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LA RÉVOLUTION ET NOUS

~ le blogue historien de Claude Guillon

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Archives de Tag: Républicaines révolutionnaires

Recension de mon “Robespierre” dans les AHRF ~ par Martine Lapied

21 mercredi Sep 2022

Posted by Claude Guillon in «Bibliothèque»

≈ Commentaires fermés sur Recension de mon “Robespierre” dans les AHRF ~ par Martine Lapied

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Annales historiques de la Révolution française, Éditions IMHO, Dames de la Halle, Dominique Godineau, Martine Lapied, Républicaines révolutionnaires, Reine Audu, Reine d'Hongrie, Robespierre

J’ai le plaisir de lire dans la dernière livraison des Annales historiques de la Révolution française, sous la plume de Martine Lapied, historienne spécialiste des femmes pendant la Révolution, une recension – piquante mais légitime – de mon Robespierre, les femmes et la Révolution. Je n’y répondrai pas point par point ici, en étant incapable en ce moment pour des raisons de fatigue intellectuelle (entre autres).

Le seul trait qui me blesse, et qui forme hélas la conclusion de l’article est le reproche de sous-estimer le travail de Dominique Godineau. La bibliographie de mon Robespierre est très ciblée sur le sujet du livre, alors que Dominique sera dûment saluée dans l’introduction de mon livre sur les clubs de femmes (elle l’est déjà dans Notre patience est à bout et souvent été ici-même) et elle sera abondamment citée en bibliographie).

J’ai écris à D. Godineau pour lui faire part de mon émotion ; j’y ajoute mes regrets si elle-même s’était sentie maltraitée…

Je faisais allusion à mon état de santé : dan mon état normal j’aurais été blessé et en colère ; là, j’ai dû m’allonger un moment pour calmer mes palpitations (je n’en fais pas grief à Martine Lapied !). Nous sommes peu de choses.

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Olivier Blanc me “répond” à propos des Citoyennes républicaines révolutionnaires

24 lundi Août 2020

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Bêtisier»

≈ Commentaires fermés sur Olivier Blanc me “répond” à propos des Citoyennes républicaines révolutionnaires

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Claire Lacombe, Clubs de femmes, Olivier Blanc, Pache, Républicaines révolutionnaires, Société des études robespierristes

C’est un peu par hasard (on se demande à quoi sert d’avoir une alerte Google, soit dit en passant) que je découvre une notice sur Claire Lacombe dans le cours de laquelle M. Olivier Blanc fait allusion à la critique publiée ici-même d’un texte où il affirmait – sans apporter le moindre début de preuve – que la Société des Citoyennes républicaines révolutionnaires avait été crée par la fille du maire de Paris Pache, lequel pouvait ainsi la manipuler à son aise.

Voir mon article intitulé Entre héroïsme et démagogie l’engagement politique des femmes paru en 2017 : un compte rendu violemment critiqué sur le site en ligne d’ un historien à bonnet rouge, M. Claude Guillon, spécialiste des enragées, [qui] cherche désespérément à faire croire – après Mme Godineau célèbre auteur d’une thèse robespierriste très discutable et évidemment très vantée par les membres de la Société des Études robespierristes – que les « citoyennes tricoteuses » auto-proclamées républicaines et révolutionnaires, n’étaient pas du tout instrumentalisées par la Commune de Paris et qu’elles agissaient comme des femmes libres. M. Claude Guillon, qui distribue sans complexes, sur son site dédié aux « femmes de la Révolutions » (celles à piques et bonnets rouges exclusivement), des satisfecit et des bonnets d’âne, est totalement imprégné par l’idéologie post-robespierriste qui le rend malhabile à analyser finement les documents dont nous disposons aujourd’hui sur le rôle, ou plutôt l’utilisation politique des femmes dans les assemblées révolutionnaires de l’époque de la Terreur. […]

Mme Audouin (dont le nom a été déformé en Ardouin), née Pache, participa raconte Carnot, aux réunions de cette Société révolutionnaire de femmes, contribuant fortement à la mobilisation, si elle ne l’a pas initiée à la demande de son père.

Faut-il considérer la dernière phrase du second paragraphe comme un discret pas en arrière? Étant trop malhabile à l’analyse, je m’abstiendrai de trancher.

J’espère que lecteurs et lectrices sentent assez que je viens d’employer le verbe préféré des sociétaires de la SER, dont M. Blanc se fait une représentation qui rappelle délicieusement les feuilletonistes du XIXe siècle et – moins drôlement – les complotistes de toujours, comme on va le vérifier.

Voici l’avertissement qui figure en-dessous de chaque notice publiée par M. Blanc.

Un logiciel «lutte des classes» est appliqué depuis bientôt un siècle à l’interprétation de la Révolution française par une historiographie quasi-officielle, incarnée à une large majorité par les membres cooptés du conseil d’administration anciens et actuels de la Société des Études robespierristes.

Rattrapée par ses mensonges et omissions calculées (entre autres sur la Vendée et la vénalité des Jacobins de l’an II), cette école historique tend encore à ostraciser toute lecture des événements, qui ne serait pas dans la suite des historiographes sympathisants du PCF ou du récent «Front de gauche», depuis Albert Mathiez jusqu’à Albert Soboul et leurs suiveurs actuels de l’Université. On trouvera sur cette base des notes de lecture et références inédites tirées de mes lectures et recherches d’archives (1977-2007). Et plus d’une centaine de notices sur les grandes figures de la Révolution de 1789, notamment, Robespierre, Saint-Just, Danton, Marat, Olympe de Gouges, Pache, Camille Desmoulins, etc. Ma démarche est de mettre en lumière ce qui a été ignoré ou écarté, notamment les questions liées, en l’an II, à la transparence de la vie publique et aux enjeux financiers individuels, aux enjeux géo-politiques dont le rôle de l’Angleterre de Pitt, aux artifices de la démagogie et aux résistances à la violence présentée comme une «nécessité».

À toutes fins utiles.

Que je ne sois pas d’accord avec M. Blanc sur la lutte de classes est de peu d’intérêt. Ce qui est fascinant, par contre, est que sa critique est factuellement fausse parce que totalement hors de saison; la lutte de classes est en effet passée de mode, et surtout chez les admirateurs et continuateurs de Mathiez.

C’est que M. Blanc voit l’historiographie actuelle, la Société des Études robespierristes, l’Université (et peut-être le monde en général?) avec des lunettes qui datent de la fin des années soixante. Pour qui se targue d’«analyser finement» des documents, un tel anachronisme est fâcheux.

Au fond, c’est le même complotisme dont fait étalage M. Blanc, qu’il s’agisse de dépister les manipulateurs des Républicaines révolutionnaires ou de laisser entendre que le bureau de la Société des Études robespierristes dirige l’Université en sous-main. Le pire est que je ne doute pas de sa sincérité…

Foin de mélancolie! Reconnaissons une contribution de notre auteur à l’étude des Enragées: il propose un nouveau portrait de Claire Lacombe.

C’est au moins le troisième qui circule, depuis la banalisation de l’Internet. S’étonnera-t-on que celui-ci ne soit pas plus justifié ni sourcé que ne l’étaient les deux précédents? À moins qu’il s’agisse d’un suspens entretenu à dessein…?

