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Colonies, Jean-Clément Martin, Jean-Jacques Rousseau, Lutte des classes, Vendée, Voltaire
05 mercredi Oct 2022
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in≈ Commentaires fermés sur “Penser les échecs de la Révolution” de Jean-Clément Martin (pour paraître le 27 octobre)
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Colonies, Jean-Clément Martin, Jean-Jacques Rousseau, Lutte des classes, Vendée, Voltaire
31 jeudi Mar 2022
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in≈ Commentaires fermés sur “Jean-Gabriel Gallot, un médecin des Lumières au chevet de la Révolution” ~ par Philippe Bourdin
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Aimé-Paul Fleuriau, Franc-Maçonnerie, Jean-Gabriel Gallot, Jean-Jacques Rousseau, Philanthropie, Philippe Bourdin
Jean-Gabriel Gallot (1744-1794), médecin et député du tiers état, constitue l’archétype de ces hommes qui ont vu dans la Révolution la possible réalisation de leurs idéaux philanthropiques. Issu du milieu protestant vendéen et proche de celui des négociants rochelais, passionné par des disciplines éclectiques – médecine, bien sûr, mais aussi météorologie, botanique, minéralogie, bibliophilie… – cet homme des Lumières participe sa vie durant aux réseaux académiques, franc-maçonniques, aux clubs et sociétés savantes. Admirateur de Rousseau, philanthrope, il adhère tout naturellement aux idées révolutionnaires et est élu aux États généraux, avant d’être le malheureux témoin de la guerre de Vendée et des exactions des colonnes infernales dans sa contrée natale.
Dans cette biographie intellectuelle et personnelle, Philippe Bourdin reconstitue la vie quotidienne d’un médecin et d’un député humaniste à travers sa correspondance avec son ami Aimé-Paul Fleuriau et les lettres inédites adressées à son épouse Élisabeth, lors de ses séjours à Versailles et Paris en pleine période révolutionnaire.
448 pages, 18,00 €.
02 mercredi Mar 2022
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in≈ Commentaires fermés sur “Familles en [contre-]révolution, [contre-]révolution en famille ~ Colloque à Valence les 1er et 2 avril
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Anne Jollet, Anne Rolland-Boulestreau, Annie Duprat, Benoît Charenton, Bertrand Delahaye, Boris Deschanel, Côme Simien, Gabrielle Housset, Huguette Krief, Jean-François Chauvard, Jean-Jacques Rousseau, Julien Mathieu, Mathilde Chollet, Nathan Perl-Rosenthal, Nicolas Soulas, Paul Chopelin, Philippe Bourdin, Pierre Meignan, Siân Reynolds, Virginie Martin
12 dimanche Sep 2021
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in≈ Commentaires fermés sur “D’histoire & d’historiens” ~ recueil de textes de Claude Mazauric
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Albert Manfred, Albert Soboul, Claude Mazauric, Denis Crouzet, Eric Hobsbawn, François Guizot, Georges Lefebvre, Isabelle Laboulais, Jean Calvin, Jean Nicolas, Jean-Jacques Rousseau, Jean-Paul Sartre, Lynn Hunt, Michel Vovelle, Michel Zylberberg, Pascal Dupuy, Patrick Cabanel, Pierre Vilar, Robespierre, Société des études robespierristes
13 jeudi Mai 2021
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in≈ Commentaires fermés sur “Le végétarisme des Lumières” ~ par Renan Larue (Classiques Garnier poche)
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28 jeudi Jan 2021
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in≈ Commentaires fermés sur “Louise Dupin. Défendre l’égalité des sexes en 1750” ~ par Frédéric Marty
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Féminisme, Frédéric Marty, Jean-Jacques Rousseau, Louise Dupin, Montesquieu
17 mardi Nov 2020
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in≈ Commentaires fermés sur Jean-Jacques Rousseau parmi les “santibelli”?
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Cette statuette en terre cuite, repérée sur le catalogue d’une vente, appartient à la catégorie des «santibelli» (de l’Italien « beaux saints »), très proches des santons provençaux. Ces représentations naïves des saints (puis de personnages du folklore) étaient, à l’origine, fabriquées et vendues par des immigrés italiens à Marseille. De cultuels, ces objets sont devenus décoratifs à mesure que les sujets se laïcisaient.
