féminine en France des origines à 1848 ? Ceci :

Pendant la Révolution parurent les premiers journaux féministes, ils engagèrent la lutte contre Robespierre qui assimila un peu trop rapidement le féminisme aux “factions”, qui le menaçaient sur sa gauche et sur sa droite. Une des premières femmes journalistes, Olympe de Gouges, paya de sa vie, sur l’échafaud, l’hostilité vouée par les Montagnards aux femmes qui s’occupaient de politique. (p. 6)

Historien et enseignant reconnu, Godechot a parfois cédé à la tentation de l’affirmation dépourvue de référence, interdisant par là toute vérification. Tantôt il affirme que Robespierre a défendu le droit de vote des femmes à l’Assemblée constituante (dans Les Institutions de la France sous la Révolution et l’Empire, e. o. 1951), mais personne, pas même les plus fanatiques robespierrolâtres, n’a pu retrouver la moindre trace d’une intervention de Robespierre en ce sens, tantôt il assure que des journaux « féministes […] engagèrent la lutte contre Robespierre ». Également dépourvues de « pièces justificatives », comme l’on disait autrefois, ces deux affirmations sont en outre contradictoires. Pourquoi les « féministes » auraient-elles « engagé la lutte contre Robespierre » s’il voulait étendre les droits des femmes ?

Si l’on admet que le terme « féminisme » désigne ici notamment la Société des Citoyennes républicaines révolutionnaires de Claire Lacombe et Pauline Léon, on peut comprendre le reproche fait à Robespierre de les avoir confondues, elle et les Enragés, avec les « factions » dont il a, en effet, poursuivi et obtenu l’éradication. Il parait cependant réducteur de dire qu’Olympe de Gouges paya de sa vie l’hostilité des Montagnards envers les « femmes qui s’occupaient de politique », même si ce facteur a très probablement contribué à la hargne avec laquelle elle a été poussée vers l’échafaud. Quant à l’hostilité de Robespierre lui-même, elle se déduit aisément de la lecture de l’extrait ci-dessous de la Réponse à la justification de Maximilien Robespierre, adressée à Jérome Pétion, par Olympe Degouges (novembre 1792, 16 p., sur Gallica). Ce qui laisse entière la question de savoir si Robespierre a souhaité et surtout s’il a eu l’occasion et les moyens de transformer en actes son sentiment.

 

OdG Réponse à la justif de Roro

Cliquer pour AGRANDIR.

 

Florence Gauthier dresseuse de torts

Florence Gauthier, répondant[5] sur le site Le Canard républicain à un article de Myriam Perfetti publié dans Marianne (17-23 août 2013) conteste que de Gouges ait pu être guillotinée pour son « féminisme » et souligne, à juste titre, son engagement « girondin » :

«Dès le lendemain de la Révolution des 31 mai-2 juin 1793, Olympe de Gouges publia par affiches son rejet de la Constitution de 1793, de la République démocratique et de sa politique économique et sociale. Puis, en juillet, dans la période du référendum sur la Constitution, elle mena campagne contre la république démocratique et réclama une monarchie et une aristocratie des riches : elle fut arrêtée le 20 juillet, condamnée et exécutée. Imprudence, sans doute, car depuis le printemps 1793, la situation politique avait tourné à la guerre civile et les Girondins, battus, n’hésitèrent pas à y participer, elle s’y engouffra[6].

«Son procès ne mentionne aucune inculpation pour cause de son sexe, mais pour ses écrits politiques contre le principe de souveraineté populaire.»

Passons sur ce dernier argument, sans valeur, le Tribunal révolutionnaire ne s’étant jamais senti tenu de préciser tous les (vrais) motifs de la comparution de tel ou telle devant lui (et aucun autre tribunal politique, ni avant ni après lui).

Nous avons vu, dans l’extrait de 1792 ci-dessus reproduit, que la position d’Olympe de Gouges est plus complexe que ce que veut en retenir F. Gauthier. Il est exact qu’elle adresse dès le 9 juin 1793, c’est-à-dire immédiatement après la proscription des députés girondins, une brochure à la Convention, intitulée Testament politique d’Olympe de Gouges, dans laquelle elle interpelle les députés : « Vous avez sacrifié trente-deux de vos dignes collègues à des haines personnelles qui bientôt vous demanderont des actes d’accusation sans pouvoir citer un seul fait contre les accusés ». Dans la même brochure elle se défend d’ailleurs « d’être d’intelligence avec [les] Girondistes » dont elle assure ne fréquenter aucun.

Il est un peu rapide de prétendre qu’en juillet elle mène  campagne contre la république et « réclame une monarchie et une aristocratie des riches ». Ce qu’elle propose va certes à l’encontre du mouvement montagnard et sans-culotte, mais ça n’est pas, au moins, sans une habileté certaine et peut-être une grande naïveté, puisqu’elle réclame en somme pour trancher la question de la constitution de la France une procédure d’ « appel au peuple », que les Girondins n’avaient pas pu imposer dans le procès de Louis XVI :

Il sera enjoint à tous les départements de former la convocation des assemblées primaires : trois urnes seront placées sur la table du Président de l’assemblée, portant chacune d’elles cette inscription : Gouvernement républicain, un et indivisible ; Gouvernement fédératif ; Gouvernement monarchique[7].