Pour une fois, on ne peut que souhaiter que les sources de M. Blanc soient fiables…

S’il me répond dans une prochaine notice sur Marat ou sur Jacques Roux, je ne manquerai pas de le faire savoir ici. 

Portrait présenté par M. Olivier Blanc comme celui de «La citoyenne Lacombe» (pastel, 1792).

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Idées [contre-]révolutionnaires ~ À propos du livre de Jonathan Israel

29 mercredi Juil 2020

Posted by Claude Guillon in «Bibliothèque»

≈ Commentaires fermés sur Idées [contre-]révolutionnaires ~ À propos du livre de Jonathan Israel

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1793, Albert Mathiez, Albert Soboul, Claire Lacombe, Féminisme, Georges Lefebvre, Hébert, Jacques Pierre Brissot, Jacques Roux, Jean-Baptiste Louvet, Jean-François Varlet, Jonathan Israël, Kåre Dorenfeldt Tønnesson, Lutte des classes, Marat, Olivier Blanc, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires, Robespierre, Théophile Leclerc, Walter Markov

Une «histoire intellectuelle de la Révolution», et pourquoi pas?

Encore que l’affirmation suivante a de quoi éveiller la méfiance:

Conduire un nouvel examen des leaders révolutionnaires semble nécessaire afin de poursuivre l’effort initié par l’approche socioculturelle et, plus spécifiquement, pour mieux intégrer l’histoire sociale avec l’histoire intellectuelle. [p. 21]

Ici (et ailleurs aussi probablement) se pose le problème de la traduction (je n’ai pas pris la peine d’aller vérifier l’édition originale). En effet, «Intégrer l’histoire sociale avec l’histoire intellectuelle» n’a guère de sens en français. Les combiner, oui; intégrer l’une à l’autre aussi. Faisons avec…

Plusieurs affirmations accrochent le regard. Un exemple:

En plusieurs endroits, on vit des comités de “Patriotes” rivalisant d’éloquence tant les hommes de lettres, éditeurs et membres des sociétés y étaient nombreux; ils purent ainsi peser lourdement sur les élections des députés du Tiers état. [p. 53, avec référence au livre de Galante Garrone].

C’est bien possible; cependant, il aurait été honnête de signaler que lors de l’étape précédente, à savoir la rédaction des Cahiers de doléances, l’hypothèse d’une influence décisive des notables a été sévèrement critiquée[1].

Parlant du Cercle social et des tendances philosophiques qu’il oppose au « populisme autoritaire » de Marat et Robespierre, l’auteur évoque l’action du marquis de Villette en faveur des enfants naturels (p. 149), comme exemple de l’action humaniste et réformiste de certains révolutionnaires. Il est bien regrettable qu’il ignore le long et beau texte de Robespierre sur le même sujet[2].

Voici maintenant une formulation sur laquelle le lecteur butte, lequel une fois relevé de sa chute, se demande s’il va poursuivre la lecture entreprise…

Marat et Hébert s’adressaient aux moins éduqués et cultivaient un chauvinisme populiste, une espèce de protofascisme. » [p. 189; je souligne]

Il est tout d’abord extrêmement discutable de mettre ainsi «dans le même sac» Marat, dont les journaux sont rédigés dans une langue simple et compréhensible, mais correcte quant à la grammaire et sans vulgarité, avec Hébert qui pastiche la verdeur populaire à grands renforts de jurons obscènes. De là à les qualifier uniment de protofascistes, c’est-à-dire de premiers fascistes ou de fascistes rudimentaires, pour la seule raison véritable qu’ils sont lus l’un et l’autre par la sans-culotterie, c’est préférer l’idéologie grossière à l’analyse historienne.

Massant ses genoux endoloris, le lecteur se dit qu’il a tout de même payé le livre la bagatelle de 36 € (en francs, c’eut été le prix d’un très beau livre d’art) et, pour calmer sa colère, il s’en va lire la postface à l’édition française.

Or, voici des propos mesurés, mêmes si discutables – dont lectrices et lecteurs anglophones ont donc été privé·e·s:

Ainsi mon approche diverge à certains égards de l’école jacobino-marxiste d’Albert Mathiez, Georges Lefebvre et Albert Soboul ; mais reconnaît également que leurs travaux ont encore beaucoup à offrir et doivent toujours faire l’objet du plus grand respect. Que la Révolution française ait été en partie mue par une guerre de classes est pour moi indéniable puisqu’elle a d’abord pris pour cible, sans jamais cesser l’assaut, le système social aristocratico-ecclésiastique qu’elle cherchait explicitement à détruire. [p. 742]

Ainsi donc, les «moins éduqués» ont tout de même – nonobstant l’influence délétère des protofascistes – joué un certain rôle dans la Révolution… On aurait tort, toutefois, de se rassurer trop vite; en effet:

Ce livre place les mouvements populaires au second plan, en partie parce que je ne pense pas que la recherche ait démontré que leur rôle a été déterminant dans l’élaboration de l’idéologie dominante de la Révolution. Une autre raison explique ce choix: je ne crois pas non plus que les mouvements sociaux et les manifestations de mécontentement populaire, peu importe leur force et leur ampleur, puissent disposer d’une cohésion suffisante et d’une énergie suffisamment durable pour devenir un fondement d’autorité ou inspirer des réformes institutionnelles, susceptibles de provoquer des transformations révolutionnaires significatives de quelque forme que ce soit. [p. 742]

Ici se trouve sans doute le fondement même de la démarche de Jonathan Israel, et le point central de désaccord avec lui. S’il s’agit de constater la «défaite des sans culottes», pour reprendre le titre du livre de Kåre Dorenfeldt Tønnesson, nous pouvons tomber d’accord, mais cet accord est une illusion car J. Israel pense que les sans-culottes ne pouvaient qu’être défaits, parce qu’ils n’étaient pas suffisamment éduqués pour élaborer une idéologie assez forte pour dominer celle de la bourgeoisie. Mais Israel ne s’en tient pas là. Sa position concernant les sans-culottes est après tout proche du simple constat, mais il ajoute qu’aucun mouvement social n’a et ne peut avoir les capacités de fonder un nouvel ordre social.

Voici ce que j’appelle un préjugé de classe, lequel se manifeste d’ailleurs en d’autres occasions dans le livre. L’auteur est prompt à reprendre sans distances des informations chargées de jugements moraux. Ainsi les manifestants qui attaquent l’imprimerie de Gorsas en mars 93 ne sont-ils rien qu’«un groupe de 2 000 à 3 000 voyous » (p. 343). Lors d’une manifestation de femmes à Bordeaux à la même époque: « Ces troubles avaient été préparés avec soin ; des témoins attestèrent avoir vu des jacobins déguisés en femmes dirigeant le cortège » (p. 344). La présence d’hommes déguisés en femmes est un topos d’époque, utilisés par toutes les tendances politiques pour discréditer les manifestations de femmes.

On pourrait discuter encore beaucoup le choix des sources, comme leur utilisation. J. Israel adore Louvet, parce que celui-ci est entré en conflit avec Robespierre. Je comprends que l’on lise et même que l’on utilise les Mémoires du député Jean-Baptiste Louvet de Couvray, mais de là à les prendre pour un évangile où tout n’est que vérité du détail, il y a le même chemin que de la lecture critique à la naïveté.