Il est piquant de trouver Jean-Jacques Rousseau, s’il s’agit bien de lui, en santibelli profane, entre le bœuf et l’âne, ou entre un saint local et la marchande de marée…
24 mercredi Avr 2019
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in≈ Commentaires fermés sur “Écrits sur Rousseau et les droits du peuple” ~ par Nakae Chômin
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Démocratie directe, Eddy DUFOURMONT, Jacques JOLY, Japon, Jean-Jacques Rousseau, Nakae CHÔMIN, Souveraineté populaire
Au début des années 1880, le Japon est traversé par un vaste mouvement démocratique réclamant une constitution et les libertés fondamentales. Le journaliste et penseur Nakae Chômin (1847-1901) y joue un rôle majeur.
En 1874, Chômin traduit Du contrat social en japonais avant de le faire en chinois classique, en 1882-1883, sous le titre Min.yaku yakkai (Traduction commentée du Contrat social). Cette traduction sera l’un des livres de chevet des démocrates japonais des années 1880 ainsi que des réformateurs chinois en 1898. Dans cette œuvre, Chômin réussit à expliquer nombre d’idées complètement nouvelles en vidant les notions du confucianisme de leur sens usuel pour leur donner celles du Contrat social. À ce titre, le Min.yaku yakkai n’a pas été une traduction mais bien une réinvention. Chômin utilisa le chinois classique pour traduire d’autres textes (Constitution française de 1793, Déclaration d’indépendance américaine) et écrire de courts essais, tous inclus ici, qui témoignent de son souci de penser la transition vers une société nouvelle, faire connaître Rousseau et promouvoir les droits du peuple.
Vous pouvez écouter ICI la présentation.
Nakae Chômin est l’un des principaux penseurs du Japon moderne et contemporain. Journaliste et fondateur d’une école d’études françaises, il a été surnommé le « Rousseau de l’Orient » pour son engagement dans le Mouvement pour les libertés et les droits du peuple (Jiyû minken undô), dans les années 1880, et aussi pour ses traductions du Contrat social, du Discours sur les sciences et les arts. Ces dernières ne constituent qu’une partie d’un important travail de traduction, qui fait de Nakae un précurseur dans l’acquisition de la philosophie européenne, dont il s’est nourri lors de son séjour à Paris et Lyon en 1872-3. Il est notamment le traducteur du Fondement de la Morale d’Arthur Schopenhauer de La Morale dans la démocratie de Jules Barni. Nakae est aussi l’auteur d’un des tout premiers ouvrages de synthèse consacré à la philosophie européenne, La Quête philosophique (Rigaku kôgen, 1886). La parution en 1887 de sa fiction politique, Dialogues politiques entre trois ivrognes (Sansuijin keirin mondô, 1887), son plus grand succès éditorial, marque l’apogée de son activité. Nakae est élu à la Chambre basse lors de sa constitution en 1890, en tant que représentant du Parti libéral (Jiyûtô), mais il démissionne très vite, refusant les compromis qu’opèrent certains de ses alliés avec le gouvernement.
Vous trouverez ICI d’autres renseignements biographiques sur Nakae CHÔMIN.
Eddy Dufourmont est maître de conférences en langue et civilisation japonaises à l’université de Bordeaux III. Ses recherches portent sur l’histoire intellectuelle du Japon moderne. Avec Christine Lévy il a déjà traduit, de Nakae Chômin, Dialogues politiques entre trois ivrognes (CNRS éditions, 2008). Il a récemment contribué à La Famille japonaise moderne (1868-1926). Discours et débats, ouvrage dirigé par E. Lozerand et Ch. Galan (Picquier, 2011).
Jacques Joly, né en 1948, docteur en études de l’Extrême-Orient de l’université Paris 7, est philosophe de formation. Il a accompli toute sa carrière universitaire à l’université Eichi à Amagasaki. Il a publié Le Naturel selon Andô Shôeki (1996), « La recherche philosophique au Japon de l’après-guerre à nos jours » (in C. Galan et A. Gonon, Le Monde comme horizon, 2008). Ses recherches actuelles portent principalement sur la pensée et la traduction des œuvres de Maruyama Masao.