C’est, au sens strict, une position réactionnaire, puisqu’elle voudrait revenir, en 1793, à la situation d’avant le 10 août 1792 et la déchéance du roi. Mais, habileté ou naïveté, c’est bien une procédure démocratique qui est suggérée, par la convocation d’assemblées primaires, dont rien n’indique qu’elles doivent revenir à un système censitaire abrogé après le 10 août, et encore moins exclure les femmes. Peut-être pense-t-elle (à tort ?) que la majorité des habitant(e)s du pays se prononceraient pour l’une ou l’autre des deux dernières formes de gouvernement. Peut-être souhaite-t-elle réellement et simplement s’en remettre à la volonté populaire ? Il est évidemment impossible à la Convention et à ses comités de risquer leur existence et celle de la Révolution dans une espèce de référendum, ce que la révolution n’est pas, non plus qu’un dîner de gala. Voilà qui ne justifie ni l’élimination physique d’Olympe de Gouges en 1793, ni la réécriture hâtive de son acte d’accusation en 2014.

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 ______________________________

[1] « Olympe de Gouges : une résistante à la Terreur. Entretien avec Olivier Blanc », sur le blog Féministes en tous genres, 1er janvier 2014.

[2] « Olympe de Gouges n’ira pas au Panthéon : pessimistes, qu’aviez-vous espéré ? », 23 février 2014.

[3] O. Blanc recense vingt affiches d’O. de Gouges. Trois ont été rééditées dans le porte-folio « Les femmes dans la Révolution française » qui compte lui-même douze affiches.

[4] Publié chez Armand Colin en 1966, hélas introuvable.

[5] « Olympe de Gouges, histoire ou mystification ? », dimanche 15 septembre 2013.

[6] Cette phrase ne me semble pas très claire ; je n’ai pas voulu la supprimer ; elle est telle dans le texte.

[7] Les Trois urnes, ou le salut de la patrie, par un voyage aérien (affiche publiée le 19 juillet 1793.

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Jacques Roux et les Enragés dans “L’Humanité”

22 mercredi Jan 2014

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Documents»

≈ Commentaires fermés sur Jacques Roux et les Enragés dans “L’Humanité”

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1793, Albert Mathiez, Communisme, Enragé(e)s, Féminisme, Florence Gauthier, Jacques Roux, Jean-François Varlet, Lutte des classes, Olympe de Gouges, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires, Robespierre

Je poursuis ici la réflexion amorcée dans l’article « Contre Mathiez, Jacques Roux en “héros stalinien” ? » Il s’agit, je le rappelle, de savoir si, comme le suggèrent les préfaciers de la réédition du livre de Mathiez La Réaction thermidorienne, Gauthier et Bosc, Jacques Roux et les Enragés ont fait l’objet d’une récupération particulière des staliniens français dans les journal L’Humanité, au début des années 30 du XXe siècle. Cette récupération étant censée avoir servi à « fabriquer de toutes pièces » un « embryon de “parti prolétarien” », lui-même destiné à accréditer le mythe d’une « révolution bourgeoise ».

Je me suis livré pour ce faire à une recherche dans les numéros du quotidien disponibles sur le site Gallica à la date du 19 janvier 2014, sachant que sur les quelques 13 000 documents numérisés, une partie est inaccessible à la recherche dite « plein texte » (c’était le cas du n° dans lequel a été publié la nécrologie de Mathiez par Fréville, reproduite dans l’article susnommé). Cette recherche — sur les occurrences du nom de Roux, du terme Enragés, et du nom de Mathiez — ne peut donc prétendre à l’exhaustivité. En l’état, elle permet néanmoins de se faire une idée dont on va voir qu’elle contredit la thèse de la récupération stalinienne.

Je donne à la suite de l’articles quelques brèves notions biographiques sur les auteurs des articles évoqués dont le nom est suivi d’une astérisque.

«L’Humanité» des débuts : Jacques Roux, un précurseur & le camarade Mathiez

La première mention de Jacques Roux que j’ai trouvée figure, en une, dans L’Humanité du 11 juin 1909 (sixième année). L’article traite des projets et des difficultés de « L’économie parisienne », une coopérative de consommateurs fondée en 1881 et sise rue des Gravilliers :

C’est le vieux Paris industriel qui subsiste là. C’est le peuple des artisans que Jacques Roux, le prêtre niveleur animait, au temps de la Révolution, contre Saint-Just lui-même, qu’il accusait de “pouvoir dîner tous les soirs”.

L’expression « prêtre niveleur » est anachronique et peu précise ; la mention de Roux est anecdotique.