Parfois, on se perd en conjectures sur ce que l’auteur peut bien trouver d’utile à telles «révélations». Ainsi:

Robespierre devint de plus en plus froid. Jusqu’en février 1794, il avait gardé ses distances, sans paraître replié sur lui-même. Il se montrait régulièrement dans Paris, élégamment vêtu de soie et de lin, bien coiffé. En public, il jouait les observateurs tout en prenant soin d’entretenir des relations, de converser avec d’autres personnalités influentes. Il profitait aussi de ces échanges pour noircir son cahier de notes. [p. 581]

La note indique : Laure d’Abrantès, Salons révolutionnaires, p. 105. Je trouve à la page 6 du texte d’origine (Histoire des salons de Paris, vol. III) de la duchesse d’Abrantès, le passage-source:

Dans le même moment, Robespierre marchait dans Paris élégamment habillé, coiffé avec la plus grande recherche, employant pour sa toilette les essences les plus suaves, les pommades les plus odorantes… son linge était d’une extrême beauté; son jabot, fait d’une dentelle précieuse, était toujours à côté d’un gilet rose, bleu ou blanc, en soie glacée, et légèrement brodé en argent ou en or, et à sa main il portait un bouquet de roses, même en hiver…

Robespierre soignait sa mise. C’est entendu, tout le monde le dit. Mais tant qu’à nous abreuver des niaiseries d’Abrantesques, pourquoi nous priver du parfum, des pommades et des roses. …Même en hiver!

Reprenons pied sur le terrain des idées, puisque c’est celui que revendique notre auteur. En voici une bien bonne (oui, je suis un peu las, je le reconnais, et mon style s’en ressent), censée établir le fait que les brissotins sont la gauche (ce qui n’est pas entièrement dépourvu de logique si Marat est un fasciste):

Pratiquement tous les intellectuels sérieux de l’Assemblée, Levasseur et les montagnards un peu honnêtes admettaient que les brissotins et les philosophistes représentaient bien la gauche. [p. 305]

Certes, je pourrais faire valoir ici qu’au contraire tous les gens «un peu honnêtes» sont de mon avis… mais j’aurais le sentiment d’entrer dans un jeu tout juste bon pour la cour de récréation.

Les Enragé·e·s

D’ailleurs, il est un point qui m’intéresse doublement – parce qu’il concerne l’un de mes sujets de recherches[3] et parce qu’il met en valeur la difficulté de J. Israel à tenir la ligne qu’il a lui-même choisie: la question de l’action des Enragé·e·s.

En effet, Israel manifeste une évidente sympathie pour ces militant·e·s, ce qui ne laisse pas d’étonner.

Voyons ce qu’il écrit de Jacques Roux, avec certes une restriction morale (elle-même plutôt surprenante):

Violemment opposé aux brissotins autant qu’aux montagnards, Roux n’était certes pas un combattant de la liberté [sic]. À certains égards, toutefois, ce zélé prêtre jacobin (et ancien professeur de sciences au séminaire) occupait une vraie position à gauche du robespierrisme : il voulait ardemment défendre les pauvres de la cupidité des capitalistes, des banquiers, des grands marchands. Il dénonçait avec flamme l’exploitation et l’absence de toute aide pour les moins nantis[4]. [p. 505]

Si Brissot incarne la gauche, et Robespierre un «populisme autoritaire», comment situer quelqu’un qui se trouve «à gauche» de Robespierre, mais pas vraiment «à gauche» puisque cette position est monopolisée par les Brissotins? Israel a – parmi les Enragé·e·s – une préférence marquée pour « l’honnête et bienveillant Varlet » (p. 755), «qui pratiquait lui un tout autre type de populisme, plus intègre, et plus proche des Lumières radicales.» (p. 759)

Je ne discuterai pas des fleurs envoyées à Varlet; après tout, il est bien probable qu’il les a méritées. Pour autant, je ne crois pas que Robespierre a été ni moins honnête ni moins intègre que Roux, Varlet, Leclerc, et les Républicaines révolutionnaires.

De toute façon, cela ne nous aide pas à nous retrouver dans notre nuancier politique. À la fin des fins, où situer les Enragé·e·s? Plus près de Brissot que de Robespierre? Une hypothèse qu’ils eussent jugée insultante.

Il est assez évident que, outre leur enthousiasme et la sincérité de leur engagement, ce qui séduit Israel chez les Enragé·e·s… c’est qu’ils deviennent les cibles de Robespierre.

Après les 31 mai – 2 juin 93, « Robespierre écarta tout de suite Varlet, Roux et Jean Leclerc, meneurs sans-culottes véritablement engagés en faveur des prolétaires. Ils pouvaient se réclamer de la rue bien mieux que lui. Les Enragés avaient d’ailleurs immédiatement compris quelle dictature s’annonçait. Ils n’ignoraient rien de la mégalomanie de Robespierre, de sa paranoïa et de son caractère vindicatif. » (p. 484)

Ce dernier hommage rendu à la clairvoyance des Enragé·e·s à propos des risque d’un régime terroriste autoritaire me semble pour le moins exagéré ; ils n’ont mesuré les risques de la concentration des pouvoirs qu’au fur et à mesure qu’elle les atteignait directement (et je ne songe pas à les en blâmer). Quant aux indicateurs qui eussent dû les alerter, le caractère de l’individu Robespierre ne mérite sans doute pas la première place…

En guise de conclusion

Jonathan Israel a-t-il atteint l’objectif qu’il s’était fixé ? La réponse est étroitement liée à la position de chacun·e par rapport aux parti-pris de l’auteur. Qui est convaincu que le peuple ne saurait écrire sa propre histoire – faute d’une orthographe suffisante – se verra confirmé dans ses préjugés par une érudition pléthorique. L’adhésion aux thèses du livre ne peut être qu’idéologique.

Ironie de l’histoire, c’est – nous l’avons vu – l’aimable sympathie de l’auteur pour un courant radical de la Révolution qui vient ôter toute cohérence à sa tentative de redistribuer les rôles politiques, en attribuant aux Brissotins et non plus aux Montagnards celui de la « gauche ».

Israel identifie correctement la question des droits des femmes comme le talon d’Achille de Robespierre (et d’un certain nombre de ses amis), mais – une fois encore – le reproche ne peut être adressé ni à Roux ni à Leclerc (ni à Varlet, dont le «proféminisme» est pourtant plus mesuré), et encore moins aux Républicaines révolutionnaires. L’action militante de ces dernières fait voler en éclats les tentatives d’identifier la Gironde comme le « parti féministe » de la période, comme l’ont tenté ces dernières années Michel Onfray et Olivier Blanc (d’où les attaques venimeuses de ce dernier contre les Républicaines).

Neuf cent trente pages, c’est beaucoup d’arbres coupés pour un si piètre résultat.

Israel Jonathan, Idées révolutionnaires. Une histoire intellectuelle de la Révolution française, Alma/Buchet-Chastel, 2019 (EO : Princeton University Press, 2014), 930 p., 36 €.

Statut de l’ouvrage : acheté en librairie.

_________________

[1] Shapiro (G.), Markoff (J.), « L’authenticité des cahiers de doléances », Bulletin du Comité d’histoire économique de la Révolution française, 1990-1991, p. 19-70.

[2] Robespierre Maximilien, Observations sur cette partie de la législation qui règle les droits et l’état des bâtards, dans Œuvres de Maximilien Robespierre, t. XI, Compléments (1784-1794), Société des études robespierristes, 2007, p. 137-183.