Avertissement
Remerciements
Introduction : Nakae Chômin et l’introduction du Contrat social dans un Japon en transformation. Une lecture au croisement du républicanisme français et de la pensée chinoise (1874-1884)
Le contexte politique : Chômin et son temps
Traduire Rousseau
Penser Rousseau et Du contrat social : fonder la morale sur une philosophie du « Ciel »
Conclusion : idéal et réalité. Le rousseauisme tempéré de Chômin
Bibliographie de l’introduction
Sources
Études
Écrits sur Rousseau et les droits du peuple
Première partie : articles (1875-1883)
1. Vie de Maître Babillard
2. Chronique du sanctuaire Shôkonsha [Yasukuni]
3. Sur les droits du peuple
4. Sur la différence des droits entre les hommes et les femmes
5. Sur le scepticisme
6. Principes du gouvernement (Des grandes lignes de la théorie politique de Rousseau)
7. Napoléon III
8. Sur l’intérêt public et l’intérêt privé
9. Sur les querelles fraternelles
10. Déclaration des droits du peuple français de 1793
11. Déclaration d’indépendance de la Confédération d’Amérique du Nord
Deuxième partie : Min.yaku yakkai 民約訳解
(Traduction commentée du Contrat social, 1882-1883. Version de 1874 en note)
Préambule
Préface du traducteur
Préface de l’auteur
Livre I. Principes du droit politique
Chapitre 1 : Sujet du livre
Chapitre 2 : La famille
Chapitre 3 : Le droit du plus fort
Chapitre 4 : L’esclavage
Chapitre 5 : Qu’enfin, on ne peut se passer du contrat pour fonder un pays
Chapitre 6 : Le contrat social
Chapitre 7 : Le Souverain
Chapitre 8 : Le monde humain
Chapitre 9 : Le domaine
Livre II.
Chapitre 1 : La souveraineté n’est pas concessible
Chapitre 2 : La souveraineté n’est pas divisible
Chapitre 3 : La volonté de tous peut-elle se tromper ?
Chapitre 4 : Les limites du pouvoir du Souverain
Chapitre 5 : Du droit de vie et de mort sur les personnes
Chapitre 6 : Les lois
Index des noms
Index thématique
21 samedi Juil 2018
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in≈ Commentaires fermés sur “Unité doctrinale du socialisme” ~ un manuscrit inédit de Jaurès (1891) analysé par Gilles Candar & Stéphanie Roza
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Babeuf, Communisme, Denis Diderot, Gilles Candar, Jean Jaurès, Jean-Jacques Rousseau, Mably, Stéphanie Roza, Utopie
Sous l’égide de la Fondation Jean Jaurès, Gilles Candar et Stéphanie Roza ont décrypté un texte de Jaurès où il traite du caractère « socialiste » de la Révolution française.
Je reproduis ci-dessous un extrait de la présentation des deux auteurs et un extrait du texte de Jaurès. On peut télécharger ici au format pdf l’intégralité de l’analyse et du texte inédit de Jaurès.
Gilles Candar & Stéphanie Roza
Dans le texte inachevé que nous publions ici, intitulé «Chapitre II – Unité doctrinale du Socialisme», Jaurès évoque le projet d’écrire l’histoire du socialisme depuis la Révolution française. Non que la Révolution soit considérée comme le berceau de l’idée socialiste à proprement parler, mais en tant qu’elle a donné à cette idée une forme et une portée entièrement nouvelles. Dans cette perspective, une thèse forte et étonnante retient l’attention dès les premières lignes : contrairement aux affirmations des «partis bourgeois», pour l’auteur, la Révolution française fut une révolution socialiste. Il faut prendre en considération l’ensemble du développement pour tenter de comprendre comment Jaurès justifie cette affirmation qui sera contredite par la caractérisation célèbre de la Révolution française comme «bourgeoise» moins de dix ans plus tard, dans son Histoire socialiste de la Révolution française. Une telle élucidation présente l’intérêt de permettre de comprendre ce que Jaurès, en 1891, entend par «socialisme».