On ne le trouve pas cité dans une série de cinq articles de 1915, signés F. Le Botry[1], sur « Le “maximum” sous la Révolution[2] ».

Albert Mathiez a adhéré au parti en 1919, il l’a quitté en 1923. Pendant cette période, il collabore au quotidien, dans lequel il signe des articles. Par ailleurs, il est fréquemment cité pour son travail d’historien et d’éducateur populaire.

Ainsi L’Humanité du 23 février 1922 (p. 2) rend compte d’une conférence dans laquelle « Mathiez a campé magistralement la vigoureuse silhouette de Robespierre, l’Incorruptible à qui la postérité commence à rendre justice. L’orateur a marqué à plusieurs reprises le parallélisme existant entre les méthodes du grand révolutionnaire, et celles des communistes russes, qui ont su heureusement s’inspirer des exemples de 92, en les adaptant aux circonstances présentes. »

On reconnaît là les « assimilations erronées » auxquelles Fréville attribuera, en 1932, son adhésion erronée au parti.

 Dans L’Humanité du 6 avril 1922 (p. 2), c’est un « magnifique exposé de Mathiez », lors d’une autre conférence qui est salué.

La 13e Conférence de l’Ustica[3] a eu lieu hier soir, sous la présidence de notre ami Marcel Cachin, qui a salué en Mathiez non seulement un historien perspicace, mais un homme d’un grand courage civique. En effet, après le congrès de Tours [1920], alors que beaucoup d’universitaires, effrayés de l’orientation nettement révolutionnaire du Parti, se retirèrent avec les dissidents pusillanimes, Mathiez resta résolument avec les communistes.

Notre camarade A. Mathiez […] montre les différences essentielles entre la dictature bolcheviste qui repose tout entière sur l’antagonisme des classes et la dictature montagnarde qui n’a jamais été complète, qui n’a jamais pu, malgré la volonté de Robespierre, se dégager de l’individualisme. […] Marcel Cachin […] déclare que la gloire de Mathiez sera d’avoir montré sous son vrai jour la grande figure de Maximilien Robespierre “l’Incorruptible”.

À peine deux mois plus tard (L’Humanité, 23 mai 1922, en une et p. 2.), c’est à Victor Méric* que nous devons la première mention (dans le corpus) de Jacques Roux et de Varlet — association également retenue par Fréville pour symboliser le parti des Enragés — comme précurseurs communistes. L’article de Méric traite de Saint-Just, à l’occasion de la publication d’une étude de Marie Lenéru.

On a voulu voir en lui [Saint-Just] un socialiste. C’est une erreur. Les communistes de l’époque, les Varlet, les Jacques Roux, la fraction hébertiste n’eurent pas, avec Robespierre, de plus implacable adversaire. Les bourgeois jacobins n’entendaient pas qu’on touchât à la propriété ; il voyait dans les agitateurs populaires qui réclamaient des lois contre l’accaparement et préconisaient la communauté des biens, des suppôts de l’étranger.

C’est un pavé de taille dans la marre de l’unanimisme robespierro-mathiésiste. Ce qui n’empêche nullement Méric de faire l’éloge du livre de Mathiez La Révolution française (« La Révolution française et la guerre », L’Humanité, 13 juin 1922, en une).

 Le 1er octobre 1922 (en une et p. 2.) c’est encore Méric qui publie un article intitulé « Atrocités bourgeoises », dont l’extrême violence vise, semble-t-il, davantage la Terreur que toute autre cible. Il s’agit, en gros, d’une défense de la Tcheka russe, considérée comme un mal nécessaire, et surtout négligeable comparée aux atrocités des Carrier et cie, dénoncées par Babeuf « le premier communiste ». La bourgeoisie renie son passé terroriste… À noter, à la fin du troisième alinéa la mention de Jacques Roux en tant que « communiste » :

Le pharisaïsme des bourgeois républicains, héritiers et bénéficiaires de la plus abominable terreur qui ait pesé sur la France, déroute la raison. Ces braves humanitaires ne connaissent donc pas leur histoire ; ils ignorent les prouesses des “grands ancêtres” et comment la République — leur République — s’est fondée dans les massacres et parmi des flots de sang.

Ah ! ils n’y allaient pas par quatre chemins, les ancêtres vénérés ; ils ne se payaient pas de mots ; ils ne boudaient pas à la besogne. […] [Méric cite Amar, Collot d’Herbois, Fouché, Carrier, Lequinio, Tallien, Fréron, etc.]

Remarquez que je ne parle que de la terreur “légale”. Car pour le reste !… les massacres de septembre, à l’Abbaye, aux Carmes, à la Force, au Châtelet, à la Conciergerie et même à Bicêtre et à la Salpêtrière, avec accompagnement de soûleries, d’exploits obscènes, de dépeçages de cadavres… […]

Ces massacres organisés soulevaient le socialiste Babeuf d’indignation. Personne, d’ailleurs, ne pouvait se flatter d’y échapper : les révolutionnaires comme les autres, les communistes tels que Jacques Roux et ses amis comme les girondins et les royalistes. […]

Du point de vue de la terreur et du sang versé, la Révolution russe n’est qu’un jeu d’enfant à côté de la nôtre.