[3] Mon livre Notre patience est à bout est cité comme source à plusieurs reprises.

[4] Je place ici le signalement et la correction d’une erreur, probablement due à une faute de traduction (peut-être de l’auteur lui-même). Il est indiqué p. 505 : « Roux [visé par une campagne de dénigrement] fut exclu des Jacobins et perdit la direction des colleurs d’affiches – fonction importante. » (je souligne). Il s’agit d’une référence au groupe de colleurs d’affiches que la municipalité parisienne payait pour placarder les annonces publiques (ils auraient été 300 ; voir p. 280). J’ignore si Roux eut jamais la responsabilité de ces employés (Markov n’y fait aucune allusion), mais ce que l’on sait c’est qu’il était corédacteur des Affiches de la Commune, et c’est ce poste – en effet important – qui lui fut retiré.

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“Discours prononcé à la Société des citoyennes républicaines révolutionnaires par les citoyennes de la sections des Droits de l’Homme…”

11 lundi Mai 2020

Posted by Claude Guillon in «Articles»

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1793, Claire Lacombe, Clubs de femmes, Jean-François Varlet, Républicaines révolutionnaires, Section des Droits de l'Homme

Cliquez sur les images pour les AGRANDIR.

Cette brochure, qui vient d’entrer dans ma collection, est lisible sur Gallica, mais dans une version plus courte. En effet, l’exemplaire numérisé par la BN ne comporte pas le «discours prononcé par le citoyen Cortier, âgé de huit ans et demi».

C’est une pratique courante durant la période révolutionnaire de faire s’exprimer à la barre des enfants ou de jeunes adolescents. Certains clubs féminins ont même soin de se faire représenter par de très jeunes filles.

Je n’ai pu trouver aucune information sur le jeune citoyen Cortier. Le nom ne se trouve ni dans la liste des citoyennes républicaines révolutionnaires recensées par Dominique Godineau ni dans le Répertoire du personnel sectionnaire de Monnier & Soboul.

J’ai montré dans Notre patience est à bout pourquoi ce texte ne doit pas être considéré comme un «texte de femmes», malgré son intitulé, et comment nous connaissons son auteur: Jean-François Varlet, Enragé et militant en vue de la section des Droits de l’Homme.

Le fait que les Républicaines révolutionnaires ont décidé de faire imprimer ces deux discours montre qu’elles étaient sensibles à la démarche des femmes de la section des Droits de l’Homme. Je dirais: davantage peut-être à la démarche, cohérente avec leur stratégie de relations avec les sections et les sociétés populaires, qu’au texte du discours lui-même, reflet du «féminisme» assez mesuré de Varlet.

Le «F» qui précède la nom de Claire Lacombe comme présidente, au moment de la cérémonie procède peut-être d’une erreur de l’imprimeur; à moins qu’elle signifie tout simplement «Femme», comme c’est le cas dans de nombreuses pétitions, mais on comprend mal pourquoi seule Lacombe serait ainsi qualifiée.

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“Jacobins !” la compil’ ~ d’Alexis Corbière

23 jeudi Avr 2020

Posted by Claude Guillon in «Bibliothèque»

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Alexis Corbière, Christine Le Bozec, David V. Erdman, Jean-Baptiste Belley, John Oswald, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires, Yves Blavier

Ci-devant professeur d’histoire et aujourd’hui député de «La France insoumise», Alexis Corbière a naguère produit un petit (17 x 12 cm) pamphlet intitulé Robespierre reviens ! (coécrit avec Laurent Maffeïs). C’est à un travail d’une autre ampleur et d’une autre ambition qu’il s’est attelé pour ce Jacobins ! Les inventeurs de la République, publié chez Perrin en 2019.

Parmi les neuf personnages traités, une seule femme : Pauline Léon.

«Qui se souvient de Pauline Léon ?» interroge Corbière dans une veine très «Michel-Onfray». Au moins son biographe, serais-je tenté de répondre. Sans compter les quelques milliers de lecteurs des deux livres où elle tient une place de choix et les mille cinq cents et quelques lectrices et lecteurs de mon blogue La Révolution et nous.

Précisons-le d’entrée: Corbière ne saurait être accusé de pillage, puisqu’il me cite dès la deuxième page du chapitre consacré à Pauline.

Il se trouve cependant en face d’une réelle difficulté: comment se donner l’air de révéler un personnage quand il existe des publications sur lui, toutes du même auteur, que l’on ne peut que paraphraser?

Le procédé – il n’est pas original – consiste à subtilement dévaloriser le travail du devancier, non pas d’un point de vue historien ou intellectuel (il faudrait dans ce cas pouvoir faire mieux et donc travailler les archives, ce que Corbière n’a pas fait), mais par des signaux que je qualifierai de psychologiques.

Première mention de mon travail, en note: «Un petit ouvrage collecte les éléments qui permettent de reconstituer l’action de Pauline Léon et de Jean-Théophile Leclerc».

Un petit ouvrage?

22 x 14,8 cm, et 255 pages.

Comme il ne peut logiquement s’agir de critiquer ce livre – que Corbière va paraphraser – et que ni son format ni son volume ne méritent la qualification de « petit », on doit déduire que Deux Enragés de la Révolution rapetisse avec le temps, ayant été publié en 1993.

Cette impression est d’ailleurs renforcée par le voisinage de la note suivante à propos du livre de Christine Le Bozec, publié lui en 2019, et qualifié improprement de «synthèse récente». Je dis improprement parce que cette prétendue «synthèse» n’apporte rien de neuf (j’en ai traité ici).

Deuxième mention de mon travail, à propos d’un texte de Mathiez, reproduit ici-même, sur La Révolution et nous, dont l’adresse Internet est indiquée.

Troisième mention: «Les rares éléments sur la vie de Pauline et Théophile après 1794 ont été collectés par Claude Guillon». Suit la référence de mon article dans les AHRF.

Que voulez-vous, c’est ainsi! il y a des gens qui produisent des synthèses et puis des malheureux comme moi qui «collectent». J’ai l’horrible pressentiment que les seconds travaillent dans l’ombre pour permettre aux premiers de publier…

Or, puisque Alexis Corbière fréquente mon blogue, il ne peut ignorer mon livre Notre patience est à bout, dont la dernière édition augmentée (2016) contient justement un long ajout de 25 pages sur Théophile Leclerc après 1794. Que du neuf, du jamais publié, du travail aux archives Messieurs-Dames!

Mais l’inconvénient dudit livre (21 x 15 cm et 243 pages) est qu’il est toujours disponible en librairies, qu’il n’a donc pas assez réduit, et que le mentionner c’est y renvoyer le lecteur. Corbière n’en souffle donc mot.

Dans le chapitre qui lui est consacré, Alexis Corbière ne donne donc aucune information à propos de Pauline Léon qui ne vienne directement de mon travail (et pour cause, je suis le seul à avoir travaillé sur elle ces trente dernières années).

À chaque fois qu’il est tenté de s’écarter de ce qu’il lit chez moi, il s’égare dans des suppositions oiseuses, étayées par rien, annoncées comme plausibles alors qu’elles ne le sont pas: Pauline aurait pu porter le costume d’amazone (non! parce que les femmes qui l’ont porté se comptent sur les doigts d’une main et que la presse en a fait ses choux gras); Pauline aurait pu participer à la marche sur Versailles (non! parce qu’elle aurait mis en avant ce fait d’armes, considéré à l’époque où elle réclame sa libération comme «la» manifestation des héroïnes françaises, précisément opposées aux méchantes Républicaines révolutionnaires).