À y regarder de plus près, l’auteur du texte de 1891 n’est pas si éloigné de celui qui signera un contrat avec l’éditeur Rouff en 1898 pour L’Histoire socialiste. Il considère déjà la Convention nationale elle-même, qui fut, emmenée par les Jacobins entre 1793 et 1794, la plus radicale des assemblées révolutionnaires, comme une assemblée «bourgeoise» (même si ce terme est mis entre guillemets dans son manuscrit). Il reconnaît «l’erreur» des révolutionnaires, qui n’ont pas compris que la réalisation du socialisme passait nécessairement par la lutte des classes. Si la Révolution française fut « socialiste », ce n’est donc pas au sens où l’ensemble de ses représentants politiques visaient consciemment le socialisme. Jaurès revient notamment sur les Constituants de la première Assemblée, en 1789-1791, qu’il caractérise comme des libéraux et des monarchistes. Ce n’est pas non plus au sens où elle aurait réalisé le socialisme, même pour un temps très court.
Il semble plutôt que la Révolution française ait été, de l’avis de Jaurès en 1891, une révolution socialiste au sens où sa dynamique interne menait tendanciellement au socialisme. Plusieurs éléments du texte vont dans ce sens : d’abord l’exposé des « origines intellectuelles » de la Révolution. Pour Jaurès, le rationalisme scientifique, sous le patronage de Roger Bacon et de Descartes, porterait en lui le socialisme car croire au pouvoir de la raison humaine, croire au progrès conduisent à viser l’abolition de l’ignorance et de la misère pour l’ensemble de l’humanité. Sur le plan des sources directement politiques, l’auteur tente de la même manière de montrer que les inspirateurs de la Révolution auraient peu ou prou prôné le socialisme. Pour cela, il reprend le canevas de l’argumentation de Babeuf au procès des Égaux. En effet, en 1797, après que sa conjuration visant à établir la communauté des biens dans la République a avorté, Babeuf, amené à se défendre devant un tribunal d’accusateurs à Vendôme, cite Rousseau, Mably, Diderot parmi ses inspirateurs. Dans son sillage, Jaurès affirme que, par ses figures tutélaires, la Révolution, et notamment sa période jacobine, aurait clairement placé son œuvre sous le signe du socialisme.
Jean Jaurès
La Révolution était prédestinée au socialisme par ses origines intellectuelles. L’idée de la science était créée et elle avait pénétré tous les esprits. Il était admis que l’homme, soit par l’observation, soit par le calcul, pouvait démêler tous les secrets de la nature et par conséquent la maîtriser. Il y avait donc, dans l’idée même de la science, un optimisme infini. Le pouvoir de l’homme n’avait pas d’autres limites que son savoir qui n’avait pas d’autres limites que la nature elle-même. Les deux hommes qui ont fondé la science moderne en affirmant que sous tous les phénomènes naturels il y avait des rapports de quantité, et que par suite l’univers entier pouvait être réduit aux mathématiques, c’est-à-dire à la raison même dans toute sa certitude et toute sa force, Roger Bacon et Descartes, ont cru à la toute-puissance de l’homme. Roger Bacon avait entrevu toutes les inventions modernes, et on peut comparer l’esprit humain, tel qu’il le comprend, à «ce miroir absolu» dont il a donné la théorie. Il est possible de construire un miroir si parfait qu’il concentre en un point tous les rayons de lumière et de chaleur de l’univers. Ce miroir dès lors est l’instrument de la toute-puissance, soit pour féconder, soit pour détruire: et peut-être c’est ainsi que l’Antéchrist embrasera le monde. Descartes croyait qu’il pouvait arriver lui-même à supprimer la mort, et il ne renonça que tard à cette croyance. La science ainsi entendue, c’est-à-dire fondée sur la nature elle- même et lui empruntant par degrés, à mesure qu’elle l’explique, son inépuisable pouvoir suggère nécessairement l’idée du progrès illimité. Cette idée du progrès illimité, non point banale et bourgeoise, mais grandiose et humaine puisque l’exaltation de sa puissance intérieure de pensée, est au XVIIIe siècle l’atmosphère même des esprits. Or comment espérer, comment affirmer le progrès illimité de l’homme sans affirmer, sans espérer le progrès illimité de tous les hommes ? Si l’humanité peut vaincre la nature par la science et la raison, elle doit avant tout vaincre ce qu’il y a en elle-même de nature rebelle et mauvaise, c’est-à-dire l’ignorance et la misère. Associer tous les hommes à la grandeur de l’humanité est le premier vœu et la plus belle victoire de la science. Tout homme a en lui la raison, et la