Indignez-vous, braves bourgeois du vingtième siècle, petits-fils des féroces jacobins. Publiez des volumes pour flétrir ce que vous appelez les atrocités bolchévistes. Mais, avant, vous feriez peut-être bien de laver tout le sang que vos glorieux grands-pères vous ont laissé sur les mains.

Une fois Mathiez parti

 Dans L’Humanité du 4 mai 1923 (en une) Marcel Martinet* livre un vibrant éloge de Jean Jaurès, auteur d’une Histoire socialiste de la Révolution française, qui a été rééditée avec un appareil de notes dû à Albert Mathiez. Le mérite de Jaurès serait, c’est moi qui résume, d’avoir décollé de la Révolution l’étiquette « bourgeoise » en tant qu’elle serait infamante et réductrice.

Jaurès « ici excellent humaniste et excellent marxiste en même temps », excusez du peu ! est « fidèle à la conception matérialiste de l’histoire pleinement comprise ».

Personne ne conteste que la Révolution française a marqué l’avènement social de la bourgeoisie, le peuple n’ayant eu d’autre profit que l’honneur de s’être brûlé les doigts à retirer, pour elle, les marrons du feu. Ce qui est abusif, ce contre quoi Jaurès proteste, c’est l’assimilation de la bourgeoisie révolutionnaire à notre bourgeoisie contre-révolutionnaire. C’est l’idée que la révolution n’a été, et consciemment de la part de la bourgeoisie, qu’un leurre pour le peuple, et que son souvenir n’a pour lui rien de réchauffant, rien de nourrissant.

Mathiez, éditeur de Jaurès, qui à cette date a quitté le parti communiste, n’est mentionné que pour recevoir une pique, et la mention « robespierriste » semble bien vaguement péjorative : « Comment d’ailleurs remuer sans passion cette cendre brûlante ? Quel écrivain l’a pu, le pourra jamais ? Ce n’est pas, en tout cas, le robespierriste Mathiez, qui a revu la présente édition, et qui n’a pu se retenir de rectifier dans ses notes les passages qu’il estimait injustes envers son héros ou injustement favorables à Danton, héros préféré de Jaurès. »

Le 13 mai suivant (p. 4), Martinet récidive dans un article intitulé « Le quatrième tome de l’histoire socialiste de Jaurès. La Naissance révolutionnaire de la République. » Nouvel éloge du « marxiste » Jaurès, et plus la moindre mention de Mathiez. Ni Jacques Roux ni les Enragés en général ne sont mentionnés dans ces deux articles.

Quatre ans plus tard, le 20 mars 1927 (p. 4) retour en grâce de Mathiez via un article d’Henri Barbusse, écrivain célèbre, qui salue la parution de La Vie chère et le Mouvement social sous la Terreur de Mathiez, publié en février de la même année :

Tous ceux qui cherchent avec raison à s’éclairer, en vue de la lutte présente et future, avec les exemples du passé, ont le devoir de profiter de la vaste, patiente et intelligente documentation d’Albert Mathiez.

L’article comporte une longue citation approbative de Mathiez, sur plus d’une colonne et demi (sur 7), et une mention plutôt anecdotique des Enragés : « Ce fut également en vain que les Montagnards, en possession du pouvoir à leur tour, essayèrent de parer à la situation en faisant quelques concessions aux Enragés qui réclamaient la taxation. »

Toujours en 1927, L’Humanité du 22 août (p. 2) publie dans sa rubrique éphéméride « La révolution dans l’histoire », pour la date du 22 août 1793, une évocation de l’arrestation de Roux, d’après les Actes de la Commune de Paris. La version « officielle » ainsi reproduite n’est, assez étrangement, ni discutée ni commentée :

Jacques Roux est accusé, entre autre friponneries, d’avoir distrait la majeure partie d’une collecte faite au corps électoral en faveur d’une infortunée. […]

[La Commune] arrête, en outre, qu’il sera recueilli, tant dans les registres du Conseil que dans ceux du corps électoral et des Jacobins, tous les faits à la charge de Jacques Roux, lesquels seront envoyés à la police.

On imagine l’étonnement, voire le désarroi, d’un abonné de l’Humanité à qui est assené sans mise en perspective cet acte d’accusation d’un révolutionnaire qu’on lui présentait comme un précurseur « communiste » cinq ans plus tôt. Lire la suite →

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Contre Mathiez, Jacques Roux en «héros stalinien» ?

20 lundi Jan 2014

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Documents»

≈ Commentaires fermés sur Contre Mathiez, Jacques Roux en «héros stalinien» ?