Est-ce la nécessité pénible de paraphraser? Au lieu d’écrire simplement que Pauline Léon a cofondé la Société des citoyennes républicaines révolutionnaires, Corbière écrit d’abord (p. 132) qu’elle «adhère» au club, ce qui est une énormité, puis (p. 140) qu’«elle joue d’emblée un rôle majeur à la direction» de celui-ci, ce qui est le moins que l’on puisse dire.

Même défaut de relecture (p. 141) quand la première phrase d’un alinéa dit que «C’est sans doute au début de 1792 que la jeune femme fait la connaissance de [Leclerc]», tandis que la dernière phrase du même alinéa conclut: «Pauline et lui se sont sans doute rencontrés au plus tard début février 1793.» Vous me direz que début 1792 peut être considéré comme le «au plus tard» de 1793. Ben voyons!

Le chapitre suivant traite d’un personnage assez mal connu, John Oswald, dont Corbière relève que la seule biographie moderne (1986) est l’œuvre d’un historien américain, David V. Erdman.

C’est hélas ignorer – dans l’un ou l’autre sens du verbe – l’édition qu’avait réalisée en 1996 Yves Blavier du Gouvernement du peuple, avec pas moins de 45 pages d’introduction (Les Éditions de la Passion; voir couverture ci-contre).

Autre méconnu le premier député noir, Jean-Baptiste Belley. Les autres figures traitées sont elles bien connues sinon également célèbres (Danton, Robespierre, Couthon…).

Concernant Pauline Léon, il aurait été intéressant de justifier sa réunion à des Jacobins, membres à part entière du club du même nom, et de dire quelques mots de l’attitude desdits Jacobins à l’égard des femmes (la mise à distance) durant les premières années de la Révolution, et non seulement en octobre 1793. Il est vrai que les Républicaines ont demandé (et obtenu) l’affiliation de leur club à celui des Jacobins, ce qui ne faisaient pas d’elles des «Jacobines» (même si l’étiquette leur est souvent adressée comme une insulte).

Lorsque les clubs de femmes sont interdits, c’est Claude Basire, Jacobin et Cordelier, qui a le dernier mot à la Convention: «Il est donc uniquement question de savoir si les sociétés de femmes sont dangereuses. L’expérience a prouvé, ces jours passés, combien elles sont funestes à la tranquillité publique [allusion à une provocation montée avec les Dames de la Halle]; cela posé, qu’on ne me parle plus de principes. Je demande que révolutionnairement, et par forme de mesure de sûreté publique, ces associations soient interdites, au moins pendant la révolution.»

___________________

Statut de l’ouvrage: acheté d’occasion en librairie (le service de presse des éditions Perrin n’ayant pas daigné me répondre).

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“L’homme des droits et la citoyenne tout court: essais d’écriture inclusive pendant la Révolution” ~ par Annie Geffroy

07 vendredi Fév 2020

Posted by Claude Guillon in «Articles», «Faites comme chez vous !»

≈ Commentaires fermés sur “L’homme des droits et la citoyenne tout court: essais d’écriture inclusive pendant la Révolution” ~ par Annie Geffroy

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Annie Geffroy, « Théorie du genre », Condorcet, Dominique Godineau, Dufourny, Féminisme, François Chabot, Guyomar, Jacques Godechot, Jean-Denis Lanjuinais, Léopoldine Frey, Paule-Marie Duhet, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires, Robespierre, Talleyrand

Je reproduis ci-après le début d’un passionnant article d’Annie Geffroy, publié sur le site de la revue en ligne Savoirs En Prisme. Vous pouvez accéder à l’intégralité du texte en cliquant sur le lien figurant en bas de l’extrait. [Comme d’habitude, les notes sont à consulter sur l’original. On trouvera également en annexe de l’original une bibliographie et les extraits de textes utilisés par l’autrice.]

L’homme enfin satisfait d’avoir recouvré ses droits, en rend graces à l’Etre Suprême.

En évoquant les débats qui, pendant les années de la Révolution, portent sur les paires de mots homme/femme et citoyen/citoyenne, je voudrais montrer comment un nom, potentiellement générique c’est à dire incluant les deux sexes, rate l’inclusion tandis qu’un autre, sur un plan quotidien et fugitivement, la réussit.

Je m’appuierai sur une trentaine de textes, regroupés en annexe dans l’ordre chronologique. Ils ont des statuts historiques et énonciatifs très divers: entre un article de dictionnaire, un discours, une lettre, un rapport de police, quels points communs? Un même statut linguistique d’énoncés attestés, qui témoignent de la réalisation de possibles-en-langue dans un discours.

L’homme potentiellement inclusif des droits

En latin, homo a deux sens : générique – ne disons surtout pas neutre! – ou sexué. Le nominatif homo donne en français le pronom on, et l’accusatif hominem le nom homme; mais y a-t-il eu continuité sémantique d’une langue à l’autre? Vers 1360, Oresme affirme que non (texte 1). En 1694, la première édition du Dictionnaire de l’Académie dit que oui, et établit les deux acceptions, espèce humaine et sexe masculin (t. 2). Les éditions suivantes redisent la même chose, et les dictionnaires concurrents suivent peu à peu. La langue enregistre donc deux sens, mais le discours ne peut en actualiser qu’un à la fois, car ils sont, en toute logique, incompatibles: homme ne peut pas, à la fois, inclure et exclure les femmes.

En 1788, une solution radicale est suggérée : les femmes, parait-il, veulent abolir… le mot femme! (t. 4). Moins drastiquement, l’ambiguïté est levée quand le texte comporte une définition (t. 22). Elle l’est encore, et c’est le cas le plus fréquent, quand le contexte offre un terme associé ou opposé à homme. Il en est ainsi dans les textes 9 (l’homme/ sa compagne), 11 (les hommes/ nous), 15 (les femmes/ les deux sexes), etc. Parfois, c’est le référentiel, le monde extérieur, qui commande l’interprétation. Quand Robespierre définit la France comme « une nation de 25 millions d’hommes », hommes est un équivalent d’habitants (t. 14). Mais, en l’absence de précision contextuelle ou référentielle, on hésite sur le sens à donner au mot. Il peut alors véhiculer une exclusion non dite… et celles-ci  sont les plus efficaces!

Dans la Déclaration de 1789 comme dans celles qui suivirent, on n’a ni définition ni terme associé, et aucun univers de faits qui serve de pierre de touche, puisqu’il s’agit d’une proclamation de principes. Le lecteur est renvoyé à son propre univers de référence, et/ou à  celui qu’il prête au collectif auteur du texte. La divergence possible n’est pas mince, puisqu’il s’agit de l’égalité des droits politiques pour les deux sexes, acquise aujourd’hui mais qui ne l’était pas en 1789. Il risque donc de projeter rétroactivement sur le texte (et ce d’autant plus qu’il est sacré!) des valeurs actuelles qui pouvaient être étrangères à ses rédacteurs, et de lire le mot homme dans la Déclaration selon sa sensibilité personnelle: ce flou, comme toute imprécision, est le véhicule idéal pour le maintien d’un sexisme implicite.

Le 26 août 1789, l’Assemblée constituante, après avoir discuté et voté les 17 articles du texte, renvoie corrections et achèvement après la rédaction de la Constitution elle-même. Mais, en septembre 1791, elle conserve la version initiale. C’est que ledit texte est vite devenu un bloc sacré donc intouchable, table de la loi, catéchisme et credo popularisant le syntagme droits de l’homme si opportunément ambigu. Cent soixante ans plus tard, le Préambule de la Constitution de 1946 (t. 35) récupère ce bloc, mais le complète par des ajouts. Le premier, qui « garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme », rappelle (et prouve) que le mot homme dans le texte de 1789 est bien lu, en 1946 encore, comme sexué. C’est seulement après cette date que peut s’installer, puis dominer la lecture générique. Des deux interprétations, universaliste ou sexiste, c’est la première qui semble aujourd’hui naturelle ; mais c’est la seconde qui l’était il y a 250 ans.

Née en 1943, j’ai cru à l’interprétation universaliste au début de mes études en 1955, et je m’y suis accrochée pendant 25 ans, malgré des doutes croissants, jusqu’à la lecture  en 1982  du recueil  Les Femmes dans la Révolution française.Ces textes sont aujourd’hui bien connus (et disponibles sur Gallica), mais ils l’étaient beaucoup moins il y a 50 ans. Et on peut hésiter sur le statut à donner à certains d’entre eux : plaisanteries, persiflages ? En 1971, P.M. Duhet considérait la Requête des dames  (t. 10) comme un «faux décalogue», car «les femmes ne parlent pas ainsi»[2]. Ne sachant pas comment «les femmes» parlent (ou devraient parler), je trouve aujourd’hui ce texte fort facétieux, ce qui ne l’empêche pas d’être prophétique!

Je ne suis pas la seule à avoir cru à l’interprétation inclusive, universaliste, de l’expression droits de l’homme. J. Godechot (1909-1989) affirmait, en 1951, que «Robespierre réclama le suffrage des femmes». D. Godineau, en 1989, ne commet pas cette erreur, mais elle attribue l’antiféminisme de l’époque à «des questions de mentalités»,  ce qui est une quasi-tautologie, peut-être une excuse, mais pas une explication.

Bien sûr, la mentalité dominante de l’époque est sexiste et ségrégative: les femmes sont un ensemble à part ; pour certains elles sont, plutôt que des personnes, des propriétés, et avant d’avoir des droits elles sont un droit (de l’homme, bien entendu). Car parfois, le mot femme ne possède pas même le sème humain. En 1793, Dufourny dénonce Chabot qui vient d’épouser Léopoldine Frey, sœur de riches banquiers autrichiens: «Une femme est un vêtement», et les «étoffes étrangères» sont proscrites (t. 28). En 1794, Duffay, curé abdicataire, se vante d’avoir échangé «un vieux bréviaire contre une jeune républicaine» (t. 29). Comment l’objet ainsi désigné pourrait-il être sujet d’un quelconque droit? Quand elle est vue comme un être humain, c’est un humain bien particulier. En 1789 Marat, dans son projet de déclaration, se débat (il n’est pas le seul!) entre nature et société. Si l’homme «a le droit de se reproduire», sa partenaire n’a qu’un gré. Dans l’état de nature, il n’y a que doux penchant. Mais dans l’état de société, femmes et enfants sont «représentés par les chefs de famille»; où est donc passée la violence présente dans ledit état? (t. 9).

En juillet 1789, Sieyès introduit la distinction, promise à un bel avenir, entre citoyens actifs et passifs. Et les femmes appartiennent, «du moins dans l’état actuel» concède-t-il (t. 8), à la seconde catégorie. Fr. Héritier a pointé cette paire non symétrique comme le pilier de la «valence différentielle des sexes», comme le trait qui, d’Aristote à L’Encyclopedia Universalis (-325, +1984) oppose le gamète à l’ovule. En juillet 1792, la section du Louvre conteste la distinction de Sieyès: les citoyens, si pauvres soient-ils, «servent la patrie par leurs bras, par leurs femmes et par leurs enfants»… mais ils ne vont pas jusqu’à donner à leurs possessifs un sens réciproque (t. 18).

Souvent, cerise sur le gâteau, c’est dans son propre intérêt que la femme est exclue. En 1791, Talleyrand  réserve aux hommes les pouvoirs publics: cette exclusion sert «le bonheur commun, surtout celui des femmes» (t. 15). Lanjuinais, en 1793, la réitère comme conforme à la nature ; si on la transgressait, «les hommes et les femmes n’y gagneraient rien de bon» (t. 23). Ladite nature, comme le droit censé en être issu, est souvent évoquée pour mettre les femmes à part (t. 9, 23, 29), mais elle peut aussi servir d’argument pour l’égalité (t. 16, 17): preuve que la notion se décline dans l’histoire et les sociétés de diverses façons, comme l’a montré l’anthropologie.

On trouve heureusement, dans le chœur sexiste, des dissonances. La revendication égalitaire s’exprime pendant la Révolution, et elle comporte forcément une levée d’ambiguïté sur le sens du mot homme. Quels moyens linguistiques sont utilisés?

Quand on pense féminisme, on pense d’abord, et avec raison hélas, à Condorcet. Pourquoi hélas? Il parle en 1788 des «droits du genre humain» (t. 5). En 1789, dans son projet de déclaration, il définit l’autorité des maris comme une violation de la «liberté naturelle» des épouses. Mais, dans le résumé qu’il publie, la précision a disparu. En 1790, il prend à nouveau parti pour «l’admission des femmes au droit de cité». Mais, élu à la Convention et membre de son Comité de constitution, il propose le 15 février 1793 un nouveau projet de Déclaration qui conserve les signifiants ambigus homme et citoyen. Ce «silence de Condorcet» me semble d’autant plus déplorable que, dans le débat de 1793, d’autres Conventionnels font, eux, des propositions fort claires.

Guyomar publie en avril 1793 Le partisan de l’égalité politique, et préconise de donner à homme le sens générique (t. 22). Romme propose la même solution: «Tout homme de l’un ou de l’autre sexe», une fois adulte, devient citoyen (t. 21).

Le recours au masculin comme genre non spécifié fait toujours l’objet de débats animés. On l’a constaté en 1984, lors de la commission Roudy-Groult sur la féminisation des noms de métier, qui suscita l’ire de l’Académie. Si l’on en croit B. Cerquiglini, qui  a fait le récit des affrontements politico-linguistiques de ces 30 dernières années, le débat est aujourd’hui quasi-périmé.

En 1789, les optimistes espèrent pouvoir étendre la Déclaration aux femmes aussi; les pessimistes, ou les plus lucides, y voient d’abord une continuation de l’ancien patriarcat. Les  militantes appliquent des droits, en participant aux affaires publiques par l’écrit, la manifestation, le vote, la réunion, et essaient de les faire avaliser par les autorités. En mars 1792, devant l’Assemblée législative, Pauline Léon réclame le droit des femmes à s’armer, comme «tout individu», pour leur défense; sauf, et elle court-circuite le mot décisif, si on prétend que «la Déclaration des Droits n’a point d’application pour les femmes» (t. 17). En juillet 1793, des citoyennes de la Section des Droits de l’Homme affirment que les devoirs sont différents pour les deux sexes, mais pas les droits; là encore, le mot litigieux est évité: «La déclaration des droits est commune à l’un et l’autre sexe» (t. 25). Il est assumé, au contraire, par des femmes de la section Beaurepaire venues affirmer leur soutien à la nouvelle constitution, en même temps que leur contestation: elles revendiquent «l’entier exercice […] des droits de l’homme» (t. 26). […]

Cliquez pour lire la suite du texte sur le site de Savoirs En Prisme.

Cliquez sur les images pour les AGRANDIR.

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Pauline Léon prononce un discours sur Marat (4 août 1793)

10 vendredi Jan 2020

Posted by Claude Guillon in «Documents»

≈ Commentaires fermés sur Pauline Léon prononce un discours sur Marat (4 août 1793)

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Jacques Louis Vachard, Legendre, Marat, Mittié fils, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires, Théophile Leclerc

Je trouve dans un numéro du Journal des hommes libres de tous les pays un compte rendu – qui m’était inconnu – d’une cérémonie qui se serait tenue le dimanche 4 août 1793, à la «Société fraternelle des deux sexes».

Cet intitulé peut désigner aussi bien la Société fraternelle des patriotes de l’un et l’autre sexe que la Société des Citoyennes républicaines révolutionnaires, l’une et l’autre étant régulièrement confondues par les libellistes. C’est le rôle joué par Pauline Léon qui m’intéresse, laquelle se trouve précisément être membre des deux sociétés, et cofondatrice de la seconde.

Le Vachard mentionné est probablement Jacques Louis Vachard, colporteur, membre du Conseil général de la Commune (qu’il doit représenter), élu administrateur du département en janvier 1793. Mittié fils est probablement le représentant des Cordeliers, dont il fait partie et où Marat l’a désigné parmi les «bons patriotes» en juin 1791 (De Cock, Le Club des Cordeliers, n° 401, p. 827. À noter que Mittié père est également un sans-culotte en vue, et que c’est peut-être lui que visait Marat). Pauline Léon a pu être gênée par la nécessaire coexistence pacifique avec Legendre, que l’Enragé Théophile Leclerc (qu’elle a rencontré, dont elle est peut-être déjà l’amante, et dont elle sera l’épouse) a attaqué aux Jacobins quelques mois plus tôt.

Le libelliste donne à Pauline un rôle au moins égal à celui de Legendre dans la cérémonie – il est vrai qu’elle est certainement porte-parole de la société invitante – et la flatte outrageusement, dans des termes que je qualifierai de proféministes essentialistes: «Tous ces discours seront imprimés, et l’on trouvera dans celui de la citoyenne Léon cette finesse d’observations qui n’appartient qu’aux femmes, et ces nuances philosophiques et délicates, que peu d’hommes partagent avec elles.»

Je ne connais pas la brochure ainsi annoncée; j’ignore si elle a effectivement été imprimée, mais ce sera peut-être l’objet d’une découverte ultérieure…

 

Journal des hommes libres de tous les pays, ou le Républicain, n° 279, 7 août 1793, p. 1190.

« Dimanche s’est faite l’inauguration des bustes de Michel Lepelletier et de Jean-Paul Marat, à la société fraternelle des deux sexes, réunis aux ci-devant Jacobins Saint-Honoré.

Cette cérémonie a été accompagnée du recueillement qu’elle inspiroit. Des députations de la convention nationale, de toutes les autorités constituées et sociétés populaires de Paris y ont assisté, Vachard : la citoyenne Léon, Mittié fils, Legendre et quelques autres orateurs ont jetté quelques fleurs sur la tombe de ces deux martyrs de la liberté et de leurs opinions républicaines.

Ces discours ont été entremêlés de chants funèbres, du ton le plus touchant, le plus attendrissant, exécutés par les aveugles, dont les talens en ce genre étonnent toujours sans jamais fatiguer. Nous ignorons le nom du compositeur de la musique, mais nous pouvons assurer qu’elle fait honneur à sa sensibilité.

Plusieurs traits de la vie de Marat, inconnus même au plus grand nombre des citoyens de Paris, ont été publiés par Legendre, et n’ont servi qu’à faire regretter davantage la perte de cet infatigable ami des malheureux.

Marat n’est plus, s’est écrié Legendre : il ne sera jamais remplacé ; consolidons la république, a dit la citoyenne Léon, fondons, assurons pour toujours le bonheur de nos concitoyens ; c’est la seule manière de le venger digne de lui.

Tous ces discours seront imprimés, et l’on trouvera dans celui de la citoyenne Léon cette finesse d’observations qui n’appartient qu’aux femmes, et ces nuances philosophiques et délicates, que peu d’hommes partagent avec elles. »

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Un «nouveau» portrait de Claire Lacombe…

15 dimanche Sep 2019

Posted by Claude Guillon in «Billets»

≈ Commentaires fermés sur Un «nouveau» portrait de Claire Lacombe…

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Claire Lacombe, Clubs de femmes, Républicaines révolutionnaires, Stéphanie de Beauharnais

Une notice biographique récente de Claire Lacombe, bricolée avec pas mal de vrai et un peu d’invention est illustrée par un «nouveau» portrait, qui s’inscrit dans une suite appelée à se compléter au fil des ans, la nature d’Internet ayant horreur du vide d’images…

Seul menu problème, ce portrait est présenté ailleurs comme celui de Stéphanie Louise Adrienne de Beauharnais, «princesse française et par mariage, grande-duchesse de Bade, est née à Versailles, en France, le 28 août 1789 et morte à Nice, dans le royaume de Sardaigne, le 29 janvier 1860. Fille du comte Claude de Beauharnais, parent par alliance de l’impératrice Joséphine, elle est adoptée, en 1806, par Napoléon Ier, qui en fait ainsi une princesse impériale française. Mariée au futur grand-duc Charles II de Bade, elle est grande-duchesse de Bade de 1811 à 1818»

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Visibilité de Charlotte Corday

28 vendredi Juin 2019

Posted by Claude Guillon in «Bêtisier»

≈ Commentaires fermés sur Visibilité de Charlotte Corday

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Charlotte Corday, Guillaume Mazeau, Gwenaële Robert, Marat, Michel Onfray, Olivier Coquard, Pauline Léon, Républicaines révolutionnaires, Vincent Bolloré

Créé en 2001 à l’initiative de Gwen-Aël Bolloré, le Prix Breizh «salue chaque année l’œuvre d’un auteur d’origine bretonne ou ami de la Bretagne». Le Prix Breizh, qui s’intitulait auparavant «prix Bretagne», ce qui on en conviendra pouvait prêter à confusion, est désormais «placé sous le mécénat» de M. Vincent Bolloré (Vivendi, Canal +, etc.).

Il vient d’être décerné à Mme Gwenaële Robert pour son livre Le dernier bain, paru chez Robert Laffont l’année dernière.

J’ignore si Mme Robert a la double qualité d’être «d’origine bretonne et amie de la Bretagne», mais en tout cas elle n’est pas une admiratrice de Marat. C’est son droit. Elle semble admirer beaucoup Charlotte Corday. C’est encore son droit.

Je sais ce que vous allez me dire: «Mais enfin, pourquoi persifler, alors que Charlotte Corday a tout de même assassiné un député élu, ce qui devrait susciter l’admiration de l’anarchiste que tu es?»

Eh! que voulez-vous, on a de ces contradictions! Et puisque vous en parlez, c’est sans doute l’une des raisons de mon agacement: rares sont les admirateurs.trices de Corday qui recommandent ou approuvent le députicide. D’ailleurs savent-elles seulement que Marat était député?

Qu’importe! Ce qui compte, c’est que Marat était un monstre. C’est au moins ce que l’éditeur Robert Laffont nous rappelle dans son prière d’insérer («prière de poignarder» serait plus adapté en l’espèce):

Paris, an II. La France vibre sous le souffle de la Terreur. Jane, une jeune Anglaise cachée dans l’appartement d’aristocrates émigrés, Théodose, un moine qui a renié sa foi par peur de la guillotine, Marthe, la lingère de Marie-Antoinette emprisonnée au Temple, David, le fameux peintre et député de la Convention, ou encore une Normande du nom de Charlotte Corday, tout juste arrivée à Paris… Ils sont nombreux, ceux qui tournent autour du logis de la rue des Cordeliers où Marat, cloîtré, immergé dans des bains de soufre, traque les suspects hostiles aux idées de la République. Il ignore que certains d’entre eux souhaitent sa mort et qu’il ne lui reste plus que trois jours à vivre. Par cette fiction qui nous propulse dans le cœur battant de l’Histoire, Gwenaële Robert détruit l’image sublime et mensongère que David nous a laissée de son ami Marat. Du bout de sa plume, grâce à un dispositif romanesque et à un sens de la reconstitution impressionnants, elle gratte le vernis de la peinture pour révéler la réalité du monstre.

Dans la petite vidéo qui suit, Mme Robert explique que son travail de romancière s’inscrit dans un mouvement plus général qui redonne une visibilité aux femmes dans la Révolution. Il serait plus exact de dire que ce mouvement – dont le regrettable Michel Onfray est la figure de proue médiatique – redonne de la visibilité aux femmes dans la contre-révolution. Je veux dire: non seulement dans la résistance à la révolution dans son cours même, en 1793 en l’espèce, mais dans l’usage contre-révolutionnaire qui en est fait aujourd’hui.

Expliquer que le courage et la sensibilité féminines se sont alliées (chez Corday et d’autres) pour résister à «la Terreur» incarnée par Marat est d’autant plus grotesque que les plus fervents admirateurs et partisans de l’Ami du peuple étaient précisément des admiratrices partisanes, qui lui ont voué un véritable culte: les Citoyennes républicaines révolutionnaires.

Des monstres femelles, probablement!

Ce minuscule incident édito-mondain montre à mon sens qu’il n’y a pas lieu de se réjouir de n’importe quelle espèce de mise en avant ou «réhabilitation» des femmes dans l’histoire. Je l’ai écrit récemment à propos d’une sympathique émission de France-Inter sur Pauline Léon, je le redis ici à propos de cet énième éloge de Charlotte Corday. Il n’existe pas d’histoire «neutre» et pas non plus de «féminisme» ou de «proféminisme» angélique. C’est d’ailleurs le problème originel du féminisme (voyez Olympe de Gouges) qui a retardé et contrarié son expansion durant au moins tout le XIXe siècle (et pas seulement l’incontestable résistance de beaucoup d’hommes). Je ne crois pas que tout soit «bon à prendre» de ce point de vue, ni du point de vue de l’exactitude historique ni du point de vue d’un actuel féminisme révolutionnaire.

Tâchons de ne pas critiquer un livre sans en recommander un autre. Outre l’excellente biographie d’Olivier Coquard (qu’il conviendrait de rééditer), je recommande une fois de plus la lecture du passionnant ouvrage de Guillaume Mazeau, aussi agréable à lire qu’un roman, Le Bain de l’histoire (Champ Vallon).

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Après le cinéma, Pauline Léon mise en scène à la radio…

25 mardi Juin 2019

Posted by Claude Guillon in «Articles»

≈ Commentaires fermés sur Après le cinéma, Pauline Léon mise en scène à la radio…

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1793, Claire Lacombe, Clubs de femmes, Enragé·e·s, Féminisme, Femmes en armes, Julia Artamonov, Pauline Léon, Pierre Schoeller, Républicaines révolutionnaires

Après avoir tenu le rôle que l’on sait (mais que l’on a du mal à distinguer à l’écran) dans le film Un peuple et son Roi (voir en bas de page une photo tirée du film) voilà que Pauline incarne les femmes révolutionnaires dans une série destinée aux enfants, baptisée Les Odyssées, sur France Inter.

Destinée aux enfants, comme je l’ai dit, la courte émission (14 mn) est un peu infantilisante: exclamations et questionnements surjoués. On y entend à propos de la terreur (innommée, sauf inattention de ma part) cette perle: «Pendant les révolutions, les gens deviennent complètement paranos». Il aurait été plus exact et plus pertinent d’expliquer la guerre aux frontières et la guerre de classes!

On «découvrira» avec étonnement que Pauline aurait participé à la marche des femmes sur Versailles des 5 et 6 octobre 1789.

En réalité, si elle fait allusion à l’événement dans le «Précis de sa conduite révolutionnaire», c’est uniquement pour dire qu’il l’a confirmée dans la conviction que Lafayette était suspect. Mais de quoi?… Il est peu probable qu’elle le soupçonne d’avoir comploté pour ramener le roi à Paris (c’était pourtant bien en effet son désir) et c’est sans doute son attitude temporisatrice qu’elle critique. Mais il est difficile d’aller plus loin dans la compréhension de cette brève mention: «Mes soupçons se vérifièrent au 5 octobre 1789».

Une chose est sûre: si Pauline avait participé à la marche sur Versailles, elle l’aurait précisé, dans un texte où elle vient de se vanter d’avoir été très active le jour de la prise de la Bastille. Même si l’on retenait l’hypothèse (paradoxale, mais non pas délirante) qu’elle marque par là une réticence envers tel ou tel aspect de l’événement, elle aurait logiquement mentionné sa participation et mis son rôle en valeur, ne serait-ce que pour éviter qu’une dénonciation le révèle avant elle.

Comme la page de l’émission inclut la bande-annonce du film Un peuple et son roi et que Pierre Schoeller y fait marcher Pauline de Paris à Versailles, il est probable que la légende vient de là (au moins dans son histoire récente). Et comme les concepteurs de l’émission ont négligé d’indiquer sur la page Internet les sources qu’ils ont utilisées – comme toute indication bibliographique – ce qui est un comble dans une démarche qui se veut pédagogique! nous n’en saurons pas davantage.

Sans synergie avec une documentation scientifique (je dis scientifique et non faisant de la vulgarisation à partir d’une version romancée de l’histoire), je vois mal l’intérêt de ce genre de «mise en scène». Peut-être Pauline Léon aura-t-elle bientôt quelques rues à son nom; peut-être le donnera-t-on – comme celui de sa camarade Claire Lacombe – à quelques écoles… Je doute que l’histoire des femmes et la reconnaissance de leur rôle dans la Révolution progresse pour autant.

En voici une llustration – c’est le cas de le dire!

Pauline Léon, jouée par Julia Artamonov était bien à Versailles… puisqu’elle figure, photographiée à l’Assemblée, dans un document pédagogique élaboré à partir du film de Pierre Schoeller.

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