raison, dirigée par une méthode exacte, peut en tout homme aboutir au vrai. L’éducation universelle sera donc une des plus grandes tâches de la science, et la science qui perce la nature comme un trait de feu devra se réfléchir en tous les esprits. Mais il est un excès de misère qui supprime dans l’homme le sentiment de la raison et le besoin de la vérité. Qui dit misère dit ignorance, et pis que cela, fatalité, éternité de l’ignorance. Guerre à l’ignorance signifiera donc aussi : guerre à la misère. Et la science sera payée de sa peine, car elle pourra trouver en tout homme un collaborateur. Tout homme pourra ou déduire, ou expérimenter, ou tout au moins observer ; les matériaux de la vérité sont infinis comme la nature même, tout homme sera donc, dans la mesure de ses facultés individuelles, le serviteur de la science commune. Leibniz voulait que tous les hommes et les artisans même aient un microscope pour observer. Ils seront ainsi non pas les manœuvres de la science, car ils en connaîtront le plan essentiel, mais ses ouvriers. Quelle humanité admirable et forte le XVIIIe siècle avait rêvée ! C’était là l’état d’esprit et de conscience de ces Conventionnels en qui la pensée du XVIIIe siècle respirait et combattait. Et si la Révolution française n’avait pas été plus qu’à demi-vaincue, si elle avait pu réaliser les programmes de la Convention, elle aurait accompli l’œuvre du socialisme sans que le mot même de socialisme eût été prononcé, par la seule vertu de l’idée de science identique pour elle à l’idée d’humanité : tandis que nous nous efforçons vers la justice sociale des bas-fonds de la misère, de l’ignorance et de la haine, elle y serait arrivée en suivant les hauteurs, dans la sérénité de la lumière, ou dans ces sublimes orages des cimes, qui sont les explosions de la conscience beaucoup plus que le grondement des appétits.
Elle eût transformé le régime de la propriété avant que l’antagonisme peut-être irrémédiable des classes se fût substitué à l’harmonie passagère des âmes rapprochées par un même idéal : et c’est une Assemblée «bourgeoise» comme l’était la Convention, qui eût définitivement émancipé les ouvriers et les paysans. Et certes, les penseurs qui ont le plus fortement agi sur la Révolution française contenaient la critique violente de la propriété individuelle déréglée. Dès que la Révolution se fut comprise elle-même et que, poussée par une irrésistible logique, elle eut proclamé la République, l’influence de Montesquieu et de Voltaire fut presque éliminée : et deux forces seulement agirent sur elle, Jean-Jacques et l’Encyclopédie. Entre Jean-Jacques et Diderot, le plus actif et le plus démocrate des encyclopédistes, il y avait eu bien des malentendus, et leur conception de la civilisation humaine n’était pas la même. Jean-Jacques se méfiait de ce progrès des inventions industrielles et mécaniques qui enchantaient Diderot, et tandis que Diderot annonçait et préparait l’avènement des arts mécaniques et de la civilisation industrielle, tandis que dans le fameux article «Art» de l’Encyclopédie il célébrait les manufactures qui par le groupement des ouvriers et la division du travail multipliaient la puissance humaine, Rousseau eût volontiers arrêté les sociétés humaines dans une semi-ignorance et une semi-indolence idylliques, et il engageait les hommes non point à conquérir la nature, mais à la savourer. Or, malgré leur opposition, Diderot et Rousseau s’accordent, dans l’esprit des hommes de ce temps, à dénoncer « la propriété » comme la racine de tous les maux. L’œuvre tout entière de Rousseau et de Diderot est là pour le démontrer, et je pourrais multiplier les citations décisives. Je veux tout d’abord en emprunter seulement quelques-unes au beau plaidoyer que Babeuf a prononcé devant la Haute Cour de Vendôme. Nous verrons ainsi que les doctrines « socialistes » de Jean-Jacques et de Diderot n’étaient point restées dans leurs livres, incomprises et inertes, qu’elles avaient circulé à travers la Révolution elle-même, et que par elles les derniers des Révolutionnaires étaient excités à l’action. Et puis, il me plaît de montrer que ce pauvre et grand Babeuf en qui la stupide histoire ne montre guère qu’un conspirateur criminel ou un fanatique imbécile se rattachait à la pensée du XVIIIe siècle en ce qu’elle a de plus généreux et de plus décisif. Voici Rousseau : «Vous êtes perdus si vous oubliez que les fruits sont à tous et que la terre n’est à personne.» «Pour que l’état social soit perfectionné, il faut que chacun ait assez et qu’aucun n’ait trop.» «Ignorez-vous qu’une multitude de vos frères périt ou souffre du besoin de ce que vous avez de trop, et qu’il vous fallait un consentement exprès et unanime du genre humain pour vous approprier de la subsistance commune tout ce qui allait au- delà de la vôtre ?» «L’ambition dévorante, l’ardeur d’élever sa fortune relative, moins par un véritable besoin que pour se mettre au-dessus des autres, inspire à tous les hommes un noir penchant à se nuire mutuellement, une jalousie secrète d’autant plus dangereuse, que, pour faire son coup plus en sûreté, elle prend souvent le masque de la bienveillance ; en un mot, concurrence et rivalité d’une part, de l’autre opposition d’intérêts, et toujours le désir de faire son profit aux dépens d’autrui : tous ces maux sont le premier effet et le cortège inséparable de la propriété.» «Il ne saurait y avoir d’injure où il n’y a point de propriété.» Et ailleurs, dans sa lettre à l’académicien Bordes : «Avant que ces mots affreux de tien et de mien fussent inventés; avant qu’il y eût de cette espèce d’hommes cruels et brutaux qu’on appelle maîtres, et de cette autre espèce d’hommes fripons et menteurs qu’on appelle esclaves; avant qu’il y eût des hommes assez abominables pour oser avoir du superflu pendant que d’autres meurent de faim; avant qu’une dépendance mutuelle les eût tous forcés à devenir fourbes, jaloux et traîtres, je voudrais bien qu’on m’expliquât en quoi pouvaient consister leurs vices, leurs crimes.»
Stéphanie Roza a publié dans la collection des Classiques Garnier Comment l’utopie est devenue un programme politique, qui recoupe et documente – entre autres – les préoccupations «généalogiques» de Jaurès.
01 samedi Oct 2016
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in≈ Commentaires fermés sur L’Enragé Varlet dans le débat constitutionnel ~ en 1793 & aujourd’hui
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1793, Constitutions, Jean-François Varlet, Jean-Jacques Rousseau, Miyoko Tsujimura-YOKOYAMA, Robespierre
Je reproduis ci-dessous un extrait d’une communication présentée lors du Colloque international pour le bicentenaire de la Révolution française, à Tokyo et Kyoto (7 au 11 octobre 1989), par la professeure de droit japonaise Miyoko Tsujimura-YOKOYAMA.
Dans cette contribution intitulée « La Révolution française dans la tradition constitutionnelle moderne. La Constitution de 1793, représente-t-elle un “dérapage” ? », récemment mise en ligne sur Google scholar, la juriste compare les différents projets de constitution, publiés par les Girondins, Robespierre, et l’Enragé Jean-François Varlet. La prise en compte de ce dernier est assez rare pour être soulignée, saluée et prolongée, près de trente ans (déjà !) après le bicentenaire.
On peut télécharger ici le document de seize pages (en français).
Lorsque le projet girondin a été déposé à la Convention nationale, le « Comité auxiliaire de Constitution » du Club des jacobins a commencé à rédiger son contre-projet pour le critiquer. Il a adopté le 21 avril 1793 à son siège le projet de déclaration de Robespierre composé de trente-huit articles, et Robespierre l’a présenté lui-même à la Convention le 24 avril.
L’article 2 de ce projet, proclamait que les principaux droits de l’homme étaient celui de pourvoir à la conservation de son existence et la liberté. Sur ce point, il est caractéristique qu’il n’ait pas qualifié de droits naturels, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression, contrairement à la Déclaration de 1789 et celle du projet girondin.
En particulier, la propriété n’était plus traitée comme droit naturel absolu, mais comme institution sociale ou droit limité dans la société, car les objets de la propriété étaient préalablement fixés par la loi. Robespierre avait l’intention de limiter le pouvoir des grands propriétaires, accapareurs ou spéculateurs qui avaient violé l’existence des peuples et la propriété d’autrui.
On peut dire qu’il a posé la limitation du droit des grands propriétaires sur la base du droit à l’existence, pour répondre aux revendications du peuple. L’article 10 établissait le devoir de la société de pourvoir à la subsistance de tous ses membres, et en même temps l’article 11 regardait le secours public à celui qui’ manquait du nécessaire comme une dette des riches qui possédaient le superflu. Cela signifierait que Robespierre avait prévu un plan de répartition des biens dans la société ou entre les personnes privées, cette attitude apparaissant dans son plan de l’impôt progressif.
D’un côté, Robespierre a établi, dans son projet du 10 mai, l’institution gouvernementale à partir du principe de la souveraineté populaire, complété par le droit des citoyens à participer à la formation de la loi et à la nomination de ses mandataires, et le droit de les surveiller et de poursuivre ses responsabilités.
Mais comme il n’a pas suffisamment éclairci la responsabilité des mandataires envers leurs mandants ou leur circonscription électorale, il faut faire des réserves sur l’interprétation qu’il a adoptée du régime du « mandat impératif ». Il me semble possible de situer son régime dans une position intermédiaire, entre celui de la Constitution de 1793 et celui du projet de Jean Varlet que j’aborderai maintenant.
Le projet de Jean Varlet
Un des Enragés parisiens, Jean Varlet, qui a joué un grand rôle lors des insurrections de 1793, a élaboré la « Déclaration solennelle des droits de l’homme dans l’état social » et l’a présentée à la Convention nationale. Il est possible d’admettre qu’il ait théorisé les idées constitutionnelles des sans-culottes parisiens en 1793.
Les sans-culottes et les Enragés réunis dans l’assemblée des Sections et de la Commune ont formé l’idée égalitaire, en demandant l’assurance d’existence du peuple, l’égalité de jouissance, l’élimination des grandes propriétés, l’interdiction de l’accaparage [accaparement] et de la spéculation, l’établissement de l’instruction publique. Puis, ils ont demandé la réalisation de la souveraineté populaire par « la formation des lois par le peuple » et « la participation politique de tous les citoyens ».
La Déclaration de Varlet, composée de trente articles, proclamait en tête de liste des droits de l’homme dans l’état social, l’exercice de la souveraineté, puis, posait quelques types de libertés, la jouissance de la propriété, la résistance à l’oppression etc. (art. 7)
En ce qui concerne la propriété, Varlet reconnaissait seulement quatre sortes de propriétés, c’est à dire, celle qui assure les premiers moyens d’existence, la bienfaisance due aux indigents, le produit de l’industrie, et celle qui se compose des patrimoines ou héritages (art. 18), et pour ce qui est des terres, il admettait seulement le droit de possession territoriale. Par cela, il a tenté de limiter la propriété pour réaliser l’égalité de fait, mais il n’est point allé jusqu’ à nier la propriété privée.
D’autre part, comme il avait l’intention de mettre en pratique la doctrine de Rousseau : « la volonté générale ne peut pas être représentée », il a proclamé huit parties dans l’exercice de la souveraineté populaire : le droit d’élire toutes les fonctions publiques, de discuter et d’exposer ses volontés aux mandataires pour, proposer des lois, de rappeler et faire punir des délégués etc. Ainsi a-t-il établi le régime du mandat impératif, et éclairé les caractéristiques d’une institution solide permettant le contrôle des mandataires par le peuple.
Les résultats de la comparaison des projets de 1793
Les quatre projets de chaque fraction politique en 1793, comme des Girondins, des Montagnards, des Robespierristes, et des Enragés, avaient à l’origine le même but qui était de réaliser la première constitution républicaine sur les bases de la souveraineté populaire et l’égalité, qui étaient les noyaux de la revendication du peuple dans la situation révolutionnaire de 1793. Mais, les contenus étaient nécessairement différents, et parmi plusieurs, le projet de Jean Varlet était le plus démocratique et le plus influencé par la doctrine de Rousseau particulièrement en ce qui concerne la souveraineté populaire.
Plus encore, concernant la propriété, il a été constaté que les quatre projets présentaient respectivement un plan conforme aux intérêts de chaque classe : la grande bourgeoisie, la moyenne bourgeoisie, la petite bourgeoisie, et le peuple, si l’on ose présenter une interprétation aussi schématique. À partir de cela, une simple supposition pourrait nous amener à nous pencher sur la relation logique et de fait existant entre le principe des libertés, en particulier de propriété, et celui de la souveraineté ou de la démocratie, et aussi sur la relation existant entre les principes constitutionnels et les intérêts politiques et économiques de chaque classe. […]