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Albert Mathiez, Communisme, Florence Gauthier, Jacques Roux, Jean-François Varlet, Républicaines révolutionnaires, Serge Aberdam, Théophile Leclerc

Disposant d’une édition en reprint de l’ouvrage d’Albert Mathiez de 1928 La Réaction thermidorienne, j’avoue n’avoir pas prêté une attention particulière à la réédition de 2010 — excellente initiative d’Éric Hazan aux éditions La Fabrique — avec une présentation de Yannick Bosc et Florence Gauthier, dont Serge Aberdam* m’a judicieusement recommandé la lecture.

Florence Gauthier poursuit là une entreprise de (re)construction de Robespierre en héros positif de la révolution sociale, au programme plus radical que tout autre, à la légitimité impeccable quelque soient ses virevoltes (ainsi retiendra-t-on à son crédit son « opposition » à la peine de mort, nullement entamé par les assassinats légaux auxquels il a prêté la main), et qui plus est d’une parfaite « galanterie démocratique » (dont les citoyennes républicaines révolutionnaires se seraient bien passé de subir les manifestations !).

Il est assez logique qu’Albert Mathiez, lui-même d’un robespierrisme assez peu nuancé, lui paraisse utile à remettre au goût du jour. C’est sans doute une qualité de plus d’avoir été membre, entre 1919 et 1923, du parti communiste, de l’avoir quitté, et d’avoir subi par la suite les critiques des idéologues staliniens.

J’ai récemment, dans ma présentation à la réédition chez Libertalia du livre de Daniel Guérin Bourgeois et bras-nus, rappelé à quel point les débats historiens et politiques ou idéologiques sur la Révolution française s’entrecroisent, au point qu’il est impossible de faire le départ entre ce qui relève d’une relecture historienne et ce qui relève d’un changement de ligne idéologique. On a pu voir ainsi un historien proche du parti communiste (Soboul) se faire tancer par les idéologues soviétiques pour avoir, en quelque sorte, « laissé le champ libre » à un historien trotskiste (Guérin).

Antistalienne convaincue — c’est une justice qu’on peut lui rendre — Florence Gauthier veut s’opposer à un économisme mécaniste justifié par Marx, qui fixe des stades historiques inéluctables au développement des sociétés humaines[1]. Par ailleurs d’un robespierrisme passionnel (au sens amoureux, donc irrationnel, du terme), elle récuse l’idée d’une « révolution bourgeoise », réellement existante et souhaitable, qui aurait dû borner les espérances et les pratiques des travailleurs du XVIIIe siècle, notamment des paysans, et qui viendrait a posteriori dévaluer la position de Robespierre. C’est une vision discutable, mais très stimulante, au moins dans sa première caractéristique ci-dessus rappelée. Les subtilités de cette position anti-économiste et plus encore son articulation avec le robespierrisme passionnel ne sont pas toujours évidentes à saisir, comme Éric Hazan en a donné une malheureuse illustration dans son Histoire de la Révolution, récusant la notion de « révolution bourgeoise » comme il avait cru comprendre qu’il était bon de le faire, puis renonçant dans le même mouvement à toute idée de lutte des classes, et se trouvant de ce fait sans aucun moyen d’analyser des événements qu’il regrette (la liquidation des hébertistes et des Enragés), et dont Florence Gauthier semble s’accommoder sans état d’âme.

Comme Mathiez, cette dernière ne peut en effet prendre en considération une quelconque « gauche » de Robespierre, ou un embryon de prolétariat réel lequel viendrait vider de son contenu la générosité supposée de Robespierre à l’égard d’un « peuple » abstrait.

La réédition de La Réaction thermidorienne lui permet d’avancer un pion assez « original », en remettant en lumière un texte oublié dans lequel — contre Mathiez et contre Robespierre — un journaliste stalinien, Jean Fréville de son nom de plume[2], fait de Jacques Roux et Varlet des héros prolétariens dans le journal L’Humanité :

« Quand se forma à Paris, autour de Varlet et de Jacques Roux, le parti des Enragés qui réclamait la guillotine pour les accapareurs, — parti que nous, communistes, saluons comme le porte-parole des ouvriers parisiens de 1793, — Robespierre le combattit. »

Compromettre dans les années 2000 — en utilisant les analyses, d’ailleurs exactes sur ce point, du stalinien Fréville en 1932 —, les Enragés Roux et Varlet, avec Thorez, Staline et le Goulag, reconnaissons que c’est un joli bluff de propagande !

Lisons Gauthier et Bosc (p. 21) : « Fréville, qui n’est pas historien, mesure le travail de Mathiez à l’aune de la version stalinienne qui fait de Varlet et de Jacques Roux les “porte-parole des ouvriers” que Robespierre aurait combattus [suit le passage de Fréville reproduit ci-dessus]. Cette interprétation est fantaisiste : Varlet et Jacques Roux n’ont en effet jamais cherché à se rapprocher pour former un groupe, mais le nouveau dogmatisme avait besoin d’un embryon de “parti prolétarien” pour étayer sa thèse de la “révolution bourgeoise” et n’hésita pas à le fabriquer de toutes pièces. »

À strictement parler, on ignore largement dans quelle mesure Varlet et Roux ont « cherché à se rapprocher ». Encore faut-il rappeler ce que l’on sait, c’est-à-dire qu’ils se sont effectivement rapprochés, et Leclerc avec eux, peut-être sans l’avoir « cherché », au moment de la rédaction du « Manifeste des Enragés », et lors de l’insurrection des 31 mai, 1er et 2 juin 1793. Qu’ils n’aient jamais formé un parti, au sens bolchevique du terme, est évident (sur ce point, je renvoie à Notre Patience est à bout (IMHO, 2009). Remarquons que nous ignorons si Fréville emploie l’expression « le parti des Enragés » autrement que comme équivalent de « l’ensemble des forces qui, autour des Enragés, réclamaient etc… » Remarquons surtout qu’il est maladroit d’opposer à Mathiez l’idée d’un « parti des Enragés », puisqu’il l’utilise lui-même, au moins dans La Vie chère et le mouvement social sous la Terreur (1927).

Bien plus, il dit dans cet ouvrage le contraire, mot pour mot, de ce que Gauthier et Bosc affectent comme position commune avec lui pour mieux l’opposer à Fréville : « Autrefois, Varlet et Jacques Roux agissaient d’ordinaire isolément. Maintenant [fin mai- début juin 1793] ils sont unis et se concertent. Il est significatif à cet égard qu’au moment de l’arrestation de Varlet le 24 mai, ce soit Jacques Roux qui rédige la pétition des Gravilliers pour sa mise en liberté. Il est significatif aussi que, dès le principe, ni Varlet, ni Jacques Roux, ni Leclerc ne se déclarent satisfaits des résultats de l’insurrection. […] Tous se passa comme si ces trois hommes, Varlet, Jacques Roux et Leclerc, s’étaient effectivement concertés. (pp. 207-208) »

On vérifie une fois de plus que les usages idéologiques de l’histoire s’accommodent mal de la rigueur scientifique.

Plus généralement, faut-il déduire de l’article nécrologique que je reproduis intégralement ci-dessous une sanctification-confiscation stalinienne, donc assez tardive, de Jacques Roux et des autres figures du courant des Enragés ? Ce serait, là-encore, une simplification. Il faut, pour le vérifier, considérer la manière dont Roux et les Enragés apparaissent dans le journal L’Humanité, au fil des années. Ce sera la matière du prochain article mis en ligne.

Revenons pour l’instant au texte de Fréville, dont on retiendra l’extrême sévérité à l’égard de Mathiez, égaré au PC à la suite d’ « assimilations erronées », comprenez : entre la Révolution russe et la Révolution française, ou plus précisément entre bolcheviques et robespierristes. Sévérité qui ne recule pas devant des outrances manifestes, certes dans le ton de l’époque, comme lorsque l’auteur tente, par un « raisonnement » aussi odieux que tortueux à rapprocher Mathiez du fascisme : « Mathiez s’apparente au “jacobin” Herriot, il est le grand homme des jeunes radicaux dont la phraséologie démagogique fraie la voie au “Comité de Salut Public” bourgeois et au fascisme. »

___________

*Serge Aberdam, dont je profite de l’occasion pour signaler, à propos de Jacques Roux, l’article intitulé «Critiquer la Constitution de 1793 du point de vue de l’humanité souffrante, est-ce nécessairement prendre un parti extrême ?», dans «Extrême» ? Identités partisanes et stigmatisation des gauches en Europe (XVIIIe-XXe siècle), Presses universitaires de Rennes, 2012, sous la direction de M. Biard, B. Gainot, P. Pasteur & P. Serna.

* * *

Mathiez, historien de la Révolution française

par Jean Fréville

L’Humanité, 8 mars 1932, rubrique « Les Livres », p. 4.

Albert Mathiez est mort il y a dix jours, frappé d’une congestion cérébrale en professant son cours à la Sorbonne. Il s’était consacré à l’étude de la Révolution française.

Mathiez fut un démocrate petit-bourgeois, un jacobin pétrifié en dehors du mouvement de l’histoire vivante. Des assimilations erronées l’amenèrent dans les rangs du Parti communiste au moment de la vague révolutionnaire qui suivit la guerre. La Révolution russe l’attirait, il l’admira sans la comprendre, confondant la dictature des sans-culottes avec la dictature du prolétariat. Le socialisme victorieux en URSS le détacha de l’URSS. Quand l’historien Tarlé, mêlé au procès du parti des industriels, fut arrêté à Moscou en 1930, Mathiez mêla sa voix aux imprécations « démocratiques » des ennemis du prolétariat international. Sur le champ de bataille de l’histoire, il s’était depuis longtemps rangé aux côtés des défenseurs de la propriété privée.

Il a mené — c’est un de ses mérites — la lutte contre les mensonges de l’histoire officielle, contre Michelet ennemi de Robespierre, contre Aulard apologiste de Danton. Il s’est acharné à crever la légende dantonienne, mise en honneur par Auguste Comte et l’école positiviste, la légende de Danton canonisé depuis 1890 dans les universités de la IIIe République. Car pour la bourgeoisie impérialiste, Danton, l’aventurier vénal, symbolise le patriotisme et l’union sacrée.

On a loué Mathiez de n’avoir pas omis le facteur économique dans l’histoire. Son ignorance du marxisme, sa méconnaissance du matérialiste dialectique ne lui ont pas permis de discerner la dynamique du développement des sociétés. Il a borné son horizon politique à la démocratie bourgeoise. Son « jacobinisme », à l’époque de l’impérialisme, recouvre un contenu réactionnaire. Mathiez s’apparente au « jacobin » Herriot, il est le grand homme des jeunes radicaux dont la phraséologie démagogique fraie la voie au « Comité de Salut Public » bourgeois et au fascisme.

Mathiez, hypnotisé par la Révolution française, voit en elle un fait définitif dont l’histoire n’aura qu’à dérouler les conséquences. Il appelle quelque part Babeuf « le disciple et l’héritier de Robespierre ». Dans son désir de lier le prolétariat à la bourgeoisie, il écrit que « le droit ouvrier puise à la même source et à la même origine que le droit bourgeois ». En ce sens, il restera l’un des historiens aimés du réformisme.

Comme Jaurès, il est persuadé que « la démocratie a, par elle-même, une vertu socialiste », — bien qu’il traite de factieux les ouvriers du faubourg Saint-Antoine descendus dans la rue à l’appel des Enragés ou d’Hébert. Sans lui faire endosser les erreurs de jugement de l’Histoire socialiste de la Révolution française de Jaurès, lequel « élargit » Marx à l’aide de Plutarque et de Michelet, on doit souligner que Mathiez considère le socialisme comme l’extension de la démocratie. Il n’admet le prolétariat que comme un allié et un appendice de la bourgeoisie en lutte contre ses ennemis.

« Tout le terrorisme français, a écrit Marx dans un article de la Neue Rheinische Zeitung en 1848, ne fut qu’une manière plébéienne d’en finir avec les ennemis de la bourgeoisie, l’absolutisme, le féodalisme et l’esprit petit-bourgeois ».

Pour Mathiez, tout le terrorisme français, toute la Révolution, c’est Robespierre. Il donne ainsi une analyse fausse des forces motrices de la Révolution. Il masque l’autre face du jacobinisme, sa face réactionnaire, tournée, pleine de menaces vers le prolétariat et l’hébertisme. Il ne le montre que dans sa lutte contre la noblesse, et non dans sa répression contre le quatrième État.

Mathiez prend la défense des Montagnards contre les Girondins. Ceux-ci étaient des propriétaires imbus du sentiment des hiérarchies sociales, enrichis par le commerce des  biens nationaux et des denrées.

« Les Girondins, écrit Mathiez, étaient-ils dans leur droit en confondant les Montagnards avec les communistes ? Les communistes ne formaient pas un parti. C’étaient des individus isolés, sans lien les uns les autres. La Commune avait juré de respecter les personnes et les propriétés. Robespierre répudia formellement le communisme. Il traita la loi agraire “d’absurde épouvantail présenté à des hommes stupides par des hommes pervers”… Sur ce point, Robespierre n’a jamais varié. Il a toujours considéré le communisme comme un rêve impossible et insensé. Il voulait mettre des bornes au droit de propriété, en prévenir les abus. Il ne songea jamais à le supprimer[3]. »

Quand se forma à Paris, autour de Varlet et de Jacques Roux, le parti des Enragés qui réclamait la guillotine pour les accapareurs, — parti que nous, communistes, saluons comme le porte-parole des ouvriers parisiens de 1793, — Robespierre le combattit. « La liberté, s’écriait Jacques Roux devant la Convention, le 25 juin 1793, la liberté n’est qu’un vain fantôme quand une classe d’hommes peut affamer l’autre impunément ! ». Le mouvement prenait un caractère nettement antijacobin. les ouvriers pillaient les magasins, se faisaient livrer par force le savon, le sucre, la chandelle, à des prix qu’ils fixaient. « On put craindre par instants, écrit Mathiez, qu’à la Révolution politique (?) succédât la Révolution sociale. Après les nobles, après les prêtres, après le roi, les riches auraient aussi leur tour[4] ».

La bourgeoisie constitua un front unique contre le prolétariat. Danton propose que les propriétés soient éternellement maintenues. Marat accuse les pétitionnaires ouvriers d’être des aristocrates déguisés, de stipendiés du royalisme (le vieil argument du communisme faisant le jeu de la réaction ne date pas d’hier). La Convention vote, le 18 mars 1793, la peine de mort contre quiconque proposerait la loi agraire, c’est-à-dire le partage des terres…

Mathiez est entièrement du côté de la conservation bourgeoise contre le prolétariat révolutionnaire. « Robespierre fournit en ce mois d’août 1793 un effort admirable. Il rendit d’abord à la Révolution française un signalé service en la débarrassant de la démagogie des Enragés[5] ». Robespierre reprend contre eux les calomnies de Marat et fait jeter Jacques Roux en prison, où il se suicidera…

Cependant, la colère populaire grondait.. La poussée hébertiste d’août et de septembre 1793 met la Terreur à l’ordre du jour, fait adopter la loi des suspects, arrache la taxe de toutes les denrées de première nécessité (le maximum), impose la création d’une armée révolutionnaire pour les réquisitions, sauve en un mot la République.

« C’est la guerre ouverte des riches contre les pauvres, ils veulent nous écraser, eh bien ! il faut les écraser nous-mêmes », déclare Chaumette. Hébert, dans le Père Duchesne, appelle ses troupes, les serruriers et les ouvriers du bâtiment, à l’insurrection.

La Révolution se développe, la lutte contre la religion et « les préjugés de dix-huit siècles » s’intensifie. Sous la pression des masses, les boulangeries deviennent presque partout municipales, il n’y eut plus qu’une seule espèce de pain, le pain de l’Égalité. En décembre 1793, la carte de pain est introduite à Paris, puis la carte de viande, de sucre, de beurrée. Les prolétaires, jusque-là dédaignés, sont adulés ; pour plaire aux sans-culottes, les bourgeois troquent le froc contre la petite veste courte, la carmagnole.

Le blason est enfin vaincu,

Le rabat branle dans le manche,

La théologie est à cul,

La loi ne veut plus de dimanche ;

Tout leur fanatique opium

Et leur dominus vobiscum

Ne valent pas le maximum.

Cette chanson hébertiste en l’honneur de la taxation des denrées — on y trouve l’image que reprendra Marx dans sa phrase célèbre sur « la religion opium du peuple » — laisse éclater la joie des prolétaires qui veulent une égalité vraie et non verbale. Les « excès » provoquent la réaction des classes possédantes, qui feront de Robespierre l’exécuteur de leurs volontés. L’athéisme et le matérialisme du Père Duchesne sapent les « bases morales » de la société, c’est « l’Incorruptible » qui sera chargé d’en finir avec ces ennemis de l’ordre social et de la Vertu.

Contre Hébert, il fera dissoudre une grande partie des armées révolutionnaires départementales ; il affaiblira l’armée révolutionnaire de Paris ; et quand Hébert et Carrier en appelleront à l’insurrection, le 2 mars 1794, Robespierre fera arrêter les « conjurés » qui seront exécutés le 24 mars.

La destruction de la « faction hébertiste », comme s’exprime Mathiez, fut le coup mortel porté à la dictature jacobine elle-même. Robespierre a brisé la force motrice la plus conséquente de la Révolution, il a préparé, avec sa propre fin, la victoire de la réaction thermidorienne.

Mathiez ne voit pas tout cela. Il ne comprend pas les lois du développement de la Révolution, pas plus que les fautes ni les faiblesses du jacobinisme.

En approuvant sans réserves les actes des jacobins, en renonçant à les critiquer, en se plaçant dans la première grande bataille du prolétariat moderne contre les classes possédantes du côté de la bourgeoisie, en condamnant les fossoyeurs futurs de « l’Ancien Régime » capitaliste, Mathiez trahit véritablement les traditions révolutionnaires des Jacobins. Il se place objectivement du côté de l’Ancien Régime capitaliste, il le défend dans ses conquêtes et dans ses œuvres contre les premières vagues de la révolution prolétarienne.


[1] Voir Gauthier, Florence, « De Mably à Robespierre. De la critique de l’économique à la critique du politique », in Thompson, E. P., et autres, La Guerre du blé au XVIIIe siècle, 1988 [Voir également l’introduction au vol. par F. Gauthier & Guy-Robert Ikni.]

[2] Fréville, Jean. Pseudonyme d’Eugène Schkaff (1895-1971). Avocat et journaliste. D’origine russe ; sa famille émigre en France, en 1903. Il rencontre Maurice Thorez, en 1927, à Moscou, et adhère au Parti, sans doute la même année. Entre à l’Humanité en 1931. Probablement l’un des nègres de Thorez pour son autobiographie, Fils du peuple. Chef adjoint de son cabinet, lorsque celui-ci est nommé ministre, en novembre 1945. Voir la notice de Nicole Racine dans le dictionnaire Maitron.

[3] Mathiez, La Révolution française, t. II, p. 64-67. [Note de Fréville]

[4] Mathiez, La question sociale pendant la révolution française, p. 29. [Note de Fréville]

[5] Mathiez, La Révolution française, tome III, p. 31. [Note de Fréville